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L’année 2017 en fantasy : la parole aux éditeurs

Par Gillossen, le vendredi 28 avril 2017 à 16:30:00

2017Qui dit mois de janvier, dit nouvelle année et retour de notre rendez-vous annuel désormais, on l'espère, bien installé.
Après 2016 et depuis 2012, nous avons une fois de plus convié les éditeurs œuvrant dans le domaine des littératures de l'Imaginaire à nous faire partager leur bilan et leurs attentes à l'heure de déguster la galette des rois. Pour cette nouvelle cuvée, vous remarquerez que, incroyable innovation, nous leur posons désormais quatre questions au lieu de trois ! Mais, comme toujours, chacun répond avec sa sensibilité et ses envies propres, évidemment.
Et dans tous les cas, merci à toutes celles et ceux qui prennent ou ont pris le temps de nous répondre.

Discuter du bilan 2016 et des perspectives 2017 en fantasy sur le forum

Propos recueillis et mis en forme par Emmanuel Chastellière

Denoël Lunes d'encre en 2017 - Gilles Dumay

Visuel

Alors que 2016 se termine à peine, quel serait votre premier bilan, à chaud ?
Je ne sais pas trop si 2016 est une très bonne année ou une année exceptionnelle.
Les deux tomes de Latium de Romain Lucazeau sont sortis en octobre et novembre, et donc leur succès va aussi bénéficier à 2017. On a déjà réimprimé une fois le T1, alors que c'était le plus gros tirage de l'année. Des réimpressions des deux tomes sont prévues pour ce mois (janvier 2017). Une maison de production de cinéma est intéressée (ce n'est pas la première fois pour un bouquin français publié en Lunes d'encre, mais c'est quand même très très rare). Tout va bien.
2016 a été riche, malgré un nombre de titres volontairement « réduit » : huit. J'en publierai aussi probablement huit en 2017.
Du côté des déceptions, j'ai remarqué quelque chose d'assez étonnant, mais pas forcément significatif : les trois plus mauvaises ventes de 2016 sont des ouvrages écrits par des femmes : Une demi-couronne de Jo Walton, Infinités de Vandana Singh et Arslan de M.J. Engh. Ça veut sans doute dire que je n'arrive pas à créer assez de passerelles entre la littérature féminine publiée par Denoël (Sandrine Collette, Katarina Bivald, les romans graphiques de Posy Simmonds), littérature qui rencontre un très grand succès, et Lunes d'encre. Ça veut surtout dire que je n'ai pas su créer assez d'envie, assez d'attente sur ces trois titres. Arslan est un roman politique très dur, mais en tant que « classique » il aurait dû intéresser les lecteurs de SF qui ont envie d'avoir une vision un peu historique du genre. Infinités est vraiment un beau recueil atypique avec sa SF féministe, humaniste, sensible. Je ne comprends pas que ça n'ait pas davantage marché (des recueils de SF qui se vendent, ça existe : La Tour de Babylone de Ted Chiang, La ménagerie de papier de Ken Liu, donc je ne retiens pas l'argument recueil=catastrophe économique annoncée). Pour Singh, va vite se poser la question du deuxième recueil que nous avions prévu pour 2018. Quant à Jo Walton, après le joli succès de Morwenna, je pensais que la trilogie du Subtil changement fonctionnerait mieux. On va voir ce que va donner l'édition poche et le nouveau roman de l'auteur, Mes vrais enfants, qui sort ce mois-ci.
Les affinités de Wilson, Vostok de Laurent Kloetzer, L'Inclinaison de Christopher Priest ont bénéficié d'une presse globalement très favorable. Le roman d'aventures de Kloetzer est sans doute celui qui a le plus marqué les esprits. Je ne peux que m'en réjouir, car Laurent Kloetzer est un écrivain exceptionnel (le futur qu'il dessine avec Anamnèse de Lady star, en collaboration avec son épouse Laure, Vostok, « La confirmation » est vertigineux). J'espère qu'il aura un roman à me proposer pour 2018.
A titre personnel, hors parutions, un événement vous a-t-il particulièrement marqué ou surpris au cours de cette année écoulée (un prix, un salon, etc...) dans le paysage des littératures de l'Imaginaire ?
Sans aucun doute le grand retour de la science-fiction.
Depuis quelques années, au niveau mondial (macro-économique), l'imaginaire est devenu la culture dominante. La série Games of Thrones qui accumule les récompenses (en sus du succès commercial), l'univers Marvel au ciné, Star Wars qui continue (épisode VII) et essaime (Rogue One), les jeux vidéos, DC comics au cinéma, l'univers Harry Potter qui bourgeonne... En attendant le succès mondial de Westworld, un nouveau Star Wars, d'autres séries Marvel, etc. Cette esthétique se décline même dans des produits a priori non imaginaires comme Battlefield, dont le dernier opus est consciemment ou inconsciemment steampunk.
On sent bien que dans un monde majoritairement connecté, les geeks ne pouvaient que prendre le pouvoir (la moitié de la population du Cambodge, un des pays les plus pauvres au monde, est maintenant connectée. L'Afrique se connecte et découvre la vente en ligne, avec les spécificités propres au continent, paiement à la livraison, en liquide.) Les hauts-dignitaires Chinois ont reconnu officiellement que leur industrie de pointe n'était pas assez innovante, parce qu'ils n'avaient pas assez d'ingénieurs férus de science-fiction, contrairement aux Américains et aux sud-Coréens, parce qu'ils n'avaient pas de vraie culture SF (une culture globalement incompatible avec les pouvoirs autoritaires, quels qu'ils soient). Il y a là un enjeu vital pour le pays le plus peuplé au monde ; les Chinois peuvent continuer à être la manufacture du monde et crever lentement dans leurs pics de pollution record ou passer un pallier technologique/écologique et laisser d'autres pays pauvres produire à pas cher.
A part peut-être en Corée du nord, tout le monde a accès à ce monde 2.0, même les pays arabes les plus jihad-compatible. Donc le retour actuel de la SF était prévisible. Après, il est assez polarisé. D'un côté il y a les space op' avec leurs immenses vaisseaux qui font du bruit dans le vide, ou pas ; et de l'autre, un interminable cortège de dystopies, post-apo, romans-catastrophes. Les trois quarts des derniers bons romans étrangers que les agents m'ont proposé sont dark au possible. Ce qui me pose de véritables cas de conscience ; je n'ai pas envie de publier plusieurs romans de ce genre (même excellents) sur une année. Je préfère publier des romans où le futur est viable, où il y a des solutions. Des romans où il y a aussi de la poésie, du rêve.
Avez-vous un coup de cœur éditorial plus gros que les autres pour 2017 ? Et quelle place pour la fantasy dans votre programme ?
Vous savez que je ne répondrai pas à la première partie de votre question. Pourquoi me la poser chaque année ? (La malédiction ancestrale du copier-coller ?) En 2017, c'est le grand retour de la fantasy en Lunes d'encre. Si si !
Même si on commence avec de la SF féministe et grand public : Mes vrais enfants de Jo Walton. Je sais que la directrice générale de Denoël, Béatrice Duval, en attend beaucoup. Y'a de la pression ! Vu le nombre de demandes de SP envoyées par les blogueuses/blogueurs de France et de Belgique, je vois bien que c'est quand même un peu attendu. Ouf.
En mars, Luna de Ian McDonald. Games of thrones sur la Lune en 2110. De la violence, du sexe en grandes quantités, dans un environnement pionneer où il n'y a ni justice pénale ni justice correctionnelle, juste une justice de contrats. Tu peux tuer qui tu veux du moment que tu as les moyens de dédommager la partie adverse.
En Mai, L'Année dernière de Robert Charles Wilson, un chouette roman de voyage dans le temps, typique de chez Wilson. Cet auteur est le Clifford Simak de notre génération.
En juin, Pornarina de Raphaël Eymery, une fantasy macabre avec des serials killers féminins (c'est probablement le roman le plus barré de l'année à venir, en tout cas chez moi).
Fin août, La Bibliothèque de Mount Char de Scott Hawkins (que j'ai vu critiqué par ici), un premier roman impressionnant qui m'a fait penser à une collision frontale American Gods/Preacher.
En septembre, normalement un ambitieux roman de fantasy français (je préfère ne pas l'annoncer tant que le contrat n'est pas signé, je reste superstitieux en la matière).
En octobre, Tooth & Claw de Jo Walton, un World Fantasy Award avec des dragons.
Et on finit l'année en beauté, en novembre, avec encore un premier roman de SF moitié space op moitié cyberpunk moitié énervé : Crashing Heaven de Al Robertson.
Quel sera votre plus grand défi pour cette nouvelle année ?
Il est personnel... Passons.
Pour Lunes d'encre, il est clair que l'année 2017 a des atouts (un McDonald, un Wilson, deux Walton), le plus dur va être de « faire quelque chose » avec mes trois premiers romans : Pornarina de Raphaël Eymery, La Bibliothèque de Mount Char de Scott Hawkins et Crashing Heaven d'Al Robertson. Je serai très déçu que l'un ou l'autre de ces titres (ou pire : les trois) passe inaperçu.
Une chose est sûre, je commence l'année avec deux atouts majeurs : Latium T1 et Latium T2.
  1. Denoël Lunes d'encre en 2017 - Gilles Dumay
  2. Les éditions du Bélial' en 2017 - Olivier Girard
  3. Les éditions Critic en 2017 - Simon Pinel
  4. Les éditions Pygmalion en 2017 - Florence Lottin
  5. Les Moutons électriques en 2017 - André-François Ruaud
  6. Les éditions Actusf en 2017 - Jérôme Vincent
  7. Folio SF en 2017 - Pascal Godbillon
  8. Fleuve Editions et Pocket en 2017 - Stéphane Desa
  9. Les éditions Balivernes en 2017 – Pierre Crooks
  10. Les éditions Callidor en 2017 - Thierry Fraysse
  11. Les éditions HSN en 2017 - Dimitri Pawlowski
  12. Les Editions du Chat Noir en 2017 - Mathieu Guibé
  13. Les éditions Le Héron d'Argent en 2017 - Vanessa Callico
  14. Les Editions de l'Instant en 2017 - Patrick Dechesne
  15. Les éditions Mnémos en 2017 - Frédéric Weil
  16. J'ai Lu et Nouveaux Millénaires en 2017 - Thibaud Eliroff
  17. Les éditions L'Atalante en 2017 - Mireille Rivalland
  18. Les éditions Scrineo en 2017 - Jean-Paul Arif
  19. Les éditions Ofelbe en 2017 - Guillaume Kapp
  20. Les éditions Bragelonne en 2017 - Stéphane Marsan

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