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La parole aux maisons d’édition - la cuvée 2022 !
Par Gillossen, le dimanche 3 avril 2022 à 11:00:00
Le Bélial' - Olivier Girard
- Alors que 2021 se termine à peine, quel serait votre premier bilan, à chaud, concernant votre maison ou la situation globale de l'édition en Imaginaire ?
- 2020 avait été une année exceptionnelle pour le Bélial’, avec un niveau de ventes et un CA jamais atteints à ce jour. Quand vous faites une année de la sorte, le défi, c’est curieusement d’y survivre. En ce sens que l’année qui suit, tout est indexé sur vos résultats réalisés (impôts, prélèvements sociaux, droits d’auteur, etc.). Ça s’appelle une crise de croissance, et il faut savoir la négocier, garder la tête froide et éviter la gamelle l’année suivante. À ce titre, 2021 m’angoissait pas mal (ceci dit, si tu interroges mes proches, tous te diront que je suis toujours angoissé). Or nous sommes parvenus à maintenir cette année sur les rails de 2020. Et plus encore, à vrai dire.
La collection « Une heure-lumière » continue à se comporter remarquablement, et pèse de tout son fonds sur nos résultats. Les trois premiers volumes du cycle « Terra Ignota » d’Ada Palmer bougent énormément (on dépasse les 15 000 ventes sur le T.1, hors VPC et numérique), et il ne fait aucun doute que la sortie en février de L’Alphabet des créateurs, 4e et avant dernier volume du cycle, accentue le phénomène. Nos jeunes auteurs (Jean Baret ou Rich Larson) creusent leur sillon, et le gros boulot éditorial que nous menons sur « les classiques » (je pense à l’intégrale des nouvelles de Frank Herbert en deux volumes, par exemple) porte ses fruits. Ce qui est le plus gratifiant, en définitive, c’est de constater que le boulot qu’on mène depuis des années, parfois contre vents et marées, sur certains auteurs réputés exigeants (Peter Watts, Greg Egan, Lucius Shepard, etc.) semble enfin trouver un écho, aussi bien critique que public. Et y compris avec la revue Bifrost, dont l’ambition encyclopédique et pérenne me semble essentielle dans le paysage éditorial actuel, où tout va si vite. Nous venons de franchir le cap des 1200 abonnés, et j’en suis très heureux.
- 2021 fut aussi une année de pandémie, comme 2020, mais ces deux années sont-elles très différentes l'une de l'autre à vos yeux ? Avez-vous retenu un évènement ou une décision particulièrement marquants ?
- Non, pas véritablement de différence. Toujours la même surproduction endémique mortifère. Avec une contagion à la SF, désormais, un genre dont tout le monde semblait se foutre depuis des lustres et qui, désormais, semble à nouveau digne d’intérêt aux yeux des contrôleurs de gestion. Concernant ce dernier registre, ça durera ce que ça durera…
Sur un titre plus personnel, ce que je retiens de l’année passée, c’est bien entendu l’arrivée de Laëtitia Rondeau dans l’équipe (après des années à gérer la SF au Livre de Poche), et le déménagement des éditions du Bélial’ (et donc, mon déménagement à moi, puisque les locaux des éditions sont abrités dans une partie de ma maison perso). Ça a été un énorme chantier (le déménagement, pas Laëtitia !). À tout point de vue, y compris bancaire… Qu’il a fallu finaliser en plein bouclage du n°105 de Bifrost. Une horreur, qui m’a laissée sur les genoux. Mais c’est derrière nous désormais. Nous avons des locaux tout neufs, trois beaux bureaux, un espace de stockage considérable, et une autonomie totale sur le reste du bâtiment (chez moi, donc). C’est vraiment top ; on va pouvoir sereinement songer à agrandir un tantinet l’équipe sur place…
- Quelle place pour la fantasy dans votre programme 2022 ?
- La priorité du Bélial’ a toujours été la science-fiction, je n’en ai jamais fait mystère. Ceci dit, comme tout le monde semble désormais prêt à faire tout et n’importe quoi dans le registre SF, je ne te cache pas que la fantasy brille à mes yeux d’éditeur d’un lustre que je ne lui connaissais plus depuis longtemps… Surtout si on prend le genre au sens large, en y incluant le weird et un brin de fantastique. De fait, nous publions en mars prochain dans la collection « Une heure-lumière » le premier tome d’une trilogie, « The Gameshouse ». Signée de la jeune prodige britannique Claire North, cette saga que nous sortirons en l’espace de 18 mois dans une traduction de Michel Pagel prend pour cadre la Venise du XVIIe siècle (dans le premier opus) et met en scène une maison de jeux fascinante ou les enchères sont des vies humaines et le plateau de jeu est à l’échelle du monde… En avril, dans la collection « Kvasar », paraît une édition définitive du magnifique recueil de Ursula K. Le Guin (2e recueil chez nous, en attendant un 3e, et sans doute un 4e), Les Quatre vents du désir (avec un paratexte très riche, préface de David Meulemans et interview fleuve de l’autrice ; un recueil à la croisée des genres, comme souvent chez Le Guin), et enfin, en avril, de la pure high fantasy sous la plume des… L.L. Kloetzer, qui signent ici un retour très attendu avec Noon du Soleil Noir, un roman qui met en scène un duo d’aventuriers, un sorcier et un guerrier, dans une ville imaginaire tentaculaire, le tout illustré par une vingtaine d’images de Nicolas Fructus (toute ressemblance avec une œuvre iconique du domaine n’étant absolument pas fortuite, bien entendu). Dans un tout autre registre, Paul Di Filippo devrait sous peu nous conduire dans un univers très weird qui ne laissera pas indifférent le lecteur curieux d’un Imaginaire ambitieux et littéraire. Et puis, pour plus tard, commençons à travailler sur un très très gros projet de fantasy avec un auteur francophone bien connu mais dont il est prématuré de révéler le nom.
- Enfin, quel sera votre plus grand défi pour cette nouvelle année ? (On songe notamment à la crise du papier.)
- La crise du papier est une catastrophe. En ce qui concerne le Bélial’, dont je gère la fabrication de tous les ouvrages, nous avons prix 30 % d’augmentation sur nos factures d’impression. C’est une véritable catastrophe, et je pèse mes mots. On ne pourra sans doute pas faire l’économie d’une incidence sur le prix du livre…
Pour le reste, je suis vraiment très heureux de notre programme 2022. Nous avons désormais une double colonne vertébrale, la revue Bifrost et la collection « Une heure-lumière ». Autour de cet arbre à double troncs poussent des branche-livres enthousiasmantes. Nous allons continuer à affirmer et à réaffirmer la politique d’auteurs qui nous caractérise, et à structurer notre catalogue avec la cohérence qui est la nôtre depuis plus d’un quart de siècle.
Propos recueillis et mis en forme par Emmanuel Chastellière.
Pages de l'article
- Albin Michel Imaginaire - Gilles Dumay
- Argyll éditions - Xavier Dollo
- Le Bélial' - Olivier Girard
- Aux forges de Vulcain - David Meulemans
- Denoël Lunes d'Encre - Pascal Godbillon
- Les éditions 1115 - Frédéric Dupuy
- Folio SF - Pascal Godbillon
- Les éditions du Rouergue - Olivier Pillé
- Label Mu - Davy Athuil
- Les éditions de L'Homme Sans Nom - Dimitri Pawlowski
- Les éditions Critic - Éric Marcelin
- Les éditions ActuSF - Jérôme Vincent
- Pygmalion - Florence Lottin
- Les éditions J'ai Lu - Thibaud Eliroff
- Les éditions Bragelonne - Claire Renault Deslandes et Hania Jalkh
- Les éditions Agullo - Nadège Agullo
- Les éditions Scrineo - Jean-Paul Arif
- Les éditions Rivka - Milena Schwarzberg
- Les Editions du Chat Noir - Mathieu Guibé
- Gulf stream éditeur - Angela Léry
- Au Diable Vauvert - Marion Mazauric
- Le Livre de Poche - Martin Vagneur
- Outrefleuve - Florian Lafani
- YBY Éditions – Dédé Desusclade et Fanny Truchon
- Les éditions Callidor - Thierry Fraysse
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