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Mnémos et la promotion côté éditeur
Par Luigi Brosse, le jeudi 15 avril 2010 à 22:42:39
Après vous avoir présenté la promotion des auteurs du point de vue des auteurs, justement, ce nouvel article se place à présent du coté des éditeurs. Aujourd'hui, c'est donc la charmante Claire Couturier, responsable communication (entre autres casquettes) chez Mnémos qui fait le point à ce sujet.
Comme nous le confiait Laurent Gidon, l'auteur a beau se démener pour assurer sa promotion, en France en tout cas, certaines choses sont du ressort de l'éditeur. Claire nous dévoile donc sa batterie de techniques, l'occasion également de découvrir au quotidien son métier de chargé de communication au sein d'une maison d'édition.
PS : Nous vous rappelons que cet article fait partie d’une série sur la promotion des auteurs français d’imaginaire (et plus spécifiquement de fantasy). Il fait suite aux articles d’Astrid Cooper, de Samantha Bailly, de David Bry et de Laurent Gidon. Si vous êtes concerné (auteur, éditeur…) et que vous souhaitez vous aussi partager votre expérience sur ce sujet dans nos colonnes, n’hésitez pas à me contacter.
Et surtout venez donner votre avis en forum !
Les recettes magiques de Claire Couturier
Dans une petite maison d’édition comme Mnémos, la communication se fait souvent avec un budget minimal. Toutefois, on peut déjà faire beaucoup en limitant les dépenses !
Commençons déjà par l’incontournable, nous irons voir ensuite les « extra » que l’on peut rajouter à ce premier cahier des charges.
Tout d’abord, une fois le livre imprimé, un transporteur nous en livre un certain nombre qui servira pour les services de presse, afin de faire connaître et faire parler du livre à sa sortie, quelques trois semaines plus tard. Dans la mesure du possible, nous essayons de faire dédicacer les livres par l’auteur, et au besoin, nous rajoutons un mot au destinataire du colis. Ces petites marques d’attention font que le livre sera mieux accueilli, ce n’est pas à négliger ! Autre élément : si le livre colle avec l’actualité, profitez-en : ce fut le cas pour La Sagesse des morts, de Rodolfo Martinez, un roman mettant en scène le célébrissime Sherlock Holmes, qui a bien profité du film sorti le même mois ! Il va de soi que chaque service de presse est accompagné d’un prière d’insérer : ce document reprend un argumentaire commercial du livre, une biographie et une photographie de l’auteur. Il permet de situer le roman aux destinataires qui, bien souvent, reçoivent d’énormes quantités de livres. Autrement dit, il est crucial de faire un prière d’insérer attractif, bien présenté, pour donner envie de lire l’argumentaire, qui donnera ensuite envie de lire le livre.
Dans les services de presse, il faut également compter les exemplaires destinés aux jurys des différents prix d’Imaginaire : on répartit les envois sur la moitié des jurés de chaque prix. Si le livre est primé ou même nominé, il est clair que c’est un accélérateur de vente. D’où, bien souvent, la production d’un bandeau afin que le livre arbore fièrement son prix en librairie.
C’est également le moment d’envoyer les exemplaires pour les éditeurs de poche : une cession est un moyen fantastique pour plébisciter un livre. Les tirages de poche sont en effet bien supérieurs aux tirages de grand format ! Toutefois, le poche ne pourra sortir avant deux ans, sinon, le grand format n’aurait presque pas de vie… Les éditeurs ne vont donc pas se précipiter pour lire votre envoi. C’est là que la presse joue son rôle : les articles de presse peuvent attirer le regard d’un éditeur sur un livre. Voilà pourquoi j’insiste autant auprès des journalistes pour qu’ils me renvoient les articles qu’ils ont rédigés ! Je conserve tous ces documents religieusement dans un dossier de presse, qui va servir d’argumentaire pour céder un livre en poche. Ce phénomène de bonne presse s’est passé récemment chez nous pour le livre d’Eric Holstein, Petits arrangements avec l’éternité. Folio SF et J’ai Lu ont été séduits par le livre. Eric, jeune auteur français, va voir son livre sortir en poche !
Parallèlement au service de presse, il faut démarcher les journalistes au téléphone – ou si vous pouvez, en personne, c’est ce qui marche le mieux. Sans contact préalable, le livre a de grandes chances d’être noyé dans la masse. Chez les journalistes locaux, la réception est excellente : la presse locale a toujours besoin d’actualités à se mettre sous la dent. Ce ne sont pas les cibles les plus évidentes pour notre public d’imaginaire, mais ces journaux produisent presque à coup sûr un article. Si vous proposez conjointement une tournée de dédicaces, vous pourrez même pêcher des journaux ayant plus d’ampleur : ça a été le cas pour Laurent Poujois et son Ange blond en février : Laurent habite dans une ville comptant énormément de librairies : Grenoble. Suite à ma tournée chez les différents libraires, un bon nombre m’ont dit être intéressés par une dédicace. J’en ai informé Le Dauphiné libéré, le quotidien le plus lu dans la région, qui s’est montré alors plus à l’écoute, et m’ont demandé le planning. Le simple critère géographique est une aide ou une contrainte : il y a des régions beaucoup plus actives culturellement que d’autres, ou comptant tout simplement plus de grandes villes à portée de train. En Rhône-Alpes, établir un programme de dédicace à moindre frais a été très facile : il y a Grenoble, Lyon, éventuellement Aix-en-Provence, Montpellier. Pour Frédéric Delmeulle avec La Parallèle Vertov, basé à Flers, dans l’Orne, c’est tout de même moins accessible. Les déplacements prennent plus de temps, et il faut compter avec le travail et la vie des auteurs !
Lors des dédicaces, le mieux est d’avoir des outils de comm' sous la main. Le marque-page est par exemple fortement apprécié. Autre idée, reprendre le prière d’insérer (même s’il s’adresse normalement aux professionnels) et en donner quelques exemplaires aux hésitants. Ils garderont peut-être la feuille et y repenseront plus tard, qui sait !
A coté de la comm' « réelle », il y a aussi la comm' sur internet qui est loin d’être négligeable : nos propres outils, à Mnémos, sont Facebook, Twitter, et enfin, notre propre site, tout nouveau depuis deux mois ! Notre site sert de base de données, de références où tous les titres, avec toutes leurs couvertures, figurent. Les libraires apprécient un site tenu à jour, car cela leur évite de nous appeler pour demander un renseignement. Mais ce site n’est pas qu’un outil professionnel : nous l’avons voulu aussi attractif pour nos lecteurs, avec une actualité qui change régulièrement, pour que les fans trouvent l’info à la source : nous annonçons donc les dédicaces à venir, nous faisons des comptes-rendus d’évènements avec des photos, nous mettons en lien les diverses interviews de nos auteurs. De plus, nos biographies et portraits d’auteurs français sont inédits ! Notre compte Facebook permet, quant à lui, d’entretenir une certaine proximité avec les fans de littératures de l’imaginaire : nous y distillons des informations propres à la vie d’une maison d’édition, l’arrivée des livres, la réception d’une couv ou d’une illus, la présence d’un auteur ou d’un nouveau stagiaire. C’est un outil beaucoup moins officiel qui nous laisse plus de liberté, et que je trouve bien adapté à Mnémos : moins « formel », où l’on peut s’exclamer lorsque l’on est content de quelque chose, assez humain en somme, car il nous rapproche de nos lecteurs. Ce qui ne veut toutefois pas dire que nous pouvons répondre à tout et n’importe quoi ! Enfin, Twitter, nous permet de gazouiller les menues infos quotidiennes. C’est le plus bas degré de la formalité : Twitter dessine une sorte de toile de fond de Mnémos, où l’on raconte ce qui nous vient, lorsqu’on en a le temps. On y relaie les mêmes informations, en plus court, que sur Facebook.
Mais si nos outils sont importants, il est surtout crucial d’avoir des liens solides avec les autres sites : les journalistes web spécialisés en imaginaire évidemment, mais aussi les sites de vente en ligne. Dans notre domaine, nombreux sont les gens qui commandent les livres sur internet, et se passe de l’aide d’un libraire : c’est pour cela que ces sites doivent être à jour, et comporter toutes les illustrations et les textes nécessaires.
Sur internet, il est aussi simple et peu coûteux de lancer des concours : nous en avons fait un au mois de mars en partenariat avec Fantasy.fr, pour Le Sang d’immortalité, roman vampirique de Barbara Hambly. Bientôt, ce sera au tour d’Elbakin.net pour notre ô combien important dytpique de Tanith Lee : Le Dit de la Terre plate, une fantasy délicate et ciselée aux parfums de mille et une nuits qui est sorti depuis le 8 avril en deux énormes pavés à prix réduit (NdR : plus d'infos sur le forum) ! Ces concours ne « coûtent » qu’une dizaine d’exemplaires à envoyer aux heureux gagnants, et sont très populaires sur les sites de fans !
A côté de toute cette comm' gratuite ou presque, on peut également sacrifier un peu d’argent pour amplifier le phénomène. Par exemple, en plus du marque-page, produire des affiches (attention, ce n’est pas si donné que ça !). Ou également, produire une publicité, comme nous l’avons fait pour Le Dit de la Terre plate - car nous avions décidé que ce livre était important - sur des journaux spécialisés type Livres Hebdo ou en bannière sur certains sites (encore une fois, Elbakin.net). Mais attention, ce genre de comm' n’est vraiment vraiment pas donnée.
Enfin, il reste les salons et les interventions d’auteurs : les déplacements sont vite onéreux, mais que ne ferait pas une maison d’édition pour les auteurs qu’elle défend ! En effet, inviter un auteur sur un salon, c’est avant tout le faire se confronter aux gens du milieu, le faire reconnaître, en plus de lui permettre une rencontre avec ses lecteurs. Cela lui permet d’exister dans le milieu, qu’il rencontre ses homologues, éventuellement d’autres maisons d’édition qui publieront les romans qui ne rentrent pas dans la ligne éditoriale de la nôtre (dans le meilleur des cas…). Dans la même veine, certains établissements comme les médiathèques nous contactent pour faire venir un auteur. Tout comme les salons, ce sont des moments extrêmement gratifiants car cela permet à l’auteur d’exercer véritablement son métier, de s’exprimer sur ce qu’il fait, en pratique. Et parfois, ce genre d’interventions est rémunéré.
Voici un bon aperçu du quotidien d’un service comm' au sein d’une maison d’édition. Et ceci n’est que la base, puisque le maître-mot est d’être créatif, afin d’étonner, de susciter l’intérêt des journalistes, des lecteurs, des fans… C’est un travail qui n’a jamais de fin, car on peut en faire toujours plus !
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