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Interview de Jacqueline Carey

Par Lisbei, le lundi 19 janvier 2009 à 22:50:39

Jacqueline CareyAlors que le premier tome de la trilogie Kushiel s'annonce comme l'un des succès de la fin de l'année 2008 en France, nous espérons que notre critique toute chaude aura su vous donner l'eau à la bouche. Si ce n'est pas le cas, pourquoi alors ne pas essayer cette traduction d'interview dans laquelle, Jacqueline Carey revient sur ses débuts dans l'écriture, ses méthodes de travail, ses hobbies…
Bref tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la dame et sur ses projets !

Et si ca ne vous suffit pas, il vous reste toujours notre interview exclusive du mois dernier !

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Interview traduite

Jacqueline a toujours été une grande dévoreuse de livres, et c’est à la fac qu’elle s’est mise à l’écriture, comme passe-temps. Après avoir réussi son diplôme de Littérature Anglaise, elle a travaillé pendant six mois dans une librairie londonienne, ce qui a accru sa passion de l’écriture et l’a convaincue, une fois rentrée chez elle, de s’inscrire à d’innombrables ateliers d’écriture. A présent, son travail est reconnaissable au premier coup d’œil à son style et à sa façon de décrire aussi bien les sentiments que les corps de ses personnages dans ses textes. Nous avons eu la chance de pouvoir discuter avec Jacqueline pendant un trou de son emploi du temps bien chargé.

Falcata Times : On dit souvent que l’écriture est quelque chose dont les gens se retrouvent affligés plutôt que dotés, et que c’est quelque chose que vous devez faire plus que quelque chose que vous voulez faire. Que pensez-vous de cette assertion, et cela s’applique-t-il à vous ?
Jacqueline Carey : Que cela soit vrai ou faux pour tous les écrivains, je ne saurais le dire. Pour moi, le besoin d’écrire est bien réel ; mais j’adore ça, donc dans ce sens, c’est plus un don qu’une malédiction.
FT : Quand avez-vous compris que vous vouliez être écrivain ?
JC : Après avoir fini la fac, quand j’ai découvert que je ne savais pas ce que je voulais faire de ma vie, j’ai participé à un programme d’échange et j’ai passé six mois à travailler dans une librairie à Londres. C’est pendant ces six mois que j’ai réalisé que je voulais faire de l’écriture, qui était mon passe-temps depuis si longtemps, mon métier.
FT : On dit souvent que si on peut écrire une nouvelle, on peut écrire n’importe quoi. Pensez-vous que cela soit vrai, et qu’avez-vous écrit qui vienne confirmer ou infirmer cela ?
JC : Je ne pense pas que cela soit vrai. Les nouvelles et les romans sont des médias différents, avec des défis de construction différents. Certains écrivains maîtrisent les deux ; d’autres non. Je suis douée en tant que romancière, et mes nouvelles ont tendance à n’être que les ombres jetées par des romans non écrits.
FT : Si quelqu’un entrait dans une librairie, comment le persuaderiez-vous d’essayer votre roman plutôt que celui d’un autre, et comment le définiriez-vous ?
JC : Regardez comme il est gros ! Vous avez deux livres pour le prix d’un seul ! Plus sérieusement, je pense que mes romans contiennent un mélange d’éléments assez original. Ce sont des fantasy épiques qui se passent dans un monde historique alternatif avec des intrigues compliquées, des personnages forts et une sensibilité émotionnellement mature. Ils plaisent donc à différents lecteurs pour différentes raisons. Mes fans sont formidables et loyaux. Essayez un livre, et vous verrez pourquoi !
FT : Comment vendriez-vous votre livre en 20 mots ou moins ?
JC : Il contient de l’intrigue, de l’aventure, de l’amour, de l’érotisme sombre, des trahisons, de la passion, des batailles épiques, des quêtes héroïques, de valeureux exploits, des sacrifices et des personnages inoubliables.
FT : Qui est un indispensable dans votre bibliothèque, et quels sont les auteurs dont les dernières parutions vous trouveront devant la porte de la librairie avant son ouverture ?
JC : Mes indispensables sont des livres que j’aime depuis l’enfance : les romans sur la Grèce Antique de Mary Renault, Les Garennes de Watership Down et Shardik de Richard Adams, la trilogie Riddlemaster de Patricia McKillip, Les Chroniques de Prdydain de Lloyd Alexander. Ce sont des livres que j’ai relus de nombreuses fois. Malheureusement, je suis si en retard dans mes lectures récentes (les recherches et l’écriture me prennent beaucoup de temps) que je n’ai en tête aucun auteur pour qui je me précipiterai à la librairie.
FT : Quand vous vous asseyez pour écrire, connaissez-vous la fin de l’histoire ou laissez-vous votre stylo vous guider ? Est-ce que vous rédigez des portraits de vos personnages et des scénarios pour vos romans avant de les écrire ou laissez-vous vos idées se développer au fur et à mesure de l’écriture ?
JC : Je construis mon intrigue et je développe mes personnages avant d’écrire, bien que je ne le fasse pas sur papier. Tout est dans ma tête, qui est un lieu assez surpeuplé.
FT : Que faites-vous pour vous détendre, et qu’avez-vous lu récemment ?
JC : La lecture est bien sûr un de mes passe-temps favoris. Le dernier livre que j’ai lu était le roman post-apocalyptique et élégiaque de Cormac McCarthy, La Route. J’aime aussi cuisiner, regarder la télé et aller au cinéma, passer du temps avec mes amis et voyager.
FT : Quel est votre péché mignon que personne ne connaît ?
JC : J’adore les bandes dessinées, les comics, les romans graphiques et les dessins animés ; mais il faut bien avouer que c’est devenu moins inavouable ces temps-ci.
FT : Beaucoup d’écrivains ont tendance à avoir des animaux (principalement des chats). En avez-vous, quelles sont leurs principales qualités (et transparaissent-ils dans vos romans dans certaines caractéristiques de vos personnages) ?
JC : Je possède un pitbull du nom d’Elaine. En dépit de leur mauvaise réputation, c’est l’un des chiens les plus gentils et les plus malléables que l’on puisse trouver. Etant donné que sa plus grande joie, et sa principale occupation, est de faire la sieste, elle n’apparaît dans aucun de mes romans ! Ce n’est pas particulièrement propice à une écriture dynamique.
FT : Quel personnage du livre est le plus amusant à écrire, et pourquoi ?
JC : Ma méchante par excellence, Melisande, qui apparaît largement dans la première trilogie Kushiel et joue un rôle important dans le dernier volume de la seconde trilogie, est incroyablement amusante à écrire. Elle est brillante, belle et totalement dépourvue de moralité, toujours la personne la plus intelligente de l’assemblée, échafaudant des stratégies souterraines qui sont toujours en avance de deux temps sur tous les autres. Géniale.
FT : A quel point ressemblez-vous à votre (vos) personnage(s) principal (aux) ?
JC : Pas beaucoup ! Phèdre, dans la première trilogie Kushiel, est une espionne courtisane masochiste. Imriel, le personnage principal de la seconde trilogie Kushiel, est un jeune home avec un lourd passé et des rêves d’héroïsme. Je ne suis ni l’un ni l’autre. Toutefois, ce sont des personnages qui tentent de faire ce qui est bien alors que tout s’y oppose, et j’essaie de faire de même, à ma façon, dans la vie quotidienne.
FT : Quels sont vos hobbies et comment influencent-ils votre travail ?
JC : Quand j’ai commencé à cuisiner, les descriptions de nourriture sont devenues plus présentes dans mes écrits. Cela ajoute un élément viscéral que j’aime bien. J’ai toujours été fasciné par les mythes et la religion sous toutes ses formes, et c’est un élément important dans la construction de mon monde. Mon amour des voyages a certainement fait beaucoup pour étoffer mon travail et élargir le spectre de mon écriture.
FT : Où prenez-vous vos idées ?
JC : Partout et nulle part ! C’est impossible à dire. Dans l’art, dans les films, dans les livres, dans les rêves, dans la vie. Tout nourrit la muse. L’autre jour, je faisais du jogging sur une route familière le long d’une rivière, et je me suis mise à regarder le ciel tout bleu qui apparaissait au fond d’une sorte de cul-de-sac. Pour la première fois, j’ai remarqué que les arbres de chaque côté de la route s’étaient arqués puis rejoints au-dessus du vide, formant une sorte de voûte de cathédrale verte. Quelque part là-dedans il y a l’ébauche d’une idée. Pour quoi, je n’en sais encore rien ; mais je l’ai gardé quelque part pour un usage ultérieur. Une grande partie de l’inspiration est simplement une question d’attention prêtée au monde qui nous entoure.
FT : Avez-vous jamais été confronté à la panne de l’écrivain, et si oui, comment la surmontez-vous ?
JC : J’ai tendance à plonger dans une espèce de dépression post-partum qui ressemble à la panne de l’écrivain après avoir fini un roman. Maintenant, je connais suffisamment bien ma manière de fonctionner pour savoir que j’ai juste besoin d’un peu de temps, pour laisser travailler mon subconscient, pour laisser le prochain faire surface. Je lis pour remplir mes puits, je fais des recherches qui peuvent m’aider. Et avec le temps, ça vient.
FT : Certains auteurs sont connus pour écrire à ce que beaucoup appelleraient des heures indues. Quand écrivez-vous, et comment les membres de votre maisonnée le ressentent-ils ?
JC : Je suis plutôt du genre civilisée ! Mes heures les plus créatives se situent entre 15 heures et 19 heures. Ce qui convient très bien au reste de la maisonnée.
FT : Parfois de morceaux de musique semblent influencer profondément certaines scènes de romans, avez-vous une bande-son pour vos romans ou préférez-vous écrire en silence avec peut-être une pause musicale entre deux scènes ?
JC : Quand j’écris, le silence me convient bien. J’écoute de la musique quand je marche ou que je fais du jogging, et quand je travaille sur les détails d’un roman dans ma tête. Parfois, cela a une influence ; mais quand je m’assois pour vraiment écrire la scène, je préfère le silence.
FT : Quels préjugés, si vous en aviez, aviez-vous à propos des domaines de l’écriture et de l’édition quand vous avez commencé à écrire ?
JC : Quand j’ai vraiment commencé à écrire, je n’en savais pas assez pour avoir le moindre préjugé ! Pendant les années difficiles, à un moment je me suis lancée dans l’écriture de scénario. C’est un domaine qui est encore plus difficile que l’édition. Observer les efforts constants d’autres personnes m’a appris à séparer l’aspect créatif des aspects professionnels de l’industrie. Après avoir vendu ma première trilogie, cette leçon m’est restée. Ecrire est une passion ; publier est un commerce. Il suffit de bien séparer les deux et de se conduire en conséquence.
FT : Si la musique est la nourriture de l’amour, qu’en est-il de l’écriture, et expliquez-nous ce que vous en pensez ?
JC : Je dirais que l’écriture est la nourriture de l’imagination. La littérature permet une évasion à nulle autre pareille. Le lecteur est activement engagé dans le processus, utilisant son imagination pour amener les mots à la vie. Un bon écrivain nous fait non seulement abandonner notre incrédulité le temps de la lecture, mais également notre propre sens de nous-même. Lire nous permet de grandir, de faire l’expérience de mondes inconnus, de développer une profonde empathie pour des gens que nous n’aurions pas rencontrés autrement, de devenir plus que ce que nous étions avant.
FT : Que pouvez-vous nous dire à propos de votre prochain roman ?
JC : Le prochain roman à paraître au Royaume Uni est le dernier de la trilogie d’Imriel, Kushiel’s Mercy. Il a une intrigue merveilleusement retorse qui apporte un point final à l’ensemble de la série. Mon prochain roman à paraître aux USA est un changement total, à tel point qu’il devait à l’origine être publié sous un pseudonyme. Maintenant, cela a changé, et il va sortir sous mon nom. Son titre est Santa Olivia et je dirais que c’est une fable post-punk, se passant dans une ville en bordure de désert, avec de la boxe et de jolies filles amoureuses.
FT : Quels sont les cinq derniers sites Internet que vous ayez consultés ?
JC : Je suis un peu une accro à la politique, et nous sommes à la veille d’une élection présidentielle hautement significative aux USA, alors ce sont surtout des sites journalistiques et progressistes : The New York Times, Talking Points Memo, Daily Kos et Eschaton sont quatre sites que je visite tous les jours. Et pour un peu de plaisir coupable, j’ai un faible pour Television Without Pity.
FT : Avez-vous suivi des cours d’écriture ou des instructions spécifiques pour apprendre à écrire un roman ?
JC : J’ai suivi un cours d’écriture à la fac, qui se concentrait sur les nouvelles. A part ça, c’est largement de l’auto apprentissage.
FT : Comment avez-vous franchi les premières barrières de critiques et de rejets ?
JC : Simplement avec de la persévérance. Kushiel, tome 1 : La Marque, mon premier titre, n’était pas le premier roman que j’ai écrit ; c’était le premier à se vendre. A chaque rejet, je me motivais pour travailler plus dur, pour devenir un meilleur écrivain, pour prendre des risques et me lancer des défis. Cela m’a pris dix ans, mais cela en valait la peine.
FT : Quels sont les meilleurs et les pires aspects de l’écriture en tant que métier, à votre avis ?
JC : Le meilleur aspect est que je fais ce que j’aime pour vivre. C’est un grand luxe, et un que tous les écrivains ne sont pas assez chanceux pour connaître. J’adore écrire, j’adore avoir l’opportunité d’aller à la rencontre de mes fans, j’adore entendre comment les romans ont eu une influence sur leur vie. Le pire aspect est qu’il y a plus de pression pour produire, et qu’il est plus difficile de préserver cette sensation de pur bonheur dans le processus de création d’une fiction. Mais une fois que je suis lancée, je me débrouille !

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