Vous êtes ici : Page d'accueil > Fantasy > Romans Fantasy > La Guilde des Queues de chats


La Guilde des Queues de chats

Titre VO: The Dead Cat Tail Assassins

ISBN : 979-103600224-3
Catégorie : Aucune
Auteur/Autrice : P. Djèlí Clark (Proposer une Biographie)
Traduction : Montier, Mathilde

Eveen est morte. Ou plutôt morte-vivante.
Depuis qu’elle a été réanimée et qu’elle a rejoint la guilde des Queues de chats morts, elle sert la déesse Aeril, Matrone des assassins, en tant que tueuse à gages. Assassins dont le serment le plus important exige que tout contrat accepté soit honoré, sous peine de s’attirer les foudres divines. Alors voilà Eveen bien embarrassée lorsqu’elle doit éliminer une jeune fille… qui lui ressemble trait pour trait.
« Quoi ? murmura la fille.
— Tu es moi, dit Eveen, qui peinait toujours à y croire elle-même. Par les nibards de feu d’Aeril, je serais bien en peine de l’expliquer, mais… tu es moi ! »

Critique

Par Gillossen, le 15/05/2025

Avec La Guilde des Queues de chats morts, P. Djèlí Clark livre une novella nerveuse et ciselée. Si l’on connaît l’auteur pour ses textes mêlant politique, magie et identité (notamment Maître des djinns), il évolue cette fois dans un registre plus frontal, mais toujours imprégné de ses thématiques de prédilection.
L’action se déroule dans Tal Abisi, une cité-État entre Orient mythique, port africain et surtout jungle (parfois juridique…) peuplée de dieux. Loin d’un décor générique, la ville est dense, animée, crédible jusque dans ses ruelles poussiéreuses et ses temples décatis. On y suit Eveen, assassin ressuscitée et asservie à une divinité locale, désormais tenue par des vœux stricts.
Le coup de théâtre majeur d’entrée de jeu ? Sa prochaine cible est semble-t-il une version plus jeune d’elle-même, ce qui déclenche une remise en question de tout ce qui fait son identité, ou ce qu’il en reste. Ce jeu sur la mémoire, le destin et la déconstruction personnelle irrigue le récit d’un trouble profond qui dépasse la simple mécanique de la vengeance ou du complot divin.
Eveen est l’un des grands atouts du texte (même s’il faut accrocher à son ton particulier). Féroce, amère, souvent drôle, elle oscille entre cynisme assumé et doutes. P. Djèlí Clark parvient à nous faire ressentir l’usure d’une existence dictée par des règles sacrées, mais aussi l’attachement ambigu à la mission, car tuer est devenu pour Eveen une forme de certitude, presque un refuge. En miroir, “Azur”, sa version plus jeune apporte fraîcheur, colère et refus de l’ordre établi, dans une dynamique qui fonctionne aussi bien dans l’action que dans la réflexion.
Le format court a ses forces comme ses limites. Clark ne s’attarde pas forcément beaucoup, sur quoi que ce soit, ce qui donne au récit une vivacité bienvenue sur le plan “enquête”, rythmée par des dialogues tendus et des scènes d’action efficaces. Mais ce même format empêche parfois certains développements d’aller au bout de leur promesse. Quelques idées (sur la mémoire, sur les cultes urbains ou sur les hiérarchies divines) sont esquissées plus que vraiment exploitées.
Cela dit, le texte n’a pas vocation à bâtir une épopée. Il fonctionne comme une fable cruelle, presque une pièce de théâtre à deux personnages, dans un monde en arrière-plan que l’on devine complexe, mais dont on découvre seulement un aperçu. Et cela suffit, dans une large mesure, à faire exister cet univers.
La Guilde des Queues de chats morts est une réussite. Si l’on pourra regretter que certaines pistes ne soient qu’effleurées, c’est aussi ce qui fait la force du texte : une économie de moyens au service du propos.
Un court récit qui tranche, dans tous les sens du terme.

Discuter de La Guilde des Queues de chats sur le forum.



Dernières critiques

Derniers articles

Plus

Dernières interviews

Plus

Soutenez l'association

Le héros de la semaine

Retrouvez-nous aussi sur :