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Karen Miller et The Accidental Sorcerer

Par Luigi Brosse, le jeudi 5 mars 2009 à 17:00:00

Karen MillerNous vous proposions la critique il y a quelques mois de The Accidental Sorcerer de K.E. Mills (autrement dit Karen Miller). Ce premier tome d'une nouvelle série de fantasy humoristique fit partie de nos coups de cœur de fin d'année et nous espérons avec impatience sa traduction pour que les lecteurs franco-français s'en délectent.

En attendant cette bonne nouvelle, voici la traduction d'une interview de l'auteur à ce sujet. En espérant que cela vous permette de patienter !

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L'interview traduite

KE, bienvenu sur The Specusphere. KE Mills est le pseudonyme pour une auteure de renom internationale, en tête des best-sellers. Pourquoi avoir choisi d'écrire ce livre (cette série) sous un nouveau nom ?
Eh bien, en fait, c'est arrivé en analysant le style de cette nouvelle série ; j'ai réalisé que j'étais assez loin des livres que j'avais écrit jusque-là. En tant que Karen Miller, ma fantasy est plus épique et plus significativement historique. J'écris également sur un format bien défini : une duologie, ou une trilogie, ou encore un peu plus long. (Lorsque j'aurais terminé La Prophécie du Royaume de Lur, cette histoire courra sur 5 volumes, avec l'addition d'une suite en deux volumes et d'une préquelle.) Par ailleurs, le contexte historique de ce livre est plus moderne : plus proche de l'Angleterre Victorienne que d'une civilisation antique, ou de la période médiévale / Renaissance / Tudor avec laquelle j'aime jouer pour mes histoires épiques.
A l'opposé, la série de Rogue Agent est plus conçue comme une série policière : une sélection de personnages récurrents dans des aventures indépendantes. The Accidental Sorcerer est donc une histoire complète. Le prochain épisode de la série, Witches Inc. sera une aventure totalement nouvelle qui mettra en scène Geral, Reg, Mellisande et quelques autres. (rires) Il y aura des thèmes revenant régulièrement dans la série, mais les lecteurs auront une histoire complète dans chaque volume.
Enfin, le ton est assez différent dans ces livres. Ce n'est pas tout à fait une comédie, mais il y a parfois une certaine légèreté, venant des personnages et de leurs interactions. Ce qui ne veut pas dire que les événements sous-jacents ne sont pas sérieux, car ils le sont dans ce premier livre, ainsi que dans les suivants. Mais j'ai trouvé qu'un mélange d'humour et de drama était une manière rigolote de progresser :et c'était certainement ce que ces personnages demandaient.
The Accidental Sorcerer est le premier tome d'une trilogie. Il met en scène un monde merveilleusement bien construit. Cette construction a-t-elle demandé beaucoup de recherches ou bien s'est-elle développée pendant que vous écriviez ?
En fait, ce n'est pas une trilogie : j'ai juste vendu les trois premiers. Mon rêve est d'en faire une série se poursuivant au fil des épisodes, tout comme le Disque Monde s'est transformé au fil du temps en une série interconnectée. Et en ce qui concerne la construction du monde : merci ! (rires) Je voulais m'amuser avec un contexte social légèrement différent. Le genre de d'histoires que j'ai envie de raconter avec cette série demandait un BACKDROP plus moderne. Comme je l'ai déjà mentionné, ce n'est pas ouvertement contemporain, il y a toujours une touche ancestrale : mais cela permet des idées et des problématiques plus actuelles.
Généralement, je construis mes mondes en combinant des recherches spécifiques avec ce que je sais déjà, puisque je suis ce que l'on pourrait appeler une tête en Histoire : et ce depuis le lycée. Mais contrairement à d'autres écrivains, qui prennent de copieuses notes avant même de commencer à écrire, ma manière de faire est un peu plus organique. Il y a des trucs que dont j'ai déjà connaissance grâce à ma culture générale, d'autres dont je sais qu'il me faudra me documenter à leur propos avant de commencer et enfin des trucs pour lesquels je découvre qu'il me faut en savoir plus pendant que je suis en train d'écrire. C'est une drôle de tambouille mais jusqu'à présent cela a fonctionné pour moi.
Quelle a été votre inspiration pour écrire The Accidental Sorcerer ? Est-ce que vous vous êtes réveillé un matin en ayant décidé d'écrire quelque chose de nouveau, dans un style différent de votre ordinaire ? D'où vient l'idée initiale ? Une question du genre « Et si je... ? » ? Est-ce que vous avez développé l'intrigue ou les personnages d'abord, voire de manière simultanée ? Quel personnage vous parle le plus distinctement : Gerald ou Reg ? Et quand vous avez commencé l'histoire ?
En fait, ce fut très étrange. Il y a quelques années maintenant, je me suis assise dans mon lit un matin, parfaitement réveillée, et j'ai dit à haute voix : Je dois écrire une histoire à propos de Gerald et Reg, et comment sa vie est chamboulée lorsqu'il devient une nouvelle personne. (Je ne veux pas vous livrer la fin, na ! *sourire*).
La plupart de mes idées viennent d'un fragment de conversation ou d'une scène entre des personnages, je ne savais donc pas ce qui se passait. Et dès que j'ai eu le loisir de réfléchir à qui étaient Gerald et Reg, à l'instant où j'ai commencé à écrire, leurs voix sont arrivées. Je n'ai pas consciemment introduit l'humour et la légèreté ; Reg a juste commencé à parler de cette manière-là, acerbe et cynique et « je suis le chef ». Et puis bien sûr, Mellisande est apparue sur scène, les deux filles se sont rencontrées et les dés étaient jetés. Je me suis contenté de m'asseoir et d'écrire ce qu'elles me dictaient. Gerald est plus compliqué, je l'admets; parce qu'il est le gentil, et de bien des façons, c'est le plus normal de toute l'équipe. Un héros moral est toujours le sillon le plus difficile à creuser. Par conséquent, sa voix est un peu plus indéfinissable ; c'est le quidam classique de bien des manières. Reg, Mel, Lional et Monk sont tous « un peu plus vrai que nature ». Gerald est un peu plus atténué, j'ai donc dû travailler plus dur pour l'entendre.
L'intrigue et les personnages sont toujours intimement liés, chez moi. Les gens sont ce qu'ils disent et font. Ce qu'ils sont dicte les décisions qu'ils prennent, les actions qu'ils effectuent et par conséquent influence la direction de leur vie. C'est un drôle de mariage. J'ai toujours su comment mes histoires allaient se terminer ; mais comment mes personnages y arrivent est vraiment déterminé par leur personnalité. Et une grande partie de tout cela se déroule à un niveau subconscient, vraiment ; une fois que je connais les personnages, ce avec quoi je joue, on peut dire que tout se déroule et s'arrange par soi-même.
La couverture n'est pas tout à fait celle que l'on peut attendre pour un roman de fantasy. La couverture reflète l'histoire - le « vieil monde ». Est-ce que vous avez un pouvoir quelconque sur le design de la couverture ?
Voici le lien vers la couverture.
Je suis exceptionnellement chanceuse en ce qui concerne mes couvertures. Voyager m'autorise à émettre des commentaires et j'apprécie beaucoup. En ce qui concerne le look de la série, cette idée vient entièrement de la merveilleuse équipe de design et de production. Je n'y suis pour rien ! J'ai donné mon avis sur l'illustration actuelle, et ils m'ont demandé mon sentiment sur l'aspect « vieil monde » à un niveau général. Je pense que la différence de 'look'' reflète le fait qu'il ne s'agit pas de fantasy épique et historique, et c'est important. Ce que j'apprécie également est la façon dont ils se sont arrangés pour rendre compréhensible le fait qu'il s'agisse du premier tome d'une série - ce n'est pas toujours le cas avec les éditeurs, et je déteste quand ce n'est pas le cas. C'est une mauvaise idée de confondre les lecteurs !
Combien de temps vous a pris l'écriture de ce livre ?
Vous savez, je n'en suis plus vraiment sûre. Je pense que le premier jet m'a pris environ 8 mois, mais cela a nécessité plusieurs réécritures par la suite. En réalité, j'ai écrit The Accidental Sorcerer juste après la version originelle du Mage Innocent (quand il s'agissait encore d'un volume unique). Il a subi plusieurs réécritures, après des retours éditoriaux, mais je n'arrivais pas à l'écrire de la bonne façon. Je l'ai donc laissé de côté pour me focaliser sur La Prophécie du Royaume de Lur. Je les ai écrits, et j'ai commencé le projet suivant : la trilogie Godspeaker. Mais j'avais toujours dans un coin de ma tête, Gerald et Cie qui gazouillaient. Finalement, je suis revenu au manuscrit une dernière fois, et soudain j'ai vu comment faire pour que ça marche. Donc acte, et Voyagera accepté, parce que mon éditeur Stephanie Smith a toujours aimé les personnages autant que moi. Le processus a donc plutôt traîné en longueur, principalement parce que lorsque j'ai commencé à écrire l'histoire je n'étais pas suffisamment douée pour la mener à bout. J'aime penser que je me suis améliorée un peu ces dernières années. *sourire*
Combien de temps s'est-il écoulé entre votre première fois et votre première vente ?
J'ai toujours écrit des histoires, mais pendant très longtemps il s'agissait de fan fictions des histoires originales basées sur des mondes créés par d'autres. Cela m'a demandé beaucoup de temps pour avoir suffisamment confiance en moi pour me diriger vers la création de mes mondes et de mes personnages à moi. Mais j'ai appris un tas de choses utiles quand j'écrivais des fan fics, je ne le regretterai donc jamais. Mon premier roman vendu était une romance à destination des jeunes adultes chez Dolly, en 1990. J'en ai écrit trois au total, puis j'ai commencé la version originelle de La Prophécie du Royaume de Lur. Je l'ai vendu à Orbit en 203, et le premier livre fut publié en août 2005.
En fait, comme beaucoup beaucoup d'auteurs, j'ai un paquet d'années derrière moi à apprendre le métier avant d'avoir été suffisamment douée pour réaliser une vente. Et durant cette période j'avais mon propre négoce (une librairie) et j'ai suivi un master en littérature enfantine - ça m'a pris du temps. Mon travail m'a presque engloutie vivante pendant 6 ans.
Quelle est votre journée type ? Quand écrivez-vous et pendant combien de temps ? Est-ce que vous vous fixez un minimum à écrire chaque jour ?
Eh bien, cela tourne pas mal autour de l'écriture, surtout quand j'ai une date butoir. Et combien j'écris dépend aussi de ça. Je compte mes mots - je regarde pour quand je dois rendre mon manuscrit, le nombre de mots attendu, puis je calcule combien je dois écrire par jour pour atteindre mon objectif. Et voilà le nombre de mots que j'écris (généralement), qu'importe le temps qu'il faut. De manière générale, j'écris entre 4000 et 5000 mots par jour, et cela peut prendre entre 6 et 10 heures, suivant si cela coule ou non. Dès fois, j'ai l'impression de voler et dès fois, c'est comme courir à contre-courant. Habituellement, j'écris 6 jours par semaine, et je me repose le dimanche, à moins que la date limite se rapproche, auquel cas je fais feu de tout bois jusqu'à ce que ce soit terminé, sans faire de pause.
En ce moment (NdT : avril 2008), ma charge de travail est assez lourde - j'ai plusieurs projets sur le feu. Idéalement, j'aimerais pouvoir découper mes journées entre l'écriture et des recherches plus générales - espérons que j'y arriverais l'année prochaine !
Alors qu'une grande partie de The Accidental Sorcerer a un ton plutôt léger, il y a quand même des moments sinistres - en particulier les scènes de torture entre le gentil et le méchant. Qu'est-ce que vous préférerez écrire : le léger ou le sombre ?
De bien des manières, je trouve le sombre plus facile à écrire. C'est beaucoup plus concret, et il y a moins de place pour les erreurs. Les éléments de comédie m'effraient au plus haut point, vraiment, parce qu'ils sont beaucoup plus difficiles à capturer. J'apprécie les deux, pour différentes raisons. Quand ma plume cours facilement, je m'amuse énormément à écrire tout ce marivaudage entre les personnages. Et les choses sombres, hum... c'est aussi drôle de torturer votre héros. Ne me demandez pas pourquoi. *sourire* Les acteurs disent souvent pareil - ils aiment plonger leurs dents dans des scènes sombres, charnues et émotionnellement épuisantes. C'est pareil pour moi, en tant qu'écrivain. C'est tout à fait cathartique !
J'ai apprécié le point de vue « profond et indiscret » de cette histoire. Est-ce que cela a été dur pour vous d'utiliser ce style pour vos personnages (particulièrement Gerald et Reg) ? Est-ce que vous avez dû faire plusieurs jets et retravailler les points de vue ?
Je suis bien contente de l'entendre. *sourire* Pour être honnête, c'est la seule façon que je connais d'écrire. Tout ce que j'écris implique un point de vue à la troisième personne, au plus près des personnages et de leur expérience du monde. A nouveau, je conçois cela un peu comme du théâtre. J'ai joué un peu et à présent je dirige le théâtre local, et c'est tout à fait naturel pour moi de choisir le point de vue d'un personnage, et de « devenir » ce personnage pour la durée de la scène ou du chapitre. J'ai par contre tendance à m'opposer à ce que j'appelle la « narration évidente ». J'ai du mal à lire des livres écrits dans ce style. Je n'aime vraiment pas que l'on attire mon attention vers le narrateur (à l'exception de Terry Pratchett, qui est un narrateur assez évident, mais qui est si brillant que je ne peux que l'adorer. Mais il s'agit là pour moi de l'exception qui confirme la règle.) J'aime que mes expériences de lectures soient immersives, et il s'agit là de la technique la plus immersive que je connaisse.
Je n'ai jamais eu à revenir en arrière et à récrire des scènes dans cette optique-là. J'ai toujours eu les idées claires sur qui devait être le personnage sur lequel se focaliser pour chaque scène. J'ai parfois ajouté, ou supprimé, des scènes, mais le point de vue des personnages est resté constant.
Est-ce que vos deux prochains livres poursuivront avec les mêmes personnages, ou bien Gerald et Reg ne feront-ils que des apparitions fugaces ?
Absolument. Gerald et Reg occupent la scène, tout comme Melissande et Monk, ainsi que la soeur de Monk, Bibbie ... et un autre visage familier dont je vous laisse la surprise. *sourire* La série Rogue Agent est centrée sur Gerald, et les gens qui croisent son chemin.
Avez-vous des conseils pour les apprentis écrivains qui voudraient se lancer ?
Vous devez considérer ce jeu sur le long terme, pas sur l'immédiat. Écrire de la fiction de genre excitante qui se vendra non seulement auprès des éditeurs mais aussi du public est un million de fois plus difficile qu'il n'y paraît. La technique que cela suppose est énorme et il est impossible d'atteindre le standard nécessaire pour être publié en une seule nuit.
Écrire est un art, publier est un business. Trop de gens l'oublient. C'est aussi un pari, qui suppose d'avoir des paquets de chance. La seule chose qu'un écrivain peut contrôler dans ce jeu, c'est la qualité de son travail - tout doit être fait dans cette direction-là. C'est très facile d'être distrait. Posez vos fesses sur un siège, vos doigts sur un clavier et écrivez, écrivez et récrivez. Si votre écriture est bonne, le reste finira éventuellement, et probablement, par se mettre en place. Si votre écriture est mauvaise, qu'importe la quantité de blogage, de buzz et de réseau, cela ne vous aidera pas. Tout se ramène au travail, du début à la fin.
L'une des meilleures façons de progresser pour un néophyte est en recevant de nombreuses critiques de gens qui sont dans le métier. Pour qu'un écrivain soit couronné de succès, ils doivent comprendre les tenants et aboutissants de ce qui fait qu'un livre marche, ou pas. C'est très difficile d'apprendre cela avec sa propre écriture. Vous devez prendre de la distance. Passez du temps à lire, à analyser et à commenter le travail d'autres écrivains est une bonne façon d'apprendre les bases de l'écriture, et cela affûte l'oeil. Quand votre oeil est suffisamment entraîné pour différencier ce qui est bien écrit, vous verrez que votre écriture s'améliorera aussi.
L'Online Writers' Workshop est une ressource précieuse pour les écrivains débutants. Cela a débuté en tant que The Del Rey Online Writers' Workshop, et était maintenu par l'éditeur américain. J'y ai laissé des trucs à ses débuts, et j'ai participé à de nombreuses critiques, et j'ai vraiment beaucoup appris. A présent, des personnes indépendantes et merveilleuses s'en occupent, et il a permis de lancer un nombre impressionnant d'auteurs. C'est une communauté qui forme à l'écriture. Je ne peux pas la recommander suffisamment. Si vous en profitez au maximum, c'est l'équivalent d'un diplôme d'écriture sans les frais universitaires.
Et pour terminer ? Sauf quelques rares exceptions, il n'y a pas de formules magiques. Écrivez un bon livre. Faites tout ce qu'il faut, travaillez aussi dur que nécessaire aussi longtemps que nécessaire pour écrire ce livre. Oubliez tout le reste tant que le livre n'est pas écrit.
Y-a-t-il quelque chose que vous souhaitiez partager avec The Specusphere à votre propos, votre écriture, vos prochaines sorties ?
Eh bien, j'ai plusieurs trucs qui vont sortir, donc merci pour l'opportunité de les promouvoir ! En tant que Karen Miller, j'ai un nouveau roman de Stargate qui va sortir à la fin mai (NdT : 2008). Il s'intitule Do No Harm et s'appuiera fortement sur Janet Fraiser. Hammer of God le tome 3 de la trilogie Godspeaker sortira en juin en Australie. Le prochain roman de Rogue Agent est prévu pour janvier 2009. En 2009 également, je publierai la première partie de la suite de La Prophécie du royaume de Lur. Je suis donc très, très occupée... *sourire*
Miss Mills, merci beaucoup pour avoir visiter The Specusphere et d'avoir partagé votre monde avec nos lecteurs. Bonne chance pour The Accidental Sorcerer - et j'attends avec impatience les tomes 2 et 3 !

Interview originelle traduite par Luigi Brosse avec la permission des auteurs
"Fun, Feisty, Fantastic Fantasy - The Accidental Sorcerer" by Astrid Cooper translated from The Specusphere with permission


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