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Interview de Arnaud Mousnier-Lompré

Par dwalan, le mardi 2 février 2010 à 15:38:00

AML Lors des Utopiales 2008, j'avais eu l'occasion de discuter avec Arnaud Mousnier-Lompré, qui est entre autre traducteur de Robin Hobb... traducteur quasi-officiel, car elle le réclamerait à Pygmalion pour chacun de ses nouveaux romans !
Au fil des anecdotes qu'il racontait, j'ai trouvé intéressant d'interviewer un traducteur, à l'instar de ce que nous avions déjà fait avec Thierry Arson lors de la sortie d'Acacia. La parution d'un nouveau roman de Robin Hobb, Dragon Keeper, et donc la traduction d'une nouvelle œuvre pour Arnaud furent l'occasion de cette interview.

Ce que vous allez lire ci-dessous est le résultat d'un échange de courriels qui aura duré de nombreuses semaines, les vacances et la grippe s'étant invitées au cours de cette interview ! Merci donc à Arnaud d'avoir tenu bon, et à bientôt !

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Nos questions / ses réponses

Est-ce que tu peux te présenter et parler de ton parcours ?
Alors, allons-y gaiement. J'ai 49 ans, chiffre irrévocable jusqu'à mon prochain anniversaire, je suis marié, j'ai 3 enfants, 6 chats, un nombre indéterminé d'acariens et autre eucaryotes, et une presbytie galopante qui me permet de me trouver beau dans le miroir.
En ce qui concerne mon parcours, il a été assez chaotique, et je ne le recommanderais pas à ceux ou celles qui souhaitent devenir traducteurs ; j'ai une vague licence d'anglais d'une utilité discutable. J'ai eu la chance de faire la connaissance, en 1988, je crois, d'un traducteur devenu depuis un ami cher, George W. Barlow, qui m'a mis le pied à l'étrier en me faisant entrer chez Presses-Pocket, où j'ai fait mes armes. Ensuite, en 1995, j'ai pris mon courage à deux mains et mon téléphone dans la troisième pour appeler les éditions L'Atalante et leur proposer mes services, qui ont été acceptés et que je poursuis aujourd'hui pour mon plus grand bonheur. Enfin, en 97 ou 98, je ne sais plus, j'ai contacté Pygmalion, toujours pour la même raison, et on m'a confié la traduction de L'Assassin royal, là aussi pour mon plus grand bonheur. Et dix ans plus tard, ça continue. Si ça ne s'appelle pas avoir de la chance, je ne m'y connais pas...
Quelle est ta journée type, lorsque tu travailles sur un roman ?
Alors, ma journée type : lever vers 6-7 heures du matin, mise au boulot à 9 heures jusque vers 11.30 - midi, puis reprise à 14 heures jusque vers 16.30 - 17 heures. Passionnant, non ?
Tu te lèves si tôt pour quelle raison ? Tu es un matinal, ou alors il te faut un certain temps avant de t'immerger dans ton travail car il exige beaucoup de concentration ?
Alors, pour mes heures de réveil, ça tient simplement à ce que je suis un lève-tôt ; ma plus longue grasse matinée a dû s'achever vers 9 heures du matin. En outre, j'ai besoin de temps pour me réveiller avant de me mettre au boulot ; j'admire les pompiers et toubibs qu'on tire du lit en pleine nuit et qui sont en état de marche tout de suite. Avec moi, on ne compterait plus les victimes !
Tu es célèbre, dans l'univers de la littérature Fantasy, pour tes traductions, entre autres, de Robin Hobb : Comment as-tu découvert l'œuvre de cet auteur ? As-tu connu un véritable "coup de foudre" littéraire ?
Célèbre, moi ? Tu dois me confondre avec Brad Pitt :)
J'ai découvert l'œuvre de Robin alors que je cherchais du travail en plus en 97 ou 98. Je me suis adressé à J'ai-Lu, pour qui j'avais déjà travaillé, et on m'a dit qu'on n'avait rien pour le moment, mais qu'une boîte cherchait un traducteur pour un nouvel auteur : Pygmalion pour une certaine Robin Hobb. J'ai pris contact, on m'a envoyé le premier tome de L'Assassin royal, et je suis resté scié. Je n'avais jamais rien lu de pareil, d'aussi profond, d'aussi humain, d'aussi poignant et attachant. Bref, le coup de foudre. J'ai aussitôt fait des pieds et des mains pour que la série obtienne la publicité qu'elle méritait (ce qui ne me regardait pas du tout, en fait, je m'en rends compte à présent, mais bon), et... eh bien, tu connais la suite.
Tu m'avais expliqué que Robin Hobb elle-même te réclamait pour les traductions françaises : te sens-tu une responsabilité particulière d'être devenu son traducteur attitré ?
Oui, bien sûr, il ne s'agit pas de foirer les traductions - d'un autre côté, j'ai le même sentiment de responsabilité devant tous les bouquins que je traduis ; mais là, il se mêle un sentiment d'amitié qui renforce encore ma volonté de ne pas trop pourrir l'œuvre de Robin !
Parmi les différentes séries de Hobb, y en a-t-il une que tu mets au-dessus des autres ?
Ah, certainement L'Assassin royal ; parce que c'est le premier texte de Robin que j'ai traduit, et parce que c'est celui dont le héros m'a le plus pris aux tripes - et je ne crois pas être le seul dans ce cas !

(Petite pause en fin d'année, suivie de ce commentaire : Les "vacances" de Noël furent bienvenues, mais fatigantes ! Terminer Le Soldat chamane à fond les ballons parce que j'étais en retard, comme d'hab, et entamer sans souffler Dragon Keeper... Argh !)

As-tu senti une évolution chez elle au fil du temps, sur un plan stylistique, et/ou comment la retranscrire en français ?
Franchement, non. J'ai l'impression qu'elle écrit aujourd'hui comme il y a 10 ans, c'est-à-dire très bien, très clairement, avec un style posé, réfléchi, très agréable à lire et à traduire.
Désolé pour la brièveté des réponses, mais je ne vois pas quoi dire de plus...
Lorsque nous nous étions vus aux Utopiales 2008, tu avais évoqué tes efforts pour traduire des mots que Robin Hobb inventait. Pour donner un sens et une sonorité à tes traductions, tu faisais preuve de beaucoup d'imagination. Je me souviens de ta recherche pour obtenir le mot "marguet", qui désigne ces animaux proches d'un chat de combat dans L'Assassin royal. Tu avais également évoqué un fruit assez spécial (désolé je n'ai pas le nom en tête, et surtout je n'ai pas encore lu ce roman...) dans Le Soldat chamane. Est-ce que tu peux nous donner quelques explications ?
Bon, je vais essayer d'y répondre, mais le problème c'est que je ne me rappelle pas ce fruit dont tu parles (je ne relis jamais les bouquins que je traduis, j'ai trop peur d'être horrifié par la traduc !). En revanche, pour le "marguet", le terme anglais était "hunting cat", "chat de chasse" en français, pas très joli. Alors j'ai demandé d'abord à Robin comment elle imaginait le bestiau, puis j'ai cherché des noms de félins et je suis tombé sur "margay", petit félin d'Amérique du Sud ou des Caraïbes, je ne sais plus ; j'ai trouvé qu'en le francisant en "marguet", ça sonnait bien et j'ai gardé ce nom. De manière générale, je m'efforce de franciser les noms que Robin invente, qu'ils soient propres ou communs, en me fondant sur l'idée que le monde qu'elle décrit n'existe pas et qu'on n'y parle ni français, ni anglais, ni aucune de nos langues terriennes. En conséquence, quand elle parle par exemple du "colonel Haren", je tâche de rendre en français les harmoniques que ce nom évoque chez un lecteur anglophone; "hare" signifie "lièvre", d'où "Haren" = "Lièvrin".
Ce système n'a strictement rien d'un absolu, évidemment, et un autre traducteur aura une autre philosophie sur la chose. Mais c'est la mienne, et en plus je m'amuse bien à inventer ces équivalences !
Au moins en ce qui concerne ton actualité, Robin Hobb est un peu spéciale pour toi, non ? Mais par rapport à d'autres auteurs que tu as déjà traduits, où la placerais-tu ?
Naturellement, Robin est très spéciale pour moi ; outre un auteur exceptionnel, c'est une amie que je me réjouis de voir chaque fois qu'elle vient en France. Quant à son classement parmi les auteurs que j'ai traduits... ma foi, je la placerais dans un coin à part, ne serait-ce que parce que je la connais personnellement, ce qui n'est le cas d'aucun autre écrivain. J'ai pris grand plaisir à traduire des gens comme Philip José Farmer, Orson Scott Card ou Robert Silverberg, qui sont quand même des pointures, mais j'ai une relation beaucoup plus intime avec Robin - et honni soit qui mal y pense !
Quels sont tes projets pour les semaines, les mois, et les années à venir ?
Mes projets, en matière de traduction, se résument à bosser exclusivement sur Dragon Keeper pendant les 2 ans à venir, histoire de rattraper le retard que j'ai pris sur les publications de Robin. Cette nana a un débit de dingue, et j'ai du mal à suivre ! Après, on verra...
Question subsidiaire : tu peux nous donner la traduction française que tu as choisi pour Dragon Keeper et/ou Dragon Haven ? Et si tu ne peux pas, est-ce que tu peux au moins nous donner un petit scoop ?!
Je n'ai pas encore choisi de trad pour DK ni pour DH ; j'attendrai d'en avoir traduit davantage pour ça. En principe, DK sera découpé en deux tomes, idem, je pense, pour DH, et je rendrai le premier fin avril de cette année ; il devrait donc sortir peu après en librairie. Hormis ces quelques miettes, je n'ai pas de scoop sismique à te fournir, hélas...
Merci pour toutes ces réponses.

Interview réalisée par mails, par dwalan.


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