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“Coup de coeur” des Imaginales 2010 : Sire Cédric

Par Oceliwin, le mardi 27 avril 2010 à 16:33:55

Sire Cédric au salon du Livre de Paris 2010 Sire Cédric répond une nouvelle fois à nos questions à l'occasion du salon du Livre de Paris édition 2010 et de la sortie de De fièvre et de sang.
Et c'est quelques jours avant les Imaginales où vous pourrez le rencontrer en tant que Coup de cœur de l'équipe du festival. A l'occasion, il sera présent dans l'anthologie des Imaginales avec Magiciennes et Sorciers, à paraître chez Mnémos. Les premières questions sont centrées sur l'auteur, la suite contient plusieurs spoilers sur le dernier roman de Sire Cédric.

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L'interview

L’enfant des cimetières a été récompensé par le prix Masterton 2010, qui conclut une bonne année.
Une année extraordinaire, même !
Tu connais un succès immense au niveau du public. Encore hier, tu as eu 3 h 30 de dédicaces ininterrompues.
Je n’arrive pas à y croire, parfois ! (Rires.) En tout cas, c’est vraiment le plus beau des retours, de voir autant de personnes au rendez-vous. Quand j’écris, c’est pour divertir les lecteurs, pour leur offrir des histoires qui les sortiront de leur quotidien, qui leur feront oublier pendant une heure ou deux leur journée de boulot. Alors, quand j’arrive à ça, et quand ces lecteurs viennent, en personne, pour partager leur expérience de lecture avec moi, je suis aux anges !
Quelle importance tu accordes à la reconnaissance du public par rapport à celle d’un jury. Quels sentiments tu as pour chacune de ces récompenses ?
Le plaisir apporté au lecteur. C’est ça, le plus important. Ce n’est même pas de reconnaissance dont j’ai envie, mais que le livre fonctionne, que les gens passent un bon moment à le lire. Écriture et lecture sont indissociables, tu vois ? Quant aux prix littéraires, ils font toujours très plaisir, ce serait idiot de prétendre le contraire. C’est juste qu’ils ne sont que ça. La cerise sur le gâteau.
Dernièrement, le site Elbakin.net a réalisé différents articles autour de l’autopromotion. Est-ce que tu fais toi-même ta promotion, si oui comment ? Ou est-ce que tu laisses ceci à la seule charge de ton éditeur ?
Eh bien, je suis à l’instant en train de faire de la promo en répondant aux interviews ! (Rires.) Au-delà de ça, organiser de A à Z la promotion d’un produit est un métier à part entière. Je ne me considère pas assez doué, ni assez compétent, pour m’en charger moi-même. Je préfère passer ce temps-là à faire ce que je sais faire, c’est-à-dire écrire, et laisser mon éditeur faire son travail. C’est par exemple Le Pré aux Clercs qui a réalisé la vidéo virale qui circule en ce moment sur les blogs, et où on voit une jeune fille qui ne peut s’empêcher de pousser des cris de terreur à la lecture de De Fièvre et de Sang. C’est drôle, décalé, ça ne se prend pas au sérieux et donc forcément j’adore ! De mon côté, j’ai mon propre site web, bien sûr, ainsi qu’une page Facebook. Comme tout le monde, en somme ! Je ne sais pas si cela se classe dans l’autopromo, en tout cas ces espaces sont très pratiques pour annoncer le fil de mon actualité, et pour ne pas perdre le contact avec les lecteurs, aussi.
Le Pré aux clercs a réédité Dreamworld en fin d’année, une application est sortie sur iPhone, L’enfant des cimetières est rentré dans le catalogue France Loisirs. Comment tu suis ces changements ?
En fait, il s’agit du circuit classique du livre: il y a d’abord l’édition en grand format, parfois des reprises en édition club de type France Loisirs, et ensuite la version poche, chez Pocket en ce qui me concerne. En outre, avec le développement des nouveaux médias, qui n’en est qu’au tout début, il y a déjà de nouvelles façons de proposer les livres. C’est le cas de l’application iPhone pour Dreamworld, ou bien de L’enfant des cimetières qui sera disponible en version audio, aux éditions VDB, en juin prochain. Chaque livre sort également en format numérique. Bref, toutes ces exploitations font partie de la vie normale du livre, à mes yeux. Mais je t’avoue que c’est l’éditeur qui supervise tout ça, c’est son rôle. Mon travail à moi, c’est uniquement écrire !
De fièvre et de sang est sorti la semaine dernière au Pré aux clercs, dans la ligné de L’enfant des cimetières, tu t’inspires d’une légende : la comtesse sanglante.
Ce n’est pas qu’une légende ! La comtesse Erzsébet Bathory a vraiment existé. Le mythe, c’est essentiellement les 650 victimes qu’on lui attribue. La réalité est plus proche des 350 jeunes filles, ce qui est déjà énorme bien sûr, et cela fait d’elle la plus grande meurtrière en série de l’histoire. Forcément, cela attise les fantasmes. J’ai toujours eu envie d’utiliser ce personnage dans une histoire. Ce roman a été l’occasion de me faire plaisir.
Et pourquoi avoir choisi ce personnage ?
Oh, parce qu’elle incarne tout ce qu’il y a, au fond de nous, de désirs refoulés, de choses un peu tordues, de peurs primaires aussi ! Et puis, avant tout, parce que j’avais envie d’écrire un livre vampirique, et que la comtesse Bathory est la figure vampirique par excellence. C’est elle qui a inspiré l’image du vampire moderne quel qu’on se l’imagine, depuis Carmilla et en passant par Dracula. Pour moi, elle avait sa place dans le roman avant même la première ligne écrite. En outre, De fièvre et de sang a été l’occasion de relier tous mes thèmes vampiriques préférés, au-delà de l’héritage de Bathory et de Vlad Tepes. Au final, on y trouve les rites daces, comme l’empalement, le folklore des loups, la magie des miroirs, le sacrifice des âmes, la quête de la vie éternelle, le vieillissement accéléré… autant d’éléments qui me tenaient à cœur et qui ont trouvé leur place naturelle dans le récit.
C’est quelque chose que tu connaissais depuis longtemps. Est-ce que tu te renseignes quand même auparavant ? Ou tu laisses faire ton imagination avec ce que tu sais déjà ou tu approfondis le sujet ?
J’ai effectué quelques recherches, bien sûr. Comme je connaissais la plupart des choses dont j’avais envie de parler, ces recherches ont, au début, consisté à m’assurer que mes sources étaient correctes. Mais elles m’ont aussi permis de découvrir des aspects du folklore européen que j’ignorais totalement. Un ami, particulièrement érudit, m’a apporté une aide précieuse sur les rites daces, et m’a fait découvrir le dieu Zalmoxis, que je ne connaissais que de nom, alors que cette divinité est essentielle à l’histoire européenne ! Ensuite, je me suis permis de broder sur les mythes et de me laisser porter par mon histoire, d’aller jusqu’au bout de mon délire, comme je le dis toujours. C’est un récit de fiction, il ne faut pas l’oublier ! (Rires.)
Ton précédent livre nous plongeait dans une angoisse perpétuelle, avec un sentiment de malaise constant. Dans celui-ci, de mon avis, on perd un peu de cette angoisse, par contre tu as beaucoup développé l’aspect policier et enquête. Est-ce que c’était une volonté dans ton écriture ou ça c’est fait naturellement ?
C’est arrivé sans préméditation. Quand je commence à écrire, je suis surtout à la poursuite d’une envie, de quelque chose qui dépasse et dont j’ai envie de m’approcher. Pour De fièvre et de sang, tout est parti d’Eva Svärta. C’est une flic albinos qui travaille pour la brigade criminelle. Elle apparaissait pour la première fois dans une nouvelle de type « pulp », que j’avais écrite pour un magazine, deux ans auparavant. On peut dire que ce personnage était resté en moi, coincé quelque part, se développant tout doucement. Eva voulait que je raconte son histoire, à tout prix. Et c’est ce qui s’est passé: elle est devenue le personnage central du roman. Je me suis lancé dans une écriture nerveuse, assez violente. Je me suis éloigné du style poétique et travaillé de L’enfant des cimetières, pour me laisser emporter par un rythme frénétique, un découpage rapide, comme un torrent, comme une course contre la montre, me servant d’émotions très brutes. C’est sorti comme ça. C’est pour ça que c’est une histoire de flic: parce que c’est l’histoire d’Eva. Il m’a semblé naturel de faire revenir Vauvert, aussi. Il y avait trop de choses à dire sur lui que je n’avais pas pu écrire dans le roman précédent. D’ailleurs, il me reste encore beaucoup à révéler sur lui, sur son passé. Il reviendra forcément !
Il revient en mars prochain ?
Il est un peu trop tôt pour en parler… (Rires.) Une chose est sûre: Vauvert a encore des aventures improbables à traverser pour comprendre qui il est vraiment…
Dans ce livre, tu as deux fils rouges, d’un côté la comtesse sanglante, et de l’autre, l’histoire d’Eva qui mène une « psychanalyse » à travers ses rêves vers la vérité. C’était une volonté de mener ces deux fils rouges en parallèle ?
Eva est un personnage complexe et torturé. Ses problèmes sont très proches de ceux de Vauvert, mais elle les exprime de manière radicalement opposée. J’avais envie de montrer ce qu’elle dissimulait, sous sa carapace. Quel était ce passé d’Eva, ces choses traumatisantes qu’elle a traversées, et qui la perturbent toujours autant aujourd’hui. Comme c’est un personnage profondément maniaque, qui refoule ses souvenirs, il fallait que les fantômes de son enfance ressurgissent contre sa volonté, et malgré tous les efforts qu’elle déploie pour oublier ces blessures. Il fallait qu’elle soit affaiblie, par la force des choses, pour ouvrir son esprit. Le parallèle entre le passé et la situation présente s’est donc mis en place au fil des pages, de manière naturelle. Le sang du présent et le sang du passé, le monstre du présent et le monstre du passé…
Et c’est ce qui a donné le titre De fièvre et de sang ? La fièvre pour Eva, et le sang pour la comtesse ?
Exactement. Le sang pour l’image vampirique. La fièvre pour la frénésie…
Tu es vocaliste du groupe Angelizer. Dans ce roman, tu nous parles d’un policier, flic, misogyne, lourdaud et en plus qui écoute Johnny Hallyday…
Ah, oui… (Rires.) La sonnerie du mobile de Deveraux, c’est « Allumer le feu ». Je trouvais que ça collait au personnage ! Et la sonnerie du mobile du jeune flic, Leroy, c’est le morceau « Master of Puppets » du groupe Metallica. Je trouvais que ça illustrait bien les deux personnages.
Tu as quelque chose contre Johnny ? (Sourire.)
Bien sûr que non. Ni contre lui, ni contre ses fans. C’était un trait d’humour bon enfant, je t’assure… (Sourire.)
Tu as deux passions qui sont l’écriture et la musique. Est-ce que tu fais un lien entre ces deux passions ? Est-ce que tu essayes d’hypnotiser ton public à travers tes livres, comme on peut l’être pris dans un concert ?
Le lien est évident, ce sont deux médias artistiques, deux manières de s’exprimer, de faire partager des émotions. Le travail est le même dans le sens où il faut que l’œuvre fonctionne, nous emporte, qu’on le veuille ou pas. Mais ce sont aussi deux formes d’expression très différentes dans leur construction. Quand j’écris, je dois raconter une histoire complexe, c’est le verbe qui prime, la narration, la logique et le sens. Tandis que la musique est quelque chose de plus primal, de litanique et d’incantatoire. Les paroles de chansons, c’est de la poésie. Ce n’est donc pas le sens descriptif qui importe, mais la couleur, les syllabes, les émotions, le rythme. Surtout dans le métal, où on manipule de l’énergie pure !
Merci, et je te souhaite beaucoup de succès pour ce deuxième livre.
Merci à toi !

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