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Aujourd’hui en salles : Dracula Untold

Par Gillossen, le mercredi 1 octobre 2014 à 09:45:09

Décors et costumes

François Audouy nous confie : «Je suis attiré par les films qui nous mettent au défi d’imaginer des univers alternatifs, qu’ils soient fantastiques, étrangers ou historiques, dans lesquels il est possible de s’immerger, et qui continuent à exister après qu’on ait fini d’y raconter notre histoire.» Travaillant étroitement avec Gary Shore et Ngila Dickson, François Audouy a créé un monde qui reflète l’évolution du personnage principal, de chef respecté et père de famille aimant à un guerrier vampire sans pitié. Il se souvient : «Quand j’ai lu le scénario, l’histoire de cette famille et la relation entre Vlad, Mirena et Ingeras m’ont frappé. Leurs rapports sont forts et rares dans un film sur Dracula. Je souhaitais renforcer cette ligne narrative et établir une base pour l’histoire d’amour entre ces trois personnages, créer un monde qui témoigne de l’encrage de Vlad auprès de sa famille et de son peuple.»

En Roumanie, il existe deux forteresses qui prétendent avoir appartenu à Dracula : le château de Bran et la citadelle de Poenari. Ce sont d’énormes et imposantes constructions situées sur de hauts rochers, ce qui leur confère une position défensive et en fait des refuges naturels contre les envahisseurs. Toutes deux érigées au 13e siècle, elles servirent de point de départ à l’élaboration des décors du film. Mais le film laisse place à la fiction et le chef décorateur explique : «Gary souhaitait s’écarter de la réalité pour le château de Dracula, et y inclure un élément exotique. Nous nous sommes donc éloignés du style orthodoxe pour aller vers quelque chose de plus oriental, avec des formes triangulaires et des angles plus marqués. Tout paraissait un peu étrange et inusuel au début, jusqu’à devenir réaliste et plausible. À la fin du processus de création, le château semblait réellement avoir existé.»

L’élaboration du château de Dracula débuta avec celle de la salle royale, et si la majorité de l’édifice est en images de synthèse, celle-ci fut entièrement construite pour les besoins du tournage, avec un souci minutieux du détail, jusque dans les reliefs des mûrs, recréés à partir de ceux trouvés dans une église roumaine, et la finition des surfaces, peintes pour donner une impression de poussière, répandue dans les constructions en granite de ces énormes bâtiments médiévaux. Pour ses décors, François Audouy a travaillé avec quatre motifs différents, visibles en partie dans la salle royale. Il explique : «Pour le style architectural lié à Vlad, nous avons utilisé beaucoup de triangles et de formes symétriques. Si l’on regarde les détails de la salle royale, on y voit beaucoup de formes qui rappellent des crocs ou des canines. On retrouve ces formes dans la silhouette même du château et à son sommet. On a joué avec des triangles et des pointes en tous genres.» En y regardant de plus près, le grand hall sans toit et les motifs qui y figurent donnent une idée du sinistre passé de Vlad et prédisent un avenir encore plus sombre. «Le vrai Vlad III avait une cour ouverte dans laquelle se dressaient deux douzaines de pieux sur lesquels il empalait ses ennemis. Il dînait au milieu de ce tableau macabre et, selon de vieilles légendes, buvait même le sang qui s’écoulait des corps», raconte encore le chef décorateur. Même si les spectateurs ne saisiront par forcément ces références à la figure historique de Vlad, il était important pour le réalisateur de rendre compte, même en filigrane, de ces terrifiantes histoires : «Les décors sont le produit des personnages et de l’histoire. La salle royale est conçue autour de la notion d’empalement et rappelle la cour du vrai Vlad III. Les motifs pointus font écho à des images sinistres sans avoir à être ouvertement gore.» Ces motifs tiennent également une place prépondérante dans le deuxième plus important décor construit pour le film : la caverne du Maître Vampire dans le pic de la Dent Brisée où la légende de Dracula voit le jour et la vie de mortel du prince Vlad s’achève.

Un film d’époque demande une étroite collaboration entre les différents départements visuels, et François Audouy nous confie à propos de la chef décoratrice récompensée aux Oscars, Ngila Dickson : «On se connaît depuis des années, ce qui nous a permis de nous mettre immédiatement au travail. Ngila a débuté en amont et ses modèles ont été une importante source d’inspiration.» Réciproquement, celle-ci déclare : «Je recevais ces plans du département artistique, comme ceux de l’intérieur du château, et nous couvrions ensemble les lieux pour accorder nos palettes chromatiques. Ce fut le cas pour les costumes de banquet qui devaient être en accord avec les décors pour éviter tout heurt visuel.»

Ngila Dickson a, entre autres, créé les costumes de la trilogie du Seigneur Des Anneaux (Peter Jackson, 2001-03) et Gary Shore se félicite de sa participation : «Elle a apporté à notre film une élégance toute personnelle.» Différents éléments ont attiré la chef costumière sur ce projet, dont son appréciation du Dracula de Francis Ford Coppola (1992) et l’opportunité de revisiter l’univers initialement créé par Bram Stoker. «Gary et moi sommes fans du film de Coppola. C’est un modèle de création cinématographique. Pour une styliste, c’est une incroyable chance de pouvoir réinventer et développer un univers si riche», déclare Ngila Dickson. En discutant avec le réalisateur, l’élément historique s’avéra déterminant. La costumière et son équipe firent des recherches concernant les styles, les couleurs et les étoffes courants à l’époque de l’Empire ottoman et en Valachie au 15e siècle. Elle explique son processus de travail : «Une fois qu’on a rassemblé cette vaste somme d’informations, on commence à chercher un angle d’approche pour le film, et un point important pour nous était de ne pas l’assombrir. On s’est orientés vers beaucoup de couleurs et de richesse. Ayant appréhendé ce que les gens portaient à l’époque, on a commencé à chercher des gammes de couleurs et à voir ce que l’on pourrait apporter de nouveau et d’original.» Chaque costume raconte une histoire, apporte des informations sur ceux qui le portent. Quand on découvre Vlad dans le jardin du château, son costume évoque une personne heureuse qui a fait la paix avec son passé, mais vers le milieu du film, on retrouve rapidement Vlad l’Empaleur, le véritable guerrier, jusqu’à ce qu’il embrasse totalement son sort.

Ngila Dickson a d’abord travaillé sur les costumes de la fin du film. Elle explique : «Je devais d’abord maîtriser la partie la plus complexe du film pour l’envisager ensuite dans son ensemble. Je m’attelle toujours à ce qu’il y a de plus difficile en premier.» Pour réaliser l’armure de Vlad, la chef costumière se tourna vers l’année 1452 et utilisa les rouges et les noirs de la véritable cuirasse du prince, qu’elle combina au motif de dragon que l’équipe des décors avait créé. Son armure représentant la période de sa vie qu’il a passée chez les Turcs, elle devait se marier avec celle de Mehmet afin de rendre compte du lien qui les unit. «Je concevais ces deux personnages un peu comme le yin et le yang. L’armure de Mehmet est immaculée, lustrée et parfaitement sculptée. Celle de Vlad est plus brute, mate et burinée», remarque la créatrice.

Le réalisateur reconnaît que le travail de la costumière influença largement son appréhension de l’histoire : «Vlad et Mehmet ne se rencontrent que deux fois dans le film : une première fois dans la tente du sultan quand Vlad essaie de lui faire entendre raison, puis à la fin, quand Vlad part en guerre contre lui. Leur relation est au cœur du film même s’ils ne se rencontrent que brièvement, un peu à l’image d’une partie d’échecs, le risque étant que cette relation paraisse épisodique. Il est donc important de rappeler visuellement leur connexion. C’est l’idée qui a servi de base aux créations de Ngila, et que l’on retrouve également dans la musique et les tonalités sonores.» Avec le pillage de Constantinople, Mehmet II a fait de l’état ottoman un empire. La costumière déclare : «En termes de trésors et de richesses, l’Empire ottoman est une mine et on s’en est donnés à cœur joie. Mehmet porte un plastron qui le représente lui-même sur son cheval, en pleine bataille, et dans son dos figure Constantinople. Son armure rappelle ses prouesses et ajoute une couche d’arrogance supplémentaire à son personnage.» L’univers dans lequel évoluent Vlad et Mehmet est essentiellement masculin. Seule Mirena apporte une touche de féminité dans le film et la chef costumière s’attarda longuement sur son personnage : «Elle est la seule femme. Elle représente la seule enclave de féminité dans le film. C’était donc un véritable défi stylistique.» En lisant le scénario, elle imagina des couleurs douces et pâles pour Mirena mais, après avoir discuté avec son interprète Sarah Gadon, elle rectifia son point de vue. «On est passés à des couleurs fortes, bibliques», se souvient-elle. À la jeune actrice de préciser : «Mirena est une princesse. On ne voulait pas qu’elle soit simplement confinée à une tour du château. On voulait qu’elle participe activement à l’histoire. Durant les répétitions, on a travaillé sur son rôle actif, son implication. C’est un mélange équilibré de féminité et de prise de positions et d’initiatives.»

  1. Synopsis
  2. Le Maître des mort-vivants : Dracula
  3. A la recherche du prince
  4. Décors et costumes
  5. Des légions de chauves-souris

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