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Greg Keyes nous présente Les Royaumes d’Epines et d’Os

Par Luigi Brosse, le mardi 23 mars 2004 à 20:13:46

Greg Keyes est arrivé sur la scène fantasy avec The Waterborn. Publié sous le nom de J. Gregory Keyes, ce fut d'abord avec les deux livres de Chosen of the Changeling rapidement suivis par le volume de conclusion, The Blackgod.
Greg a continé avec la saga Age of Unreason, très acclamée et très vendue. Le quatrième et dernier volume, The Shadows of God a été publié en octobre dernier dans un format grand public par Del Rey books. Greg a aussi contribué à l'univers de Babylon 5 ainsi qu'à Star Wars : la saga du nouvel Ordre Jedi.
Le Roi de Bruyère, son travail le plus puissant, ambitieux et peut-être le plus personnel est sorti en janvier. C'est le premier tome d'une série en quatre volumes, Les Royaumes d'Epines et d'Os, et il raconte l'histoire d'un royaume au bord du bouleversement. Nous vous proposons aujourd'hui la traduction d'une interview pour vous permettre de découvrir cette œuvre !

L'interview traduite

Rob Bedford : Le Roi de Bruyère commence de manière explosive au milieu d'une bataille et d'une tempête, qui accroche tout de suite le lecteur, à la fois visuellement et viscéralement. Quelle importance cela avait-il, et à quel point cela a-t-il été difficile de décider de cette scène d'ouverture ?
Greg Keyes : (Rires) Cela a été très discuté, quand j'ai écrit le livre il commençait avec Aspar dans la taverne. J'ai fini le livre, je l'ai regardé et j'en ai discuté avec Steve Saffell, mon éditeur. Nous pensions tous les deux qu'il fallait quelque chose d'un peu plus puissant qui ancre le reste de l'histoire plus fermement à cette époque passée et pose l'idée qu'il y avait quelque chose de mauvais qui pouvait rattraper tout le monde. Donc, j'y ai beaucoup pensé, et je n'ai pas ajouté ce chapitre avant un bon moment. Il est intéressant de savoir qu'après l'avoir ajouté toutes les réactions ont été positives, certains des fans de mes autres livres l'ont lu ainsi que le chapitre avec les filles et ont dit être content que j'ai ajouté ce second chapitre parce que le premier ne me ressemblait pas. Comme des écrivains différents réunit ce qui rendait les gens nerveux. Mais à la fin, je pensais encore que c'était un bon moyen de commencer le livre.
Je pense que c'est très efficace, la bataille du début pose le ton pour toute la série et la scène avec les deux filles pose le ton du livre.
Merci, c'est ce que j'espérais.
Ce roman a un sentiment épique, depuis le franchissement du temps dans l'ouverture du prologue jusqu'au temps "présent" d'Everon, il y a beaucoup de choses qui se passent. Quelle quantité de planification, recherches/lectures, et de grandes lignes faites-vous avant de construire l'histoire ?
J'en fais pas mal. Premièrement, j'ai vendu ce livre à partir d'une esquisse avec les grandes lignes. J'ai plus vendu l'idée du livre que le livre lui-même. Pour ce faire, les grandes lignes doivent être très détaillées et convaincantes, donc j'avais tracé les grandes lignes des quatre livres. Mais le plus drôle est que... quand je trace une ligne directrice, je la suis rarement de très près, j'essaye de me concentrer vraiment quand j'écris, pas quand je lis. Dans le projet original, le rôle d'Aspar était assez mineur, on le voyait au tout début, il voyait Le Roi de Bruyère, voyait quelques événements négatifs arriver et ne faisait pratiquement rien de plus que ça. Winna n'existait pas du tout, beaucoup de personnages secondaires que j'ai fini par beaucoup aimer n'y étaient pas. Certaines lignes de l'histoire n'y étaient pas non plus. Vous savez, je trace les grandes lignes très minutieusement, mais après, je me sens libre de ne pas les suivre si je pense à quelque chose de mieux pendant que j'écris.
En terme de recherches, j'ai lu constemment en écrivant ces livres. J'ai lu tout ce qui me tombait dans les mains, ou que j'avais le temps de lire. De la mythologie européenne pour la plupart, des livres comme The Fairy Queen de Spenser, Shakespeare et ce genre de choses, la plupart juste pour l'inspiration ou des idées sur lesquelles travailler.
J'aime vraiment Aspar, il correspond parfaitement au type du gars dur à l'extérieur et plus doux à l'intérieur, mais avec beaucoup des autres personnages vous avez vraiment innové.
Je pense que c'est la seule manière de faire si vous travaillez dans un genre aussi établi que la Fantasy, c'est un genre que j'aime, j'ai grandi avec et j'ai beaucoup d'affection pour lui, c'est pourquoi je voulais y participer. J'espérais pouvoir y apporter quelque chose de neuf.
Est-ce que vous avez parcouru le web pour chercher des infos SF, vous avez regardé Locusmag.com ?
J'y étais inscris à une époque, mais je n'ai pas renouvellé mon inscription, je regarde une fois de temps à autres pour voir ce qui se passe. Je ne vais pas beaucoup sur Internet pour voir ce qui se passe dans le genre parce que je n'ai pas le temps. Je vais à des conventions et ce genre de choses. Professionnellement, j'aime penser que je sais ce qui se passe, mais c'est un domaine tellement vaste et il s'y passe tant de choses, que c'est impossible. Je ne passe vraiment pas beaucoup de temps sur Internet parce que ça me prend du temps sur l'écriture. Si je vais sur Internet, c'est juste pour trouver la réponse à une question rapide que je peux y trouver plutôt que d'aller à la librairie ou de commander un livre. La plupart du temps, j'envoie des mails.
Oui, ça peut vraiment dévorer votre temps. Vous avez cité Michael Moorcock comme un écrivain qui vous a influencé. Il est associé à la Nouvelle Vague qui rafraîchit le genre et le réinvente. Les fans de SF sur Internet, et les critiques comme Gabe Chouinard ont placé votre travail au même niveau que celui d'écrivains tels Matthew Stover, John Marco et China Mieville comme une partie de la Prochaine Vague, faisant ce que Moorcock et ceux de la Nouvelle Vague ont fait. Connaissez-vous ces auteurs?
Certains d'entre eux, oui, mais je ne suis pas sûr de connaître ce critique en particulier, même si j'ai déjà lu quelque chose où Stover disait que lui et moi "lancions des pierres sur les tours de verre" ou quelque chose comme ça. Je pense qu'il faisait référence à mes premières séries, The Age of Unreason. J'ai lu quelques-uns de ces auteurs et je suis d'accord. Même s'il manque une étape je pense entre la Prochaine Vague et ce qui se passe maintenant, il y avait ce mouvement dans les années 80 avec ce déferlement de femmes écrivains qui mettaient les personnages en évidence, par opposition avec l'intrigue ou la magie. Ce n'est pas tout, mais je pense qu'il y avait pas mal de ça dans les années 80 et c'était une étape importante dans l'évolution du genre. Au moins pour moi parce que je prête sans doute plus d'attention au personnage, enfin j'aime à penser que je le fais, que des écrivains des années 60 ou 40 qui étaient plus intéressés par...
Les grandes idées...
...les grandes idées de l'intrigue. Légèrement en dehors de la Fantasy, j'admire beaucoup Asimov, mais ces personnages intéressants ne sont pas importants. Son intrigue et ses idées sont assez bien mis en commun pour que vous soyez intéressés de toute manière. Je parlais récemment avec mon éditeur français qui a relu les livres de Fondation il y a peu de temps, il a réalisé qu'il y avait seulement une ou deux conversations. La plupart de ses livres étaient justes des conversations entre deux ou trois personnes. On ne le réalise pas parce qu'on a l'impression que plein de choses se passent, de grandes batailles ou autres. En fait, ce sont juste quelques personnes en train de parler, ce qui est très intéressant quand j'y repense.
Je crois vraiment que le genre a besoin d'être renouvelé, particulièrement tous les 10 ou 15 ans. Le principal concerne l'attention qui est portée sur des choses très basiques...comment est-ce que les gens agissent vraiment, quel pourrait être une nouvelle manière d'aborder une situation ou une narration.
Il me semble qu'il y a beaucoup d'écrivains sur les listes des best-sellers qui n'apportent pas cet air de nouveauté que vous et ces autres auteurs avez mentionné. Ce n'est pas terrible...
Manifestement, des gens aiment ça, donc ça a sa place, une grosse place en fait. J'aimerai faire quelque chose d'un peu nouveau, personnellement.
Il y a une place pour ça. Si cela amène les gens devant les rayons de fantasy et qu'au lieu de ne s'intéresser qu'aux best-sellers ils prennent vos livres, à ce moment là, c'est bien.
En fait, je n'ai jamais vraiment...les écrivains sont des gens sensibles, généralement...et égocentriques. Il y a beaucoup de sentiments froissés, de jalousie et de mots durs entre les écrivains. Je n'ai jamais regretté ou envié le succés de Jordan ou de Terry Brooks. Ils ont amené la médiatisation de la Fantasy à des niveaux inédits, quoi qu'on en pense, ils ont ouvert le marché. Je ne peux pas penser à ça en mal.
En termes de médiatisation, je pense que ça va ouvrir les portes à de nouveaux auteurs.
Nombre d'entre nous n'auraient pas percé s'il n'y avait pas eu ces gars.
L'une des choses qui m'a beaucoup impressionné dans Le Roi de Bruyère est la manière dont vous avez réussi à nous livrer de nombreuses informations sur le monde à travers les personnages. Cela vient très naturellement, plutôt que par gros dépôts d'informations qui durent des pages comme chez certains auteurs. Comment avez-vous franchi cette ligne et décidé quoi laisser en dehors de l'histoire et quoi révéler ? Est-ce que les éditeurs sont intervenus ?
Quand j'ai essayé de percé sur le marché il y a des années, j'écrivais des nouvelles. J'essayais de commencer en donnant quelques infos pour dire au lecteur comment était le monde et puis après on entrait dans l'histoire. Je ne peux pas me rappeler du nom des éditeurs parce que cela fait longtemps, mais ils m'ont dit qu'on ne peut pas commencer une histoire avec une dissertation, il faut commencer avec quelque chose d'intéressant. C'est peut-être intéressant pour vous. L'une des choses sur lesquelles j'ai travaillé, quand j'ai réalisé que ces éditeurs savaient de quoi ils parlaient, a été de trouver des moyens intéressants de délivrer l'information au lecteur. J'ai surtout eu a le faire pour The Age of Unreason, parce qu'il y a beaucoup d'infos sur le 18ème siècle. Il y a beaucoup de choses que j'ai étudié sur le 18ème siècle qui ne m'ont pas servi à la fin. Harry Turtledove parle du "syndrôme-j'ai-fait-mes-recherches-maintenant-vous-allez-payer-pour-ça". Il ne faut jamais laisser ça entraver l'histoire. Donc j'ai trouvé, d'abord, plus intéressant et plus convaincant d'introduire des faits à travers la conversation et l'action plutôt qu'avec une dissertation. Je pense que c'est un meilleur moyen de le faire, c'est plus attirant. Si les personnages évoluent dans ce monde, alors ils ont un rôle dans celui-ci. Aucun d'entre eux ne sait tout ou ne voit tout. C'est une des raisons pour lesquelles j'aime utiliser plusieurs personnages. Les personnages ont un certain point de vue, ils remarquent certaines choses et pas d'autres. Si Aspar regarde le monde, Neil et Winna aussi, s'ils le regardent tous puis révèlent quelque chose à son sujet, alors le lecteur commence à tout assembler par lui-même. C'est pourquoi j'aime avoir tant de caméras différentes braquées sur l'action.
Je pense que ça rend les choses plus crédibles. Les personnages vivent dans le monde et ils doivent y croire si on veut que les lecteurs eux-mêmes y croient.
Dans Les Royaumes d'Epines et d'Os et The Age of Unreason vous décrivez un univers fantasy du début de l'époque coloniales Américaine ou la colonie Roanoke dans Le Roi de Bruyère. Pour The Age of Unreason vous avez dû faire beaucoup de recherches, on a l'impression qu'il y a des choses qui nous sont familières mais il y a bien plus en fait. Est-ce que l'envie d'écrire à propos de cette époque vous est venue en premier ou y a-t-il eu d'autres idées ?
Age of Unreason ? Au début j'avais une petite idée. Quand j'ai décidé de placer l'histoire au début du 18ème siècle, et que j'ai commencé à faire les recherches, avec plus ou moins de succès, j'ai découvert une période incroyablement riche que pratiquement personne n'avait encore abordé. Etrangement, Vonda McIntyre a écrit un livre à peu près à la même période, Louis XIV, The Sun and The Moon.
Est-ce qu'elle n'a pas gagné le Nebula ?
Si, c'était un livre excellent et je pouvais vraiment l'apprécier puisque j'avais fait les même recherches qu'elle. Nous vivions tous les deux à Seattle donc nous en avons plusieurs fois discuté. Il était impossible que nous ne sachions pas que nous travaillions tous deux sur un roman fin 17ème, début 18ème siècle. Je n'ai pas choisi cette période pour être différent, je l'ai choisie parce que cela devait se placer à une époque entre la science et d'autres moyens de connaître le monde. Et pour ce qui est d'utiliser mon roman pour amener les gens à s'intéresser au 18ème siècle, ça ne m'était même pas venu à l'esprit. C'était inévitable, il n'y avait pas d'autre moyen de faire. Je suis devenu fasciné par cette période. Je suis sûr qu'il y a des informations que j'ai donné gratuitement, juste parce que je pensais que les gens devaient savoir ça. Mais pour la plupart, j'ai essayé de garder l'histoire en vue. Vous pouvez sûrement lire Le Roi de Bruyère et ne jamais réaliser que ces gens descendent des colons de Roanoke. Ce sont comme des oeufs de Pâques pour l'histoire et le langage mais vous n'avez pas besoin de les avoir pour comprendre ce qui se passe. C'est juste quelques bonus pour ceux qui savent de quoi il s'agit.
J'ai du mal à croire à la Fantasy qui est complètement détachée de notre monde. J'ai déjà dit que s'il y a des noms chrétiens dans un monde Fantasy où il n'y a jamais eu de Christ ça me parait vraiment étrange. Dans ce cas, c'est comme des gens dans un monde qui n'a rien à voir avec l'Irlande et qui ont des noms Irlandais.
Oui, et qui parlent avec l'accent ou autre.
Finalement, tout les gens du monde du Roi de Bruyère viennent de là à un moment ou à un autre, les colons de Roanoke sont juste les derniers arrivants. Mais encore une fois, pour comprendre l'histoire, vous n'avez pas à le savoir, c'est juste pour moi.
Est-ce qu'on va apprendre un jour comment ces gens ont été amené ici, ou est-ce que l'un d'entre eux va revenir dans notre monde, ou est-ce que ce sera plus tard dans l'histoire des Royaumes d'Epines et d'Os ?
Si cela arrive, ça sera dans longtemps. J'ai beaucoup à faire dans le prochain livre sans revenir dans le passé. Je reviendrais sans doute à ces questions un jour, parce qu'il y a des choses que les gens assez intéressés...à un moment je devrais sans doute le faire. C'est marrant que les gens qui ont lu le livre et qui veulent savoir des choses sur ces périodes, aiment aussi le règne du Black Jester et tout ça, je pense que c'est l'un des dangers de créer un monde.
Avec The Age of Unreason, avez-vous pensé revenir au monde que vous avez créé (puis pratiquement détruit) avec des romans supplémentaires, une série ou des nouvelles?
J'ai fait une nouvelle qui a été publiée dans Amazing il y a quelque temps entre les deux premiers livres. Aujourd'hui, je n'ai pas de projet particulier pour revenir à ce monde parce que les Royaumes d'Epines et d'Os vont me tenir occupé pour quelques années. Je travaille aussi sur un autre livre de Star Wars.
Est-ce que c'est The New Jedi Order ?
Oui, l'avant-dernier livre, je suis aussi assez occupé à écrire des nouvelles pour Star Wars Insider.
A propos de New Jedi Order, on dirait que les lecteurs de SF restent fidèles à la fiction originelle. La manière dont Lucasfilms & Del Rey font appel à des écrivains différents éveille mon intérêt, et je pense que ça marche pas mal. Comment marche la collaboration ? Est-ce que vous parlez avec les autres auteurs ?
Oh oui...Nous collaborons beaucoup. Même tracer les grandes lignes est très complexe. J'ai juste commencé ce livre et les grandes lignes ont été approuvées il y a à peine un mois et demi.
C'est le dernier livre de la série ?
Avant dernier, James Luceno écrit le dernier. Je dois m'accorder avec lui, je dois m'accorder avec les deux écrivains avant moi et avec chaque livre qui n'a pas encore été publié. Nous sommes trois ou quatre en ce moment à essayer de finaliser nos grandes lignes ou nos manuscripts définitifs et nous devons tous nous parler parce que nous utilisons les mêmes personnages. Par exemple, le livre avant le mien est en train d'être retravaillé. Il y a des gens intéressants qui travaillent pour New Jedi Order, Greg Bear écrit l'une des préquelles.
Il faut que je vous demande, avez-vous pu rencontrer George Lucas, parler avec lui ou est-il au ranch ?
Oui, il est au ranch. Quelques auteurs y sont allés, mais seulement ceux qui travaillent plus souvent dessus, je suis juste l'un de ceux qui arrive, écrit un ou deux livres et repart. Pourtant, je dois déterminer des choses sur le Yuuzhan Vong, mais je n'ai pas été au ranch.
Il fallait que je vous le demande.
(Rires) Non, non, nous n'y allons pas tous, mais ça serait cool.
Avec Star Wars, il y a beaucoup d'histoire inventée, avec The Age of Unreason vous avez du beaucoup bricoler avec l'histoire. A quelle point votre approche est-elle différente d'avec quelque chose comme Babylon 5 ou Star Wars: The New Jedi Order comparé à votre fiction originelle ?
Il y a bien sûr une différence. A un certain niveau, avec Star Wars...avec Babylon 5, j'étais beaucoup plus libre. J'avais un boulevard jusqu'à Babylonia, j'ai rencontré Stracynzski et je l'ai regardé filmer un épisode. Il n'y avait pas autant de livres, et ceux avant moi n'étaient pas considérés comme des canons par Stracynzski. Tout ce que j'ai eu à faire comme recherches pour ces livres a été de regarder toute la série, ce que je faisais déjà, et fournir une brève esquisse. J'ai eu beaucoup de contrôle sur la création.
Dans Star Wars, j'en ai eu plus que je pensais. Par exemple, avant mon livre, on n'avait jamais vraiment vu les castes Yuuzhan Vong à part avec un guerrier ou lieutenant, donc j'ai du créer l'endroit et la classe des Shaper, les sous-classes, c'était très marrant. Très marrant. La plus grosse différence entre Star Wars et The Age of Unreason est que, dans The Age of Unreason, les gens auxquels je me sentais redevables, les gens qui regardaient par-dessus mon épaule pour voir si je faisais tout correctement, étaient quelques individus, pour la plupart, des professeurs qui savaient "Pierre le Grand n'a jamais fait ça" alors qu'avec Star Wars j'avais les fans fanatiques qui savaient absolument tout...ils savaient de quelle couleur étaient les sabres lasers, ils se rappelaient ce que Mara Jade avait dit il y a six livres de ça. Il y a aussi les personnages adorés avec lesquels il ne faut pas faire n'importe quoi sinon les gens vous détestent.
Oui, je suis sûr que R.A. Salvatore a eu des problèmes pour avoir fait tomber Chewie même si ça n'était pas sa décision.
Oh oui, ça n'était pas que la décision de Bob. Je crois que c'est Troy qui tue Anakin dans le livre après que j'en ai fait un gars sympa. Cette décision n'a pas vraiment été prise par Troy ou Bob. Je pense que je comprends pourquoi les gens nous en veulent pour Chewie et le reste.
Vous avez peut-être remarqué que dans Le Roi de Bruyère il y a un haut taux d'usure après l'introduction des premiers personnages. Ca vient du fait que je pense que si je ne vous fait pas comprendre tout de suite que quelqu'un va mourir, vous ne me croirez jamais.
Oui, tout le monde sera ressuscité à la fin...
Où est le suspens si vous savez que les personnages principaux, Han, Leia, ne peuvent jamais être tués.
A moins que le Boss dans le Ranch le décide.
(Rires) Oui (Rires)
Avec votre succès dans le genre (Locus Bestseller, le Grand Prix de l'Imaginaire pour Newton's Cannon) est-ce que votre approche de l'écriture a changé ?
Cette récompense a été une surprise, c'est une récompense française, l'équivalent du Nebula.
Wow.
Dans le sens où il est décerné par des écrivains et des éditeurs. Mon livre a gagné dans la catégorie Meilleur livre étranger. Ils ont appelé et m'ont demandé si j'acceptais de prendre l'avion pour venir retirer mon prix. Ca n'était pas longtemps après le 11 septembre, mais ils pensaient que nous ne voudrions pas prendre l'avion. J'ai dit Non, envoyez-moi le billet et j'arrive. C'était très intéressant, une convention très très intéressante parce qu'elle ne ressemblait à aucune des convetions américaines auxquelles je suis allé. C'était très très sérieux à propos de la SF et de la Fantasy. Il n'y avait pas de Hello Kitties qui couraient partout.
Pas de soirée costumée ou autre ?
Ce n'était pas vraiment pour les fans, bien qu'il y en ait eu beaucoup. Ils étaient présents pour avoir de profondes discussions sur "A quoi sert la SF ?", "A quoi sert la Fantasy ?".
J'ai été à des tables rondes dans lesquelles, outre le fait que nous parlions dans 3 ou 4 langues avec des interprètes, les gens prenaient le sujet très au sérieux. Je vais à des conventions aux Etats-Unis qui sont très marrantes, j'essaye de m'amuser autant que tout le monde à la DragonCon, mais le niveau de discussion (en France) à propos de la SF et de la Fantasy est quelque chose à quoi je ne suis pas habitué, c'était très marrant. C'était aussi amusant d'avoir des perspectives très différentes. Il y a tous ces écrivains de toute l'Europe et d'Asie dans ce cas. Ce sont des gens qui sont...vous êtes un écrivain de SF Polonais, c'est évident que vous ne faites pas ça pour l'argent. Il y a une vraie ferveur que je ne vois pas souvent ici.
Ca n'a pas l'air commercial là-bas.
Non, ça ne l'est vraiment pas. Evidemment, tous les écrivains essayent de vendre leur travail. Mais c'est pour qu'il soit lu, pas pour gagner beaucoup d'argent, parce que franchement, ce n'est pas leur cas. Je connais les chiffres de mes ventes à l'étranger et je ne pourrais pas en vivre. C'était trés intéressant, j'ai passé un très bon moment.
Est-ce que Le Roi de Bruyère va être publié en Angleterre, ou est-ce que les gens vont devoir passer par amazon.com pour avoir l'édition US ?
Nous venons juste d'arriver à un arrangement avec la nouvelle collection de Pan Macmillan. Je pense que c'est juste là-bas et en Allemagne.
Est-ce que The Age of Unreason est sorti en Angleterre ?
Non. L'Angleterre ne voulait pas acheter le livre.
Quelle honte, ils sont peut-être encore un peu susceptibles à propos de la guerre d'Indépendance ?
(Rires) Non. (Rires) Mes deux premiers livres se sont vendus en Angleterre chez Orbit.
La manière dont vous dites que les gens à la convention française prenaient le genre à coeur, me fait penser que j'ai l'impression qu'ils considèrent ça comme un genre très sérieux en Angleterre.
Je comprends ce que vous voulez dire, je pense que vous avez raison. Ici, c'est considéré comme un divertissement léger, ou pas pris au sérieux du tout. Mike Stackpole et moi parlions de ce phénomène, nous parlions de ces cours de littérature où l'on parle de SF, il disait que nous nous battions tous pour savoir qui allait être le premier à entrer dans les canons de la littérature. C'est une paraphrase...c'est là que certains d'entre nous se sont fait un nom, en étant enseigné dans les collèges ou Yale.
Il semble que ça arrive souvent. Quand j'ai fait mes études de littérature, il y avait une option de littérature SF avec des livres comme Dune, Frankenstein, des visionnages de Blade Runner, etc.
J'ai un diplôme d'anthropologie donc je ne sais pas vraiment ce qui se passe dans les études littéraires. Je sais qu'il y a des préjugés à ce propos. Je sais aussi qu'il y a des préjugés chez les lecteurs qui trouvent ça bizarre et ne veulent pas en entendre parler.
C'est vrai.
Le problème avec ça est aussi le déchet de données. En SF et en Fantasy, on doit passer tellement de temps à expliquer notre monde aux gens, qu'on ne passe pas assez de temps à faire des choses classiques comme les gens reconnus dans le monde littéraire.
La littérature avec un grand "L".
Oui. On n'a pas autant de temps à passer sur le développement des personnages ou autres, parce qu'on essaye d'expliquer le monde et ses idées. Je pense que ce qui est entré dans les canons sont les dystopies, Un Monde Idéal. On va vers ces allégories dystopiques. Mais si j'écris un roman dans le présent sur notre monde et que je dis Il conduit une Buick bleue, c'est à peu près tout ce que j'ai à vous dire sur le sujet pour que vous vous représentiez la scène. Mais si je commence à décrire un futur lointain avec un appareil qui évolue dans l'espace, je dois tout expliquer...expliquez exactement ce qu'est une Buick bleue...expliquez la combustion du moteur etc.
De l'info déchet.
Exactement, quand vous passez beaucoup de temps à faire ça, honnêtement les écrivains traditionnels de SF et de Fantasy n'ont pas été concerné par ce qui se passe dans la Littérature avec une grand "L". Je pense que ça change, ça a changé. Comme vous le savez, il y a des écrivains qui peuvent écrire aussi bien que...
Comme Gene Wolfe...
Oh oui... Gene Wolfe est le genre de personne que je citerai.
  1. L'interview traduite
  2. La suite de l'interview

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