Librairie Légendarium, Arras - Pierre Debarbieux

Alors que 2024 est derrière nous, quel serait votre premier bilan de cette année en Imaginaire dans votre librairie ?

On constate toujours une petite hausse des ventes et de la fréquentation, plus légère évidemment que l'an dernier. Si l'on demeure vigilant et prudent au vue d'un contexte toujours plus difficile, on note toutefois que la clientèle reste présente et que les littérature de l'Imaginaire attire des profils de lecteur/ices toujours aussi variés.
Les ventes de romans et surtout en grands format n'ont pas faibli et l'on peut compter dans nos meilleurs ventes des titres comme La Faim des Dieux de John Gwynne, certains coup de cœur comme le petit dernier de Fabien Cerutti Kosigan : Un printemps de sang et la duologie Emblèmes d'Ina Selm, l'excellente la Cité des Lames de Robert Jackson Bennett. On a pu constater également une belle progression sur les ventes du côté de nos rayons jeunesse et petite enfance, ainsi que de réels coups de cœurs pour La Folle et incroyable Aventure du Chevalier Léon, Le Chevalier Chouette et sa suite, pour la série Salicornia de Fabien Clavel ou encore pour D'écailles et d'Obscurité de Gaëlle Maumont.

Un évènement d'actualité dans l'édition vous a-t-il marqué ou surpris cette année ?

On est sur une forme de continuité de ce que l'on évoquait déjà l'année précédente, comme une situation économique fragile et préoccupante pour les librairies indépendantes qui s'accentue avec l'inflation ou la surproduction à en faire crouler les étagères. On en vient à faire des choix toujours plus drastiques dans la sélection. Il est de plus en plus difficile de s'y retrouver dans des programmes de sorties aussi conséquents pour les lecteur/ices, et de concilier avec une recherche de qualité plutôt que de quantité et éthique que l'on souhaite conserver.
Ce n'est pas étranger avec le rouleau compresseur de la romantasy qui, comme la bit lit en son temps, représente tout de même au pifomètre un peu plus d'un quart des nouvelles sorties de nos offices en imaginaire désormais. N'étant pas friand du genre, je ne serais pas des plus objectif et je pense que tout n'est sans doute pas à jeter ; mais je déplore toujours qu'une telle masse aux qualités variables fait disparaître et rende invisible une diversité littéraire aussi riche aux profits des tendances et du marketing.
Enfin, on ne peut oublier d'évoquer la disparition des Moutons Électriques, un acteur majeur des cultures de l'Imaginaire dans l'Hexagone qui nous aura fait découvrir de superbe plumes comme Jaworski, Platteau, Faye, et tant d'autres. Je ne m'attarderai pas sur le dernier communiqué de la maison d'édition et ce tacle envers les libraires qui aura sans doute déjà été commenté par mes confroeurs mais je terminerai simplement par un merci pour ce fantastique travail que nous avons pourtant eu plaisir à défendre.

Les lectrices et lecteurs sont-ils toujours aussi friands de conseils ou vous semblent-ils de plus en plus guidés par les grandes tendances (venues des éditeurs, des réseaux...) ?

Je dirais que cela dépend surtout du type de lecteur/ices ou de public, mais il est toujours rassurant de voir que la clientèle est toujours au rendez-vous pour explorer avec nous la nouvelle cuvée de cette année 2025.
Sur les différents retours que nous avons pu glaner de vive voix ou sur les réseaux sociaux, c'est ce que la grande majorité d'entre eux/elles semblent rechercher. Il est bon de se féliciter de maintenir ce lien privilégiés avec les lecteur/ices et de ce qui selon moi fait la force d'une librairie de quartier par ce contact humain et direct qui transforme un commerce en lieu de vie et d'échange que ne fera jamais un simple algorithme. Qu'il soit vieux de vielle ou nouveaux/elles venu(e)s, leur retours sur leur dernières lectures et leurs discussion (souvent passionnés) sur les littérature de Genre, d'hier comme d'aujourd'hui, sont des moment que je chéris particulièrement.
Une part du public et de nouveaux visiteurs/euses nous vient effectivement des tendances générées sur booktok ou bookstagram. Elle n'est certes pas à négliger mais il est toutefois à noter que nos meilleures ventes demeurent encore sur les conseils et coups de cœur de la librairie.

Enfin, qu'attendez-vous de cette année 2025, en tant que libraire ?

Acquérir un don d'ubiquité pour enfin faire fondre une liste d'ouvrages bien trop grande et que j'ai grand hâte de découvrir, comme Aatea d'Anouck Faure par exemple. Et autant dire qu'il y aura du pain sur la planche avec les anniversaires des éditions Critic et du Diable Vauvert, sans compter celle des 30 ans des éditions Mnémos qui promet de belles (re)découvertes dans de superbes écrins. Je commence de ce pas avec leur dernière sortie : Le Golem de Pierre de Claire Krust, ainsi que la nouvelle trilogie de Salome Han Les Sabres Sacrés chez Albin Michel qui est tout récemment arrivé dans nos étagères (de quoi patienter avant le dernier tome des Cités Divines !)

Propos recueillis et mis en forme par Emmanuel Chastellière.

Pages de l'article

1. Librairie Martelle, Amiens - Nelly Duquesne
2. Librairie Critic, Rennes - Etienne Vincent
3. Fnac Paris Saint-Lazare - Christophe Brocard
4. Librairie Légendarium, Arras - Pierre Debarbieux
5. Librairie Kléber, Strasbourg - Mathilde Bouchot
6. Librairie Quai des brumes, Strasbourg – Sandy Bizzozero