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Une interview avec Tom Lloyd
Par Deedlit, le dimanche 18 janvier 2009 à 22:55:35
Avec sa série The Twilight Reign, Tom Lloyd a déjà acquis une certaine notoriété en Grande-Bretagne.
Alors que The Grave Thief, le troisième tome de la série, vient de paraître chez nos voisins d'outre-Manche, le premier tome n'est disponible aux États-Unis que depuis octobre 2008. L'occasion pour nous de revenir sur la récente interview qu'il donnait à Pat, dans laquelle il évoque son actualité, son travail d'écrivain ainsi que son regard sur la Fantasy.
L'interview traduite
- Sans rien révéler, pouvez-vous nous donner une idée de l'histoire de The Stormcaller ?
-
Bien sûr. Au coeur de Stormcaller, il y a l'histoire d'un changement dans l'équilibre du pouvoir à un niveau mondial. Pour différentes raisons, celui qui va mettre en oeuvre ce changement est un jeune homme du nom d'Isak. Il se lance dans une grande aventure et doit se battre pour survivre. Les plans mis en place depuis des siècles vont bientôt porter leurs fruits et Isak est sur le point de découvrir que tout va se jouer autour de lui.
En termes d'intrigue, chacune des Sept Tribus de l'Homme est dirigée par des yeux-blancs, qui sont de costauds guerriers au mauvais caractère, mais bénis des dieux. Isak passe d'une situation de pauvreté au rôle d'héritier d'une des tribus les plus puissantes et se rend vite compte que cet événement est loin d'être le plus terrifiant ou le plus extraordinaire qu'il va connaître.
- Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur vous ? Qu'y a-t-il à savoir à propos de Tom Lloyd ?
-
Je suis un Britannique qui a passé le plus clair de sa vie à rêvasser, donc il n'y avait en fait qu'un emploi pour lequel j'étais fait ! Je travaille dans l'édition, et j'ai récemment négocié des contrats avec un éditeur indépendant à Londres. Je viens juste de passer à temps partiel pour pouvoir écrire mon prochain livre un peu plus rapidement.
- Pouvez-vous nous expliquer ce qui a fait passer ce manuscrit au statut de roman terminé ?
-
Je peux vous dire que ce fut un sacré long parcours ! Quand j'étais à l'université, j'ai passé le plus clair de mon temps à écrire ce qui allait devenir Stormcaller, puis j'ai travaillé chez un éditeur pour mieux comprendre cet univers et améliorer mon manuscrit pour en faire quelque chose qui vaille la peine d'être lu. Pour être honnête, les premières versions étaient mauvaises, voire vraiment nulles, mais après quelques années j'ai commencé à avoir une idée plus précise de l'histoire et à la mettre en forme jusqu'au jour où Jo Fletcher a pu la corriger, et me déprimer encore un peu davantage… Je ne suis pas écrivain par nature comme certains le sont, donc j'ai dû tout apprendre sur le tas : faire des essais et donc beaucoup d'erreurs pour forcer mon esprit à comprendre comment agencer les phrases dans un texte.
- Que doivent attendre vos lecteurs des suites The Twilight Herald (déjà paru au Royaume-Uni) et The Grave Thief qui doit bientôt sortir ? Avez-vous une idée des dates de parution de The Twilight Herald aux États-Unis et de The Grave Thief en Grande-Bretagne ?
-
The Twilight Herald montre à quel niveau l'histoire se passe. J'ai toujours voulu écrire une histoire avec une intrigue qui soit à la fois longue et complexe, où l'on ne distinguerait pas toujours facilement les gentils des méchants, mais on ne peut pas tout mettre dans le premier tome. Stormcaller présente l'univers dans lequel l'histoire se déroule et introduit certains événements mais ce n'est que dans Twilight que l'on peut vraiment comprendre dans quelle direction certaines intrigues vont aller. Grave Thief poursuit ce qui a été commencé dans les deux premiers tomes. Isak apprend à utiliser les pouvoirs qu'il a reçus et contre-attaque avant d'être débordé par les événements.
En ce qui concerne les dates de sortie, on m'a dit que Twilight Herald paraîtrait au printemps 2009 aux États-Unis et Grave Thief six ou sept mois plus tard. Au Royaume-Uni Grave Thief sort fin décembre, c'est-à-dire au même moment que Ragged Man.
- Avez-vous prévu de venir promouvoir The Stormcaller aux États-Unis cet automne ? Si oui, y-a-t-il des dates dont vous voudriez avertir vos fans et lecteurs potentiels ?
-
J'ai bien peur de ne pas pouvoir y aller, mais si quelqu'un désire en parler à Pyr et leur expliquer combien ce serait une bonne chose de m'avoir aux États-Unis lorsque Twilight Herald sortira là-bas dans six mois, cela m'aiderait beaucoup dans ma tentative pour les convaincre. Je ne suis encore jamais allé aux États-Unis de ma vie et il est grand temps que j'y aille.
- Quel fut l'élément qui vous a donné l'idée d'écrire Stormcaller et le reste de la série ?
-
Il y en a eu plusieurs en fait. D'abord j'en avais marre de voir le cliché, surtout dans les films, du héros chétif qui triomphe toujours sur l'affreux méchant. Et puis un de mes amis a jeté un roman de Fantasy en disant qu'il était nul et qu'il pouvait faire mieux. Après quoi je me suis dit que s'il en était capable, alors moi aussi.
Mais ça ne m'a pas donné une série pour autant. Une fois les idées principales en place, je me suis laissé aller pour voir ce que ça donnait. J'ai une Licence de Relations Internationales donc je savais que je voulais qu'il y ait différentes factions en jeu, qui comploteraient les unes contre les autres. Lorsque qu'on a une idée, plus on l'enrichit, plus elle se développe toute seule.
- D'après vous, qu'est-ce qui fait votre force en tant qu'écrivain ?
-
D'après mes éditeurs et mes lecteurs, c'est d'abord le fait que je parvienne à captiver le lecteur en écrivant des passages vraiment intenses. En effet, beaucoup de lecteurs se sont plaints d'avoir manqué leur arrêt de train ou bien de s'être couchés trop tard parce qu'ils étaient trop pris par la lecture. Deuxièmement, je pense que c'est la complexité de mes histoires, qui en a rebuté certains, mais que d'autres, au contraire, adorent car c'est la complexité qui donne à l'arrière-plan la densité qu'il faut. Aucun conflit n'existe indépendamment des autres forces en jeu, si bien que si vous ne les prenez pas en compte, votre livre manque de la richesse que le lecteur recherche et l'histoire ne sonne pas juste.
- Et que diriez-vous de vos faiblesses, ou qu'est-ce que vous désireriez améliorer ?
-
Je dirais la complexité de mes histoires en priorité. Bien sûr je connais les histoires mieux que quiconque et mon éditeur n'arrête pas de me rappeler que je ne peux pas sauter d'étapes entre les scènes, par exemple en mentionnant plus d'une dizaine de personnages en pensant que les lecteurs vont se souvenir du rôle exact de chacun d'eux. Nous avons intégré des récapitulatifs dans les deux derniers tomes pour éviter toute confusion. En effet, il y a des lecteurs qui ont décroché de la série car ils avaient du mal à suivre, donc il faut que je fasse attention et que je réfléchisse mieux à la façon dont j'organise les choses.
- Y avait-il des conventions propres au genre Fantasy que vous vouliez modifier lorsque vous avez commencé à écrire la série Stormcaller ?
-
D'abord je pense qu'on peut dire que je n'ai jamais voulu subvertir ce genre, il y a des gens comme Joe Abercrombie qui l'ont fait et l'ont très bien fait mais je n'ai jamais prétendu vouloir en faire autant. Il y a deux choses qui me frustraient dans la littérature de Fantasy et je ne voulais pas qu'elles soient présentes dans mes histoires. Premièrement, le fait que le héros acquière son statut lentement au cours de l'histoire, et deuxièmement le fait que la différence de force entre le héros et le méchant soit toujours immense, mais que le héros parvienne toujours à le vaincre et à sauver le monde, bien qu'il ait été martyrisé pendant des heures avant cela.
Je voulais qu'Isak se retrouve avec des pouvoirs qu'il ne comprendrait pas et maîtriserait à peine, pour le forcer à développer l'éthique et la retenue que de tels pouvoirs exigent. Ce n'est pas un jeune paysan courageux, mais un quasi-sociopathe ultra-musclé. Quand les choses tournent mal et qu'il a causé le chaos et la douleur chez les autres, il doit vivre avec ce poids.
- Qu'il y ait un site consacré à votre travail (http://www.tomlloyd.co.uk) nous montre bien que l'interaction avec vos fans est importante pour l'auteur que vous êtes. En quoi est-ce une chance de pouvoir communiquer directement avec vos fans ?
-
Sur ce marché, il est important d'un point de vue commercial de parler avec vos fans, alors que pour moi, écrire est un exercice solitaire. Cette interaction permet de connaître les réactions que suscite votre travail, et cela apporte une dimension nouvelle au plaisir d'écrire. C'est amusant de rédiger un livre, cela va de soi, mais travailler dur et ensuite voir que les lecteurs apprécient, c'est encore mieux. Cela me rappelle que j'écris ces livres pour les autres, et pas seulement pour ma satisfaction personnelle. Je me dois de garder ça à l'esprit pour qu'ils restent bons ! En fin de compte, mes fans aiment les mêmes choses que moi, et discuter avec eux n'est jamais une corvée !
- Si vous aviez le choix, préféreriez-vous qu'un de vos livres soit nommé best-seller par le New York Times ou bien qu'il reçoive un « World Fantasy Award » ou un « Hugo Award » ? Et pourquoi exactement ?
-
Mmm, ce n'est pas une question facile, mais je pencherais plutôt pour le best-seller. Je ne suis pas vraiment fan de ce genre de choses (mais je fais partie de cette industrie et je sais à quel point ça fonctionne) et plus j'écris, moins j'aurai de temps pour penser à cela ! Admettons que j'obtienne un best-seller, alors la réputation du livre augmente et plus de gens le lisent. Il faut faire confiance à ses propres capacités, et si l'on décroche ces prix, alors c'est merveilleux. Mais les récompenses dans le domaine de la Fantasy dépendent de ceux qui aiment lire ces livres de toute façon. Plus mes ventes sont importantes, plus les gens entendent parler de mes livres et c'est tout ce que je souhaite. Je veux que les gens aiment ce que je fais, je n'ai pas la prétention de marquer le monde de la littérature. Je veux juste que mes lecteurs prennent du bon temps.
- Quels auteurs admirez-vous particulièrement ? Beaucoup d'auteurs de fictions ne lisent pas beaucoup d'oeuvres de ce genre. Est-ce votre cas ?
-
J'en lis. J'écris ce que j'aime lire, c'est aussi simple que ça. Vous ne pouvez pas lire qu'un seul genre pour le plaisir, un écrivain qui n'aime pas les livres en général ne réussira pas. Quant aux auteurs que j'admire, Steven Erikson est un géant de la Fantasy et une référence que je tente de suivre, tandis que pour ce qui est de la façon d'écrire, j'adore le style épuré d'écrivains comme Le Carré et Greene, mais aussi M. R. James dont j'adore les histoires.
- Les illustrations de couverture sont un sujet brûlant ces derniers temps. Quel est votre avis concernant cet aspect du livre, et que pensez-vous des couvertures qui illustrent vos romans ? Êtes-vous satisfait de la couverture que Todd Lockwood a créée pour la version de The Stormcaller aux éditions Pyr ?
-
Je pense que c'est crucial, surtout pour un auteur qui débute. J'adore les illustrations de couverture et c'est un aspect essentiel pour moi. Je trouve qu'en Angleterre nous avons les plus belles couvertures du monde, il y a beaucoup de choses très novatrices qui sont créées ici, notamment parce que les budgets sont si serrés que les gens doivent impérativement être inventifs dans ce qu'ils font !
J'adore les couvertures que Larry Rostant a faites pour les éditions britanniques de mes livres, et c'est exactement ainsi que je les imaginais, mais je comprends qu'elles ne plaisent pas autant aux États-Unis. Elles sont très sombres et c'est ce que je choisirais dans un magasin, mais, là-bas, c'est un marché différent. J'étais un peu inquiet quand Lou m'a annoncé qu'il commanderait une nouvelle couverture, car j'avais vu d'horribles illustrations sur certains livres américains, puis dès qu'il m'a indiqué le site de Todd, j'ai été emballé par cette idée ! Je suis très satisfait des deux couvertures qu'il a réalisées et je pense qu'elles seront parfaites pour le marché américain. Ce sont des images d'une grande qualité, qu'elles soient utilisées ou non en tant que couvertures.
- Plusieurs auteurs britanniques de Science-Fiction et de Fantasy ont du mal à vendre leurs oeuvres aux États-Unis, et l'inverse est tout aussi vrai. Existe-t-il une différence entre ces deux marchés, qui expliquerait pourquoi les auteurs de genre ne suscitent pas le même type d'intérêt des deux côtés de l'Atlantique ?
-
Ce sont indéniablement des marchés différents mais fondamentalement, être publié dans n'importe quel pays reste difficile et il est compréhensible qu'un pays s'intéresse davantage à ses talents locaux. Par ailleurs, le type de narration utilisé par les écrivains dépend surtout de leurs origines et c'est quelque chose que les éditeurs prennent en compte - le bouche-à-oreille est important pour chaque livre, même si un lectorat fidèle est déjà acquis. Certains styles ne fonctionnent pas très bien aux Etats-Unis, certains types de narration ne sont tout simplement pas populaires au Royaume-Uni. J'ai lu quelques très bons livres, mais dans lesquels les expressions idiomatiques américaines provoquaient parfois certaines dissonances.
- De plus en plus, des auteurs / éditeurs / publicistes / agents découvrent le potentiel des blogs / sites web / forums de Science-Fiction et de Fantasy sur Internet. Gardez-vous un oeil sur les discussions de ces médias, notamment lorsque cela vous concerne ? Ou les considérez-vous plutôt comme une source de distraction ?
-
J'en lis quelques-uns, mais pas beaucoup. Le pouvoir du Web est indéniable, notamment pour les fans d'un genre, mais je ne veux pas passer trop de temps à les lire quand je devrais être en train de travailler ! J'ai une liste de trois ou quatre blogs que je consulte, notamment celui-ci (NdT : Pat's Fantasy Hotlist) et ceux de ma liste d'amis sur LiveJournal. Après ça, j'ai terminé ma première tasse de thé de la journée et je me mets au travail !
- Pensez-vous honnêtement que le genre de la Science-Fiction et de la Fantasy sera un jour considéré comme de la véritable littérature ? De mon point de vue, il n'y a jamais eu autant de bons livres / séries que maintenant et pourtant, le genre reste encore très peu reconnu (voire pas du tout).
-
Non, je ne pense pas. Je suis un geek travaillant dans une industrie snob et beaucoup de personnes se sentent mieux lorsqu'il y a un autre groupe à mépriser. C'est comme ça, mais il n'y a pas lieu de trop s'en faire. J'ai rencontré un grand nombre d'auteurs littéraires sérieux, qui forment le groupe le plus mesquin et le plus égocentrique qui soit. Tout n'est que compétitions et bassesses et ils sont paranoïaques jusque dans les moindres détails. En comparaison, cela ne me dérange pas d'être appelé un geek et d'aller boire une bière avec mes semblables ! Il y a de très bons livres publiés et des auteurs talentueux, mais tout ce dont nous devons nous préoccuper dans la communauté geek, c'est de continuer à faire ce que nous faisons, et du mieux que nous le pouvons.
- Souhaitez-vous ajouter quelque chose ?
-
Je crois que j'ai déjà parlé bien trop longtemps ! Mes livres sont sortis, faites-vous votre propre avis mais lisez-les jusqu'au bout et considérez cette oeuvre dans son ensemble, c'est tout ce que je demande !
Article originel, par Pat, le 1er novembre 2008.
Auteur
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