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Arrietty, le petit monde des chapardeurs
Par Gillossen, le jeudi 13 janvier 2011 à 13:42:50
Présentation du projet par Toshio Suzuki, producteur
C’est au début de l’été 2008 que Hayao Miyazaki m’a parlé pour la première fois d’Arrietty mais il y a près de quarante ans, Miyazaki-san et Isao Takahata voulaient déjà adapter “Les Chapardeurs” sous forme de film d’animation. Miyazaki-san s’en est souvenu, m’a demandé de lire les livres et a insisté pour que nous en fassions un film. Ce projet est peut-être né de souvenirs chers à son cœur du temps de sa jeunesse et de celle de Takahata-san, je n’en sais rien, mais ce genre de chose arrive de temps à autre au Studio Ghibli.
“Pourquoi faire “Les Chapardeurs” maintenant ?” ai-je demandé à Miyazaki-san. Il s’est alors mis à énoncer les différentes raisons qu’il avait de faire ce film. L’idée de cette histoire d’ “emprunt”, en soi, intrigue. Elle s’accorde pourtant parfaitement à l’air du temps, à l’époque qui est la nôtre. Il m’a déclaré que l’ère de la consommation de masse approche de sa fin. Nous sommes dans une très mauvaise situation économique et l’idée d’emprunter plutôt que d’acheter illustre parfaitement la direction générale que prennent les choses, a-t-il ajouté.
Lorsqu’il pense tenir une bonne idée, Miyazaki-san aime agir rapidement. Il a donc écrit une proposition de projet qu’il m’a soumise immédiatement :
''Petite Arrietty L’histoire ne se déroule plus dans l’Angleterre des années 50 comme c’est le cas dans l’oeuvre de Mary Norton, mais dans le Japon d’aujourd’hui, en 2010. Le quartier de Koganei me semble un cadre idéal. Dans le sous-sol d’une vieille maison, sous la cuisine, vit une famille de gens minuscules : une jeune fille de 14 ans, Arrietty, et ses parents. Ces “petites gens” se procurent ce dont ils ont besoin pour vivre en “empruntant” des choses aux êtres humains qui vivent au-dessus d’eux. Ils ne possèdent aucun pouvoir magique ; ce ne sont pas des fées. Ils se battent contre les soucis, ils ont des problèmes avec les cafards et les termites, ils doivent échapper aux fumigations et aux pulvérisations d’insecticides, éviter les pièges à cafards et les appâts empoisonnés à l’acide borique. Les petites gens mènent une existence modeste et prudente, et veillent à ne pas être vus et à ne pas attirer l’attention. Le père est un brave homme, fort et courageux, qui effectue de dangereuses missions de chapardage. Responsable, il veille sur sa famille. La mère protège et gère le foyer. Arrietty est une jeune fille sensible à l’esprit aiguisé. Ils ressemblent à n’importe quelle famille traditionnelle. Le monde normal, ordinaire, est vu sous un angle neuf et d’une façon inédite et rafraîchissante à travers les yeux d’individus de 10 cm de haut. Animer ce petit peuple, faire bouger ces personnages, sera merveilleux. L’histoire montrera la vie quotidienne de ces gens minuscules, leurs rencontres, leurs échanges et aussi la séparation entre Arrietty et un garçon humain dont elle est devenue l’amie. Le film montrera aussi comment cette petite famille échappe à un sort catastrophique qui lui est infligé par un humain cruel, et est forcée de fuir sa maison et de vivre dans les champs. J’ai l’espoir que ce film offrira un réconfort et encouragera les gens qui traversent ces temps difficiles, chaotiques et incertains…''
Comme on le voit, le film s’intitulait à l’origine “Chiisana Arrietty” (Petite Arrietty). Je trouvais ce choix audacieux et je lui ai demandé pourquoi il avait choisi ce titre. Miyazaki-san m’a répondu qu’il aimait la sonorité du mot “Arrietty” et qu’il n’oublierait jamais ce nom. Cependant, le titre ne faisait aucunement allusion aux “emprunts” qui étaient selon lui la principale raison d’être du film. Quand je le lui ai fait remarquer, Miyazaki-san a immédiatement changé le titre, qui est devenu “Karigurashi no Arrietty” (Arrietty la Chapardeuse).
La question suivante était : qui va réaliser ce film ? Difficile d’y répondre. Le Studio Ghibli avait jusqu’alors confié la réalisation de quasiment tous ses films à Isao Takahata et Hayao Miyazaki, qui s’en chargeaient tour à tour. Mais ils étaient tous les deux âgés à présent. Il existe un dicton qui dit : “Chargé du poids des ans mais de plus en plus fort”, même si, en pratique, c’est vrai jusqu’à un certain point seulement. Alors, exactement comme nous avions confié la réalisation des Contes De Terremer au jeune Goro Miyazaki, il nous fallait un réalisateur plus jeune pour ce projet.
“Qui allait le faire ?” Dans pareille situation, Miyazaki-san s’en remet soudain complètement à moi, me considérant comme l’unique personne en charge du Studio, et ne prenant pas en compte qu’une telle question peut demander un certain temps de réflexion.
Le seul nom qui m’est venu à l’esprit sur le moment était celui de Hiromasa Yonebayashi, surnommé “Maro”. “Que pensez-vous de Maro ?”, ai-je dit. Mayazaki-san a eu l’air étonné. “Suzuki-san, depuis combien de temps réfléchissez-vous à cette question ?” a-t-il demandé. “Oh, peut-être deux ou trois ans”, ai-je menti. Je n’avais même jamais demandé à Maro s’il envisageait un jour de passer à la réalisation. J’ai donné son nom simplement parce qu’il me fallait une réponse sur l’instant.
Il se trouve que Maro est le meilleur animateur du Studio Ghibli. Pour Ponyo Sur La Falaise, il était responsable de la scène où Ponyo court dans de grosses vagues à la recherche de Sosuke, et son travail d’animation avait impressionné Miyazaki-san. “Alors, faisons-le venir et discutons !” a dit Miyazaki-san. Une fois qu’il a pris une décision, il passe tout de suite à l’acte. Il a fait venir Maro à ses bureaux de Nibariki afin que nous puissions le convaincre d’accepter notre proposition. Miyazaki-san est allé droit au but. Il a montré à Maro un exemplaire du livre et a dit : “Maro, voici notre prochain projet, et c’est toi qui vas le réaliser !”.
Maro, qui change rarement d’expression, a été surpris. “Mais un réalisateur ne doit-il pas avoir sa propre philosophie, son point de vue à lui ?” a-t-il demandé. “Je n’en ai pas.” Miyazaki-san et moi nous sommes écriés à l’unisson : “Tout est déjà écrit dans le livre !”. Maro était stupéfait, mais il a fini par accepter la décision de Miyazaki et son rôle de réalisateur.
Dans les premiers temps, il a constamment cherché à avoir l’opinion de Miyazaki-san, mais quand le temps de dessiner les storyboards est venu, il a réalisé qu’il devait faire face seul, et il a informé Miyazaki-san que désormais, il ne rechercherait plus son avis. Miyazaki-san a répondu : “Voilà un bon garçon ! Sois courageux !” et il l’a encouragé. Et maintenant, toute l’équipe de production de Ghibli se consacre à faire ce film à partir des storyboards de Maro. Les choses se passent parfaitement jusqu’à présent, et notre seule préoccupation est Miyazaki-san. Il a forcément Maro à l’esprit, et vous ne savez jamais quand Miyazaki-san va débarquer comme une tornade dans les studios et donner un avis qu’on ne lui a pas demandé et de nouvelles idées !
Pages de l'article
- Le synopsis
- Présentation du projet par Toshio Suzuki, producteur
- Interview du réalisateur Hiromasa Yonebayashi
- Entretien avec Cécile Corbel, compositrice de la bande originale
- Les héroïnes du studio Ghibli
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