C'est cette fois-ci de ce côté de l'Atlantique que le comics écrit par Alan Moore et illustré par sa compagne Melinda Gebbie alimente la polémique... Mais pas particulièrement dans nos vertes contrées... pour l'instant ! C'est en effet en Écosse essentiellement, terre natale de Sir James Matthew Barrie, l'auteur de Peter Pan, que renaît la controverse. Rappelons que Wendy Darling est l'une des héroïnes de cette œuvre à caractère pornographique, appelée par certains le kama-sutra des comics, en compagnie de Dorothy du Magicien d'Oz et d'Alice au Pays des Merveilles.

Tous les droits relatifs à Peter Pan, et donc aux personnages, étaient détenus jusque-là, de par la volonté même de l'auteur, par le London's Great Ormond Street Hospital for Children, qui faisait barrage pour une sortie du comics au Royaume-Uni et plus largement en Europe, comme pour toute œuvre relative à cet univers cela dit. Mais l'ensemble est tombé dans le domaine public depuis le 1er Janvier, Sir Barrie étant décédé depuis plus de 70 ans, d'où la sortie programmée par chez nous en ce début d'année !

Il faut reconnaître que les amateurs de l'œuvre originale peuvent être quelque peu décontenancés par le comics de Moore, Clochette y étant par exemple violée et Wendy espionnée par des noirs voyeurs et pédophiles, sans compter les nombreuses situations équivoques dans lesquelles la comparse de Peter est placée, incluant parfois ce dernier et les Enfants Perdus (The Lost Boys en VO...).

Les nombreuses voix qui s'élèvent ont cependant rarement ne serait-ce que vu l'ouvrage en question :
Sandra Affleck, historienne et guide de la maison familiale de l'auteur à Kirriemuir : Ce livre me semble horrible. C'est l'antithèse complète de que Barrie pensait et a écrit. Son travail porte sur la magie de l'enfance et ce nouveau livre pollue cela. J'appuierai toutes les mesures qui pourraient l'empêcher de paraître.

Ian Mackintosh, conseiller conservateur de Kirriemuir ajoute : Je suis horrifié par l'idée que l'innocence de l'histoire originale de Peter Pan soit souilée par cette œuvre minable. Là, le lecteur attentif de Sir James M. Barrie pourra tout de même se demander s'il a bien lu le même ouvrage que ce monsieur...

Plus sérieusement, des associations telles que Charity Children qui milite pour la protection de l'enfance, en appellent à l'interdiction par la loi de Lost Girls et ce type d'ouvrages, ou apparaissent l'exploitation sexuelle d'enfants, ne serait ce qu'en dessins. Cette loi existe déjà pour les photographies.

Quant à Alan Moore, s'il s'attendait à cette attaque en règle sur l'âge des héroïnes, il trouve tout cela injustifié. Ce ne sont pas des enfants. Ce sont des représentations d'enfants. Il y a deux passages de rapports sexuels forcés dans Lost Girls. A chaque fois, cela se passe plus ou moins hors champs avec une certaine gravité. Nous croyons en la liberté absolue de l'imagination humaine aussi longtemps qu'on peut faire la distinction entre réalité et fiction. Les seuls qui semblent avoir du mal à faire cette différence sont les psychopathes et les magistrats.

Moore souligne que le livre, publié en 1914, était pour l'amour mais fortement contre la guerre. Lorsque j'allume ma télévision, je vois des images bien réelles d'enfants démembrés. Quand vous êtes confrontés à ce genre de vision au 20H, cela rend les arguments sur ce qui peut être dépeint ou non parfaitement risibles. Si on peut être tant dérangés par quelques dessins, mais beaucoup moins par l'exposition de chair et de sang bien réels, dans quelle société vivons-nous ?

Quant au Great Ormond Street Hospital, il n'a pas souhaité s'exprimer sur le comics.

Le débat pourrait être tout aussi houleux de ce côté-ci de la Manche, où les éditions Delcourt ont finalement décidé de franchir le pas de la publication, malgré les risques de censure.

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