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Un entretien avec Éric Corbeyran

Par Gillossen, le jeudi 24 janvier 2008 à 11:19:55

L'auteur !Actuellement au coeur de l'un de nos concours, précisément en cours, Éric Corbeyran est un scénariste de bandes dessinées à la carrière déjà longue et fournie (plus d'une quarantaine d'albums, pas moins) !
On pourrait notamment citer Weëna, en ce qui concerne la fantasy, une série que l'on suit depuis le premier tome sur Elbakin.net. Aujourd'hui, alors qu'il débute une nouvelle série avec ce New Byzance, l'auteur a bien volontiers accepté de répondre à nos questions, en cette période toujours importante de sortie d'album.
Merci encore à lui, et bonne lecture !

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Les questions et les réponses !

Tout d'abord, pourriez-vous nous présenter le concept de votre nouvelle série "Uchronie" ?

Il s'agit de trois récits apparemment indépendants qui se déroulent dans un même cadre - New York City - non pas à des époques différentes, mais dans des réalités différentes. Dans les deux premiers récits, le cours de l'histoire (avec un grand H) a été modifié au point que la structure même de la société s'en trouve complètement bouleversée. Ces trois récits vont peu à peu s'interpénétrer à travers le personnage central, Zack Kosinski. Le lecteur est amené à suivre les trois existences de Zack et découvre en même temps que lui qu'un moyen aurait été inventé pour franchir les frontières de la réalité...

Comment vous est venue l'idée de ce projet ? Quelles ont été vos influences ?

La littérature de science-fiction regorge d'uchronies. Elles sont plus rares en bande dessinée. En 2002, j'ai écrit une histoire steampunk intitulée "Le Régulateur" qui obéissait déjà dans sa forme aux principes de l'uchronie. Notre modèle pour la série Uchronie(s) a été "Le Maître du Haut Château" de Philip K. Dick, qui décrit un monde au lendemain de la 2nde guerre mondiale remportée par l'Allemagne nazie.

Qu'est ce qui vous plaît dans l'écriture d'une uchronie ? Quelle est votre définition personnelle du genre ?

L'utopie est un artifice qui a permis a des auteurs comme Thomas More et Jonathan Swift de dire ce qu'ils pensaient de la société de leur époque, tout en conservant une certaine distance. L'Uchronie permet également ce genre d'exercice. On envisage une trajectoire historique différente et on imagine les conséquences que cela aurait produit sur la société. C'est un petit jeu au cours duquel, par effet de miroir, apparaissent les faiblesses, les défauts et les travers de notre époque.

Pouvez-vous nous en dire plus sur les différents univers qui seront développés tout au long de la série ?

New Byzance décrit un monde tombé aux mains d'un pouvoir religieux fondamentaliste. La ville offre un visage nouveau, des souk occupent les ruelles tandis que des coupoles et des minarets côtoient les buildings. New Harlem décrit un monde où la minorité afro-américaine occupe les postes clés dans les secteurs économiques et politiques. L'apparence de la ville n'a pas changé mais la population blanche est reléguée dans des ghettos. Quant au troisième récit - intitulé New York - il représente la ville et la société telles que nous les connaissons aujourd'hui.

Vous utilisez régulièrement des éléments de l'actualité dans vos scénarii. Y a-t-il certains sujets qui vous tiennent à coeur mais qui restent difficiles à aborder, même par le biais du fantastique ?

La bande dessinée que j'affectionne et que je pratique habituellement (des séries réalistes, plutôt longues, avec des dessins très élaborés) ne me permet pas vraiment d'aborder une actualité brûlante qui exige davantage de réactivité, ne serait que parce que le choix des moyens est trop conséquent et que la production (1 an minimum pour la réalisation d'un album) est trop lente vis-à-vis de la rapidité avec laquelle évolue les sujets d'actualité. Mes thèmes de prédilection se trouvent alors plutôt dans des questionnements plus fondamentaux comme la place de l'homme dans l'univers, le sens de la vie, ou - comme dans Uchronie(s) - la remise en cause de certains concepts que l'on croyait immuables tels le temps, l'espace et la matière.

Eric Chabbert est le dessinateur pour le premier tome de la série, "New Byzance". Mais l'on sait qu'un autre dessinateur est prévu pour le second tome, "New Harlem". Comptez-vous changer de dessinateur pour chaque tome ?

Le principe est de confier une réalité à un dessinateur. Les trois réalités développées dans Uchronie(s)seront donc traitées par trois dessinateurs différents. Eric Chabbert réapparaitra pour réaliser le dixième et dernier tome de la série qui proposera une relecture de l'ensemble en forme de contre-point sous un angle inédit.


Diriez-vous que ce sont plutôt les dessinateurs qui motivent certains de vos choix scénaristiques, ou à l'inverse, choisissez-vous les dessinateurs en fonction des mondes que vous avez préalablement imaginés ?

Dans le cas d'Uchronie(s), il s'agit plutôt d'une heureuse convergence des envies de chacun puisque Defali et Chabbert m'ont fait part - séparément car ils ne se connaissaient pas - de leur souhait de travailler sur des univers parallèles. J'ai donc saisi la balle au bond et leur ai proposé à tout deux de travailler sur un projet commun, plus complexe et plus dense. Ils ont accepté avec enthousiasme. Grâce à eux, le projet Uchronie(s) a gagné en ambition et en ampleur.

Par exemple, comment s'est passée votre collaboration avec Eric Chabbert ?

Eric appréciait certaines de mes séries et avait manifesté - via les éditions Glénat - son désir de travailler avec moi. Il m'a fait envoyer ses albums. Nous avons échangé des mails sur nos souhaits réciproques puis nous nous rencontrés à Angoulème où l'on s'est assez vite et très naturellement retrouvés en phase sur le terrain de la science fiction et de la politique fiction. A partir de là, nous avons envisagé d'élaborer une série ambitieuse et grand public.

Comment appréhendez-vous la réception auprès du public de ce premier tome d'une longue série ?

Je suis à la fois impatient et anxieux (en fait, dans la vie, je suis toujours impatient et anxieux).

Quelle est la dernière lecture, BD ou non, qui vous a marqué ?

Cet été, je me suis propulsé avec bonheur et avidité dans l'univers totalement déjanté de Chuck Palaniuk (l'auteur - entre autre - de "Fight Club"). Plus récemment, j'ai adoré "Les enfants de la liberté", le dernier roman de Marc Levy, un récit très émouvant.

Merci beaucoup pour vos réponses !

C'est un plaisir.


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