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Un entretien exclusif avec Chris Evans !

Par Linaka, le jeudi 31 décembre 2009 à 14:45:00

DarknessChris Evans, ce n'est pas forcément le nom d'un acteur, mais également celui d'un auteur ! Et d'un auteur à suivre qui plus est...
L'une des sensations fantasy de l'année 2008, son premier roman, A Darkness Forged in Fire, arrivera en 2011 en France, édité par Fleuve Noir. Le tome 2 de cette trilogie des "Elfes de Fer", Burning Shadows, est quant à lui sorti cet été aux Etats-Unis. Chris met actuellement la dernière main au troisième et dernier tome des aventures de sa bande de héros, avec Ashes Of A Black Frost.
En attendant de découvrir tout cela par vous-même, l'auteur a aimablement accepter de répondre à nos questions, pour mieux se présenter à vous ! Une deuxième interview est d'ores et déjà programmée au moment de la parution du tome 1 en français... dans un petit moment donc. De quoi vous laisser le temps de lire celle-ci !

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L'interview en français

Pourriez-vous, en quelques mots, vous présenter à nos lecteurs ?
Je suis né au Canada et je vis maintenant à New York. Quand je ne suis pas en train d'écrire, je travaille à plein temps comme éditeur de livres traitant de conflits, d'actualités et d'histoire militaire. Avant de venir à New York, j'étais historien militaire, ce qui, j'imagine, est assez évident dans mes livres. J'aime courir dans Central Park et jouer les guides touristiques quand des amis ou de la famille visitent la ville.
Comment sont nés les Iron Elves (Elfes de fer) ?
Je me souviens de m'être demandé s'il n'y avait pas autre chose, dans la fantasy, que le cadre médiéval nord-européen qui prédomine dans la plupart des romans – j'ai alors pensé que je pourrais peut-être suivre cette voie. S'il fallait que je choisisse un moment précis, je dirais que c'est l'après-midi durant lequel j'ai soutenu avec succès mon mémoire de master. C'était en 1998. Je suis rentré directement à la maison, j'ai ouvert un nouveau document sur mon ordinateur et j'ai commencé à écrire mon premier roman. A cet endroit et à ce moment précis, je savais plus ou moins que je n'allais pas poursuivre un doctorat, et que je me concentrerais plutôt sur l'écriture commerciale au lieu de continuer mes études. C'était effrayant et exaltant. Il s'avère en fait que ce roman reste dans ma pile « à réviser », mais il m'a servi de rampe de lancement pour The Iron Elves, ainsi que pour l'idée d'un personnage principal qui serait le dernier elfe authentiquement elfe ayant jamais marché dans une forêt.
Vous êtes un blogueur consciencieux : internet est-il un outil important pour vous en termes de communication avec vos lecteurs, de recherches, etc ?
J'apprécie l'interaction avec les lecteurs que permettent les blogs. J'ai déjà rencontré beaucoup de gens fascinants venant de partout dans le monde que je n'aurais jamais connus autrement, et ça me donne une chance de leur donner des infos sur mon travail, le prochain bouquin que je suis en train d'écrire, l'heure d'un rendez-vous dans un pub dans le pays d'un contact, etc.
Et pour les recherches, internet est génial. Je trouve que c'est un excellent point de départ qui m'aide à affiner ma recherche, pour ensuite aller à la bibliothèque trouver des sources primaires à étudier.
Pensez-vous que votre travail d'éditeur a affecté votre écriture ?
Absolument. Cela me ralentit parfois. J'ai toujours tendance à vouloir corriger le texte en même temps que je l'écris, et je me bats avec moi-même pour garder l'éditeur à distance afin que l'écrivain puisse simplement créer. Je me répète qu'il y aura assez de temps pour éditer, réviser et sinon réécrire plus tard. Ce serait sympa de pouvoir dire qu'être éditeur fait de moi un meilleur écrivain, mais hélas ce n'est pas entièrement le cas. Vous savez, comme on dit : un avocat qui se représente lui-même a pour client un imbécile – eh bien, ce n'est pas si différent que cela pour un éditeur qui écrit. Si vous pensez pouvoir vous corriger et vous éditer vous-même, vous vous faites probablement des illusions. On a besoin d'un autre regard, qui donne une perspective différente.
Et d'ailleurs quel est votre aspect favori de l'écriture ?
J'aime le processus créatif, et j'aime tout particulièrement trouver l'humour de certaines choses. Et j'aime le pouvoir que l'on retire de la création d'un monde dans son intégralité. Je pense que les Français vont comprendre ceci mieux que personne, mais on se sent facilement un peu comme Napoléon avant une bataille. Tout est possible, et tout ce que requiert la victoire est que l'on utilise son esprit et son courage, que l'on ait une vision.
Êtes-vous influencé par les critiques littéraires, ou cherchez-vous à écrire quelque chose qui vous satisfait en premier lieu ?
Les critiques littéraires... au bout de ce chemin réside la folie ! Je plaisante, mais pour répondre à votre question, non, je ne suis pas vraiment influencé par les critiques littéraires. J'apprécie quand quelque chose que j'ai écrit entre vraiment en connexion avec un lecteur, et je suis ouvert à la critique constructive, mais essayer d'écrire en se basant sur les commentaires des chroniqueurs serait comme de conduire les yeux bandés en suivant les directives d'une personne assise sur le siège arrière. J'écris pour moi-même et pour l'histoire que j'ai en tête.
Pourquoi avez-vous choisi un cadre fantasy pour votre premier livre ?
J'ai grandi en lisant de la fantasy, et je suis resté un fan, ce qui inclut les désormais anciens tropes des elfes et des nains. L'autre grande force directrice est mon intérêt pour l'histoire, et l'histoire militaire en particulier. Je voulais créer une épopée qui serait racontée, en partie, d'après le point de vue du soldat ordinaire. Les armées abondent dans beaucoup de romans de fantasy, mais elles sont souvent reléguées à l'arrière-plan. J'avais envie de les mettre en avant.
Des elfes, des nains, des sorcières maléfiques, de la magie... Comment détournez-vous ces clichés de l'héroïc fantasy ?
Quand je me suis lancé dans Iron Elves, je voulais m'essayer à faire évoluer le cadre traditionnel d'Europe médiévale vers quelque chose qui soit plus proche du temps de Napoléon. J'ai toujours voulu voir ce qui arriverait au coeur du monde de Tolkien si on le déplaçait dans le temps, et avec Iron Elves j'ai eu une chance d'explorer ça.
Le personnage principal, le Commandant Konowa Swift Dragon, est un elfe, mais un elfe qui ne s'est jamais senti à l'aise dans la nature. Cette idée d'être comme un poisson hors de son élément me fascinait. Konowa a dû se battre toute sa vie contre des idées toutes faites sur qui et ce qu'il devrait être, et cela a fait de lui un elfe très en colère.
Quel est votre point de vue sur la fantasy actuellement ? Pensez-vous que votre passé d'auteur de littérature blanche altère votre perception du genre ?
Je ne suis pas sûr est la réponse la plus honnête que je puisse vous donner. Ce n'est pas que cela ne m'intéresse pas, ça m'intéresse, mais je publie plus de trente livres par an en tant qu'éditeur, je fais des recherches et j'écris au moins un livre par an moi-même, je cours, et j'essaie d'avoir une vie sociale. Cela ne me laisse pas autant de temps que je le voudrais pour connaître d'autres auteurs de fantasy, des chroniqueurs et des blogueurs, faire des conventions – et, ce qui est encore plus frustrant, pour lire tous les nouveaux livres qui paraissent et dont j'entends tellement parler. J'apprécie et j'admire les vrais maîtres – Tolkien et Rowling. Mais j'ai d'autres auteurs favoris, comme Terry Pratchett, et bien qu'il soit rarement mentionné dans ce contexte, le grand Rudyard Kipling.
J'imagine que mon passé dans la non-fantasy altère vraiment ma perception. Je travaille beaucoup avec des vétérans, des historiens et des journalistes, et cela transparaît dans mon écriture. Quand je lis pour le plaisir, je lis dans tous les genres – fiction ou non – et je les apprécie tous pour des raisons différentes. Pour résumer, je ne suis simplement pas un grand fan de l'ensemble du système de label des genres, de toute façon. Épluchez les labels et ce que vous obtenez est en réalité juste du tribalisme raffiné alimenté par les catégories des rayonnages en librairies. Donc si j'ai un point de vue sur l'état de la fantasy de nos jours, c'est plus l'espoir qu'elle reste vibrante et divertissante.
Quels problèmes avez-vous rencontré et lesquels pensez-vous avoir surmontés jusqu'ici ?
Quand je me suis mis à écrire le cycle Iron Elves, je voulais créer une grande aventure de fantasy divertissante qui explorerait tout un monde en péril – mais essentiellement à travers le point de vue commun – et pas si commun que cela – du soldat. Je voulais aussi me plonger dans l'impérialisme et le colonialisme avec un arrière-plan fantasy. En ce qui concerne les personnages, je voulais utiliser des héros qui ne sont pas satisfaits du monde tel qu'ils le trouvent, ou de leur place dans ce monde.
A en juger par les emails que je reçois des lecteurs, et par les traductions qui sont en cours (comme la traduction française, je suis heureux de le dire) je dirais que je fais des progrès, mais il reste encore beaucoup de choses que je veux accomplir dans cette histoire avant qu'elle ne soit terminée.
Avez-vous des conseils de lecture à donner à nos lecteurs, fantasy ou autre ?
Je suis un grand fan du cycle du Disque-Monde, par Terry Pratchett, et du cycle de Sharpe, par Bernard Cornwell. Si l'on veut un livre qui explore l'expérience du soldat, il n'y a pas mieux que le Quartered Safe Out Here de MacDonald Fraser. Les poèmes de Rudyard Kipling sont une autre ressource brillante, et je recommende vivement The Things They Carried, de Timothy O'Brien. Quelques autres sont vraiment excellents, comme The Guns of August de Barbara Tuchmann, à propos du premier mois de la Première Guerre Mondiale, et The Killer Angels, de Michael Shaara, qui est un compte-rendu fictionnel de la bataille de Gettysburg pendant la Guerre de Sécession, aux Etats-Unis. Alors que seuls les ouvrages de Pratchett sont de la fantasy, les autres sont incroyables, particulièrement dans le traitement de l'expérience du soldat, de la camaraderie qui ressort du partage d'expériences traumatisantes ; et avec des narrations vraiment exceptionnelles.
Avez-vous en projet des livres qui ne se déroulent pas dans l'univers de Iron Elves ?
Oui. Deux cycles sont en cours actuellement. L'un prend beaucoup des éléments de fantasy que nous connaissons tous bien, et les développe encore plus loin dans le temps que ne le faisait Iron Elves. Il y aura encore une forte composante d'histoire militaire, et une focalisation sur les individus qui doivent affronter l'ennemi sur le champ de bataille – mais avec encore plus de rebondissements que dans le cycle actuel, et un plus grand développement des relations personnelles.
Pourriez-vous nous en dire plus sur vos visites des champs de bataille en Europe ? Nous savons que vous êtes historien militaire...
La première des nombreuses visites que j'ai faites était en Normandie, au cours d'un voyage scolaire pendant les années 90. Ça a changé ma vie. Réellement, ces quelques semaines passées dans la campagne de Normandie en été m'ont fait prendre conscience de tout. L'un des moments les plus importants et les plus difficiles a été mon séjour dans l'abbaye d'Ardenne, juste à côté de Caen. Le 7 juin 1944, un groupe de soldats canadiens a été tué là-bas par les Allemands. Alors que je visitais les environs, j'ai découvert qu'il y avait des endroits similaires partout en Normandie où des civils français avaient été tués, et cela m'a réellement fait prendre conscience de l'horreur de la guerre. En même temps, j'ai souvent voyagé avec des vétérans qui avaient de nombreux bons souvenirs, et j'ai même été témoin de quelques réunions entre des aviateurs alliés qui s'étaient écrasés et les civils qui avaient risqué leur vie pour les cacher.
Enfin, dernière question et non la moindre, y a-t-il quelque chose que vous voudriez partager avec vos futurs lecteurs français ?
Seulement que j'apprécie l'opportunité qui m'est offerte de parler avec eux – et je vous remercie de permettre cela. Je me sens particulièrement proche de la France, et particulièrement de la Normandie, après l'avoir visitée plusieurs fois. C'est un véritable honneur pour moi de savoir que mes romans sont traduis en français. Cela m'a fait réaliser qu'il est grand temps que je retourne faire une visite en France !
Merci.

Propos recueillis par Emmanuel Chastellière. Traduction et mise en forme : Annaïg Houesnard.

  1. L'interview en français
  2. L'interview en anglais

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