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Un entretien avec Anne Groell

Par ThinkBecca, le mercredi 13 juillet 2011 à 17:49:21

InterviewTout grand écrivain a un éditeur. Il en va de même pour George R. R. Martin.
Anne Groell est l’éditrice de George depuis le tout début, au moment où le manuscrit du Trone de Fer a atterri sur son bureau. Depuis, elle a édité les 5 tomes du Trône de Fer, en étant une présence constante – mais à la manière discrète d’un ninja – dans cette série qui séduit de plus en plus de fans. Du fait de son métier, elle a lu A Dance With Dragons plus de fois que n’importe qui. C’est pour cette raison qu’elle est la meilleure personne à interviewer pour en savoir plus sur ce nouveau roman !
Voici donc une interview sans spoiler de l’éditrice Anne Groell.

L'entretien proprement dit

Anne, vous avez travaillé avec George R. R. Matin sur son Trône de Fer depuis le tout début. Pour vous, que signifie la sortie de A Dance With Dragons le 12 juillet, à la fois sur le plan personnel et professionnel ?
Personnellement ? Je pense que j’ai été la première personne, à part George, à lire A Dance With Dragons… Vous vous rendez compte ? En plus d’être son éditrice, je suis une grande fan, et j’ai trouvé ce livre complètement hallucinant. Je suis impatiente que le public partage cette expérience avec moi. Je pense que c’est l’un des meilleurs livres jusqu’à présent – et ce fut très difficile de n’avoir presque personne à qui en parler ! (Je sais, je sais. Vous ne compatissez pas du tout à mon sort, mais c’est vrai ! J’ai du taire d’énormes spoilers depuis des mois.)
Professionnellement ? Je suis très satisfaite de la qualité de ce roman. Je sais que certains ont accusé George de ne pas avoir travaillé durant les 5 ou 6 ans qu’il a pris pour écrire ce roman, mais je sais aussi que c’est complètement faux. Ce tome lui a demandé énormément de travail non seulement pour sa complexité, mais aussi pour la dure tâche d’arriver à faire tenir tous les éléments de l’intrigue dans la chronologie instaurée dans A Feast For Crows. (Les deux livres se passent quasiment en simultané.) On a eu beaucoup de conversations téléphoniques, on changeait sans cesse d’avis sur la manière d’écrire telle ou telle série d’événements, ou comment alléger le roman sans perdre l’intégrité de sa structure. Durant l’écriture de ce tome, George a probablement écrit et jeté l’équivalent d’un roman aussi long que Dance. Ca a été un travail monstrueux – qui nous a fait tourner la tête lorsque nous avons listé l’ensemble de problèmes et des difficultés qu’il aurait à surmonter. Pourtant, quand j’ai lu le manuscrit final, il était aussi propre, nickel et parfait que s’il avait toujours pensé l’écrire ainsi. Il était impossible d’y discerner le sang, la sueur et les larmes qu’il y a versés… ce qui est pour moi la marque de fabrique d’un vrai pro.
De plus, ça me rend juste très heureuse de voir que le monde entier devient fan d’une série dont j’ai toujours sur qu’elle était incroyable. A mon grand regret, je ne suis pas l’éditrice à avoir acquis la série à l’origine. J’étais une assistante d’édition insignifiante dans une autre maison d’édition, à l’époque – qui s’est transformée en véritable bourdon dans l’oreille de son boss, en disant « achète-le pour moi, achète-le pour moi tout de suite ! » Et Dieu sait qu’il a essayé. Nous avons été ceux à mettre le moins sur la table. George à finir par aller chez Bantam. Six mois plus tard, j’étais chez Bantam. Six mois après ça encore, l’éditeur qui avait acheté les droits est parti pour la maison d’édition que je venais de quitter ; je me suis donc retrouvée l’éditrice de George… ENFIN ! Et tout ça avant même que le premier livre soit terminé. J’ai mené cette danse avec lui depuis son tout premier livre, et le voir devenir un auteur célèbre a été un vrai plaisir. C’est merveilleux quand le talent est reconnu… et George a l’un des plus grand qui soit.
Vous parlez du temps dont George a eu besoin pour écrire ce livre, et des difficultés que lui a donné cette histoire complexe. Pensez-vous qu’il aura le même genre de problèmes avec The Winds of Winter ? Ou s’est-il remis sur les rails de son histoire ?
Oh, vous n’imaginez pas comme je suis pleine d’espoir ! Comme George lui-même est plein d’espoir, je pense. Je crois vraiment que ça va être plus facile à partir de maintenant, et je pense que George est d’accord, mais chaque livre a son propre rythme et ses propres difficultés. Et je sais que nous les fans voulons les livres le plus vite possible, mais je pense aussi que suffisamment d’entre nous veulent des livres de bonnes qualité pour que nous soyons capables d’attendre le temps qu’il faut pour qu’ils arrivent. En fait, j’ai fait un petit calcul pour Dance : j’ai pris le nombre de mots dans le roman, et l’ai divisé par 5, pour les 5 ans qu’il a fallu pour les écrire. J’ai trouvé que George écrivait environ 83 000 mots par an, ce qui est très respectable et n’a aucune raison d’être l’objet de critiques. Ces livres sont longs et complexes, et il faut du temps pour les construire. Peut-il écrire le prochain en un an ? Probablement pas. Mais en deux ans ? Ca reste mon vœu le plus cher, et celui de George aussi je pense !
La plupart des fans ont un personnage préféré dont ils attendent avec impatience de lire les aventures. Quel est le vôtre, et pourquoi ?
Tyrion, sans aucun doute. Et Dance comprend de longs passages sur Tyrion, qui racontent à la fois des moments très sombres de sa vie, mais aussi des aventures incroyables. Du coup je suis très heureuse. Rien que ce qui se passe avec Penny… mais j’en ai déjà trop dit. Pourquoi Tyrion ? Parce qu’il m’a prise à la gorge dès le début. Il est intelligent, drôle et plein de ressources, tout en ayant un humour sec et plein d’autodérision qui me prend de court à chaque fois. C’est également un personnage compliqué, qui a de vrais problèmes et des rêves qu’il pourrait bien ne jamais réaliser, alors que nous, on espère vraiment qu’il y parvienne.
J’ai mes propres espoirs et rêves quant à l’avenir de Tyrion dans l’histoire, mais je n’ai pas le courage de demander à George si j’ai raison ou non. Si ce n’est pas le cas, je serai bouleversée, et j’ai besoin de garder tous mes espoirs intacts. Je sais que la vie n’est pas juste – et encore moins dans les romans de George – mais je voudrais vraiment que Tyrion ait le droit à une pause, qu’il puisse réaliser au moins l’un de ses rêves. Les indices semblent orienter dans cette direction, mais George sait être malin. Depuis l’accident avec Lady, j’ai toujours su qu’il était impossible de lui faire confiance.
Vous disposez d’un grand nombre d’informations auxquelles le lecteur n’a pas accès. Quand vous avez lu les derniers chapitres de Dance With Dragons, avez-vous ressenti la moindre surprise aux orientations données par George à son histoire ?
George ne partage pas si facilement ses secrets. J’ai réussi à en obtenir quelques uns au fil des années – et il a été forcé de m’en dire quelques uns parce qu’il était nécessaire que nous discutions de certains points vitaux de l’intrigue – mais comme vous avez pu le voir, je ne sais absolument pas tout. Je ne sais même presque rien. Il dit qu’il veut être sûr que, en tant que l’une de ses premières lectrices, je sois surprise au fur et à mesure de ma lecture. Et je le suis. Toujours.
Dans Dance, nous l’avons incité à écourter l’histoire de l’un des personnages, car nous commencions à avoir trop de pages, et nous adorions tous la façon dons les choses se goupillaient dans la version de travail que nous avions. (On m’a fait lire la fin en plusieurs gros morceaux tandis qu’il perfectionnait le reste du roman). Mais il s’entêtait à écrire. Et quand j’ai fini par avoir le dernier chapitre de l’histoire de ce personnage, que j’ai compris où ça le menait et pourquoi il nous aurait été impossible de l’écourter, et bien… je crois que j’ai hurlé ! A ce moment-là, j’étais la SEULE à avoir lu ce chapitre, et je ne pouvais en parler à PERSONNE. Je l’ai immédiatement aux éditeurs britanniques, ne serait-ce que pour pouvoir en discuter, puis j’ai du attendre qu’ils finissent de lire avant de me sentir mieux. Quand vous arriverez au troisième chapitre avant la fin, vous comprendrez ce que je veux dire.
Alors oui, en résumé, je suis toujours surprise. Et toujours impressionnée.
Une dernière question. J’ai cru comprendre que George a écrit plus qu’il n’était possible d’intégrer réellement dans A Dance With Dragons. Une partie des textes finira probablement dans le prochain roman, The Winds of Winter. En tant qu’éditrice, à quel point avez-vous eu votre mot à dire sur ce qui restait dans ce roman, et ce qui devrait passer dans le prochain ?
Eh bien… J’ai probablement plus eu mon mot à dire qu’il n’aurait aimé… bien que la plupart des choix aient été en accord avec les siens. Terminer ce livre où il voulait que l’histoire se finisse lui aurait probablement pris une année de plus et plus de pages qu’il n’aurait été possible d’en mettre dans entre deux pages de couverture. Et il y a déjà tellement de choses géniales qui se passent dans celui-ci que pour moi, personne ne pourra se plaindre d’un manque d’action. Du coup, il a volontairement retiré l’une des séquences clé du roman. J’ai tout fait pour qu’il en enlève une autre… et ce fut le cas. Les gens pourraient me le reprocher, mais je pense que c’était la bonne décision. Ce livre est tellement gros et complexe, riche et merveilleux qu’ajouter ces deux séquences ne l’aurait pas rendu meilleur qu’il ne l’est déjà.
Mais d’après ce que je sais sur ce qui reste à venir – et sur ce qu’il m’a confié récemment – je suis plus qu’impatiente de lire Winds of Winter. Alors fonce, George ! Je sais que ça va être dur.

Article originel.


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