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Richard Taylor à propos de Narnia

Par Deedlit, le dimanche 11 septembre 2005 à 20:40:36

Le sémillant Richard Taylor - dont le visage et la voix sont connus de beaucoup depuis l'aventure Seigneur des Anneaux s'est encore plié au jeu de l'interview !

Interview de Richard Taylor

Le directeur de WETA parle à propos du Monde de Narnia et nous emmène faire un tour dans les studios.

Le 7 septembre 2005 : Richard Taylor a travaillé depuis le début avec Peter Jackson. De Meet the Feebles à Braindead, en passant par Créatures Célestes et Fantômes contre Fantômes, le duo a toujours travaillé brillamment, leur collaboration les entraînant vers un succès au-delà de leur imagination. Certains furent choqués en apprenant que Peter Jackson allait diriger la trilogie du Seigneur des Anneaux. Trois films, un Oscar et deux milliards de bénéfices plus tard, cela semble avoir été le bon choix.

Le succès de la trilogie du Seigneur des Anneaux a aussi permis à Richard Taylor des effets spéciaux de WETA de se faire une place. Alors que le groupe continue de travailler avec Peter Jackson, notamment sur King Kong, Taylor et compagnie ont pu s'investir dans d'autres projets, incluant une autre série de films basés sur un classique de la littérature, Les Chroniques de Narnia. Le premier épisode, Le Lion, la Sorcière et l'Armoire Magique sort sur les écrans le 9 décembre prochain. WETA travaille sur ce projet avec acharnement depuis des années maintenant et le résultat s'annonce plutôt impressionnant.

IGN FilmForce a passé quelques temps sur le tournage vers la fin 2004. Mis à part se balader sur les plateaux, rencontrer des membres du casting et de l'équipe technique ou même traîner parmi des loups, FilmForce a eu aussi droit a une longue visite des studios WETA, guidée par Taylor lui-même.

Tout d'abord, reprenons quelques points à propos de WETA, avant d'entamer notre questions/réponses avec Taylor.

  • WETA a été créé il y a 16 ans et est à la base un atelier d'effets spéciaux. Le nom WETA fut donné il y a 10 ans. Le weta est un insecte que l'on trouve à l'état sauvage en Nouvelle-Zélande.
  • Les partenaires de Taylor sont Jackson, Jamie Selrick et Tania Rodger.
  • N'ayant commencé qu'avec un seul ordinateur sur Créatures Célestes, WETA est aujourd'hui le service digital le plus développé dans le secteur.
  • La trilogie du Seigneur des Anneaux a pris 7 ans de travail. Ils ont réalisé 48 000 retouches numériques.
  • En dehors du travail de Jackson, WETA a également travaillé, entre autres, sur Master and Commander, Le Masque de Zorro, Hellboy, Van Helsing, Le Dernier Samouraï et Peter Pan.
  • La compagnie est aussi entré dans l'arène du merchandising, ayant actuellement les droits sur le Seigneur des Anneaux et les Muppets.
  • Ils travaillent en ce moment sur une série télévisée pour Disney, appelé Jane et le Dragon.
  • Lors de notre visite WETA travaillait sur Le Lion, la Sorcière et l'Amoire Magique depuis déjà 24 mois. Taylor connaissait auparavant Adamson pour son travail en tant qu'assistant du directeur des effets spéciaux de Fantômes contre Fantômes.
  • WETA compte 110 employés travaillant sur Le Lion, la Sorcière et l'Armoire Magique.
  • WETA est responsable du design des créatures, des cultures, des insignes, des armures, des armes et des pièces de décors.
  • Les différents designs s'inspirent d'une vaste gamme de mythologies, remontant à la Grèce, l'Egypte et l'Europe en général.
Q : Comment le personnel de WETA a t-il réagit face à tous ces récents succès ?
Taylor : Nous avons eu droit à des cris de joie et des embrassades. Tout le monde célébrait ça avec de la bière, alors on pouvait deviner à quel point chacun était content grâce au nombre de canettes vidées, donc... nous étions vraiment excités. C'est intéressant pour nous, parce que nous sommes à la tête de l'industrie, ici en Nouvelle-Zélande. Le jour avant les Oscars à Los Angeles, on m'a demandé si je pouvais faire un discours, avec les autres nominés pour le prix du maquillage, à un groupe d'employés de l'industrie qui s'étaient réunis au vieux musée Max Factor d'Hollywood. Je me suis levé et j'ai dit : « Avant de commencer, je voudrais juste vous dire – ça m'était venu comme ça – vous êtes tous mes pairs. Je travaille dans la même industrie que vous depuis 16 ans. Et je n'ai jamais rencontré un seul d'entre vous. »
Et parce que la tête de l'industrie se trouve ici, je veux être assuré que nos clients n'aient pas l'impression que nous sommes isolés. Et nous faisons attention à ça en amenant un très grand nombre de gens chaque année à Los Angeles. Mais, plus important, nous utilisons très régulièrement des vidéos conférences, et nous collaborons avec différentes compagnies partout dans le monde. Nous avons convaincu Andrew pour qu'il installe son bureau de production à LA, et c'est la réplique exacte de celui-ci. Et nous avons un écran si énorme qu'Andrew se retrouve finalement en taille réelle dans la pièce, et nos designers font comme si ils se trouvaient devant un immortel !
Q : Aviez-vous déjà lu les livres de C.S. Lewis avant l'arrivée du projet ?
Taylor : En fait, j'ai une connaissance bien plus intime et une histoire particulière avec les œuvres de Lewis, plus qu'avec celles de Tolkien. Etant un enfant dyslexique, mes talents de lectures n'étaient pas très brillants. Je n'ai pas été passionné par le Hobbit, j'ai lutté avec le Seigneur des Anneaux, mais j'ai trouvé dans les écrits de C.S. Lewis - dans tous ses livres – des mondes de fantasy riches et à ma portée. J'ai lu le Neveu du Magicien d'abord – la plupart des gens entre dans le monde de Narnia avec le Lion, la Sorcière et l'Armoire Magique. Le Cheval et son Ecuyer est mon préféré. Pour moi, ce livre possède une intimité qu'aucun des autres n'ont, tandis que sont dépeints les vastes paysages et l'agitation de cet univers. Il était nécessaire de vraiment comprendre la mythologie de tous ces romans pour rendre crédible le livre que nous portions à l'écran. L'Odyssée du Passeur d'Aurore explore le monde de Narnia plus profondément que n'importe quel autre, et c'est là que nous avons pu tirer la plupart de nos remarques sur les références culturelles de ce monde. Ce fut un plaisir, lorsque nous avons commencé le film, de découvrir qu'il y avait autant de personnes de l'équipe qui connaissait si incroyablement bien le monde de Narnia. Et c'était simplement dû au fait que ces romans sont énormément lus dans ce pays.
Q : Combien de créatures différentes votre équipe a t-elle conçu ?
Taylor : Quand nous avons commencé à travailler sur le film, c'était l'idée d'Andrew de les faire toutes apparaître à l'écran. Nous avons retouché ou conçu 64 modèles de créatures distincts, puis fait des dérivés de ces modèles. Avec l'avancée du film et l'arrivée du département des effets visuels, des questions budgétaires se sont posées. Tandis qu'Andrew s'appropriait l'univers de Narnia, les choses partaient dans tous les sens - une tige par ci, un pélican par là. Il sera intéressant de voir, si l'équipe des effets visuels s'occupe du film en post-production, combien de ces créatures se retrouvent en réalité dans l'histoire. Dans l'aspect visuel de la réalisation, la dernière chose que vous voulez est d'exclure les spectateurs - et plus particulièrement les jeunes spectateurs - de l'histoire parce qu'ils sont trop occupés à essayer de s'y retrouver entre toutes ces créatures. Je n'ai eu de cesse de revenir au Minotaure parce qu'il fait partie intégrante de la mythologie grecque et il véhicule une image si forte, que lorsque vous essayez de le concevoir comme un élément du film, vous vous retrouvez soudainement avec ce semi-animal et à moins que vous n'ayez quelque chose d'un environnement culturel pour le rendre crédible, cela reste un taureau dont la tête à été coupée.
C'est étonnant de voir à quel point certains de ces concepts peuvent avoir l'air étrange une fois que vous les mettez en action. Même les centaures - nous avons fait des centaures à n'en plus finir pour Hercule et Xena - quand vous commencez à analyser la structure physique d'un centaure, comme nous avons dû faire sur celui-ci... Où se situe la colonne ? Où se situent les hanches ? Des hanches d'homme ou de cheval ? Ce sont des questions de conception complexes. Les centaures nous ont probablement pris neuf mois de travail, à tenter de trouver la musculature et le placement correct. Donc pour répondre à votre question, vous remarquerez surement que certaines libertés ont été prises par rapport aux créatures du livre. Je suis vraiment enthousiasmé par les choix d'Andrew - surpris certes, mais charmé. Le loup-garou - trouver un loup-garou dans l'univers de Narnia est quelque chose d'étrange - semble faire partie d'une mythologie de cinéma moderne, mais c'est bien entendu une créature qui hante les histoires depuis bien longtemps.
Q : Et il y a aussi les bons et les méchants, mais appartenant à la même espèce...
Taylor : Cela contribua à la meilleure des interactions durant la phase de conception. Dans Le Seigneur des Anneaux, il y a les gentils et les méchants, mais nous dénotions toujours les méchants comme les forces cruelles et agressives. Ils ont des armures sombres, ils n'ont pas de dents, comme Tolkien les a décrit... Dans Narnia, le fait qu'ils soient des méchants ne signifie pas qu'ils aient des armures délabrées. Nos méchants les plus mortels sont les minotaures, et pour eux nous avons l'armure la plus opulente et la plus originale. Ils ont travaillé l'acier en repuso (NdT: repoussé) - une technique de la renaissance italienne consistant à prendre une feuille d'acier, et avec l'aide de burins et de repoussoirs, à frapper l'acier par l'envers pour créer ces formes riches et voluptueuses que vous pouvez voir dans les armures cérémonielles italiennes. Ils sont si arrogants, si assurés dans leur confiance et leur force, il y a presque une solennité dans leur force militaire. Ils sont devenus cérémonials dans leur présentation ; leurs plastrons sont décorés de symboles faisant référence à leur culture. Ceci par opposition aux bons, les faunes, qui ne disposent pas d'une puissance militaire considérable, et doivent être agiles et alertes sur leurs pieds. Ils utilisent leur habileté et leur talent à la manière de ninjas japonais.
Q : Comment avez-vous choisi les couleurs devant donner vie à l'univers de Narnia ?
Taylor : En ce qui concerne le Seigneur des Anneaux, puisque nous étions en pleine période médiévale, la gamme des teintes et des oxydes possibles n'étaient que ceux que l'on obtient grâce aux organismes végétaux. Comme nos personnages voyagent tout au long des trois films, leurs couleurs évoluent avec les oxydes des paysages qu'ils traversent. Le monde de Narnia n'est pas comme ça ; nous pouvons jouer bien plus sur les couleurs vives car nous dessinons à partir des teintes utilisés dans l'Angleterre Victorienne, donc beaucoup de couleurs vives. La technologie que Shawn a porté à son plus haut niveau était probablement Egyptienne. A partir de là, vous pouvez commencer à apporter des touches de couleurs plus exotiques dans les choses, et utiliser les couleurs très soigneusement pour distinguer les bons et les mauvais. Nous n'avons pas joué sur les nuances chrétiennes ou religieuses de l'histoire, mais nous en avons toujours tenu compte. Aslan est orné d'une couronne de lumière dorée, ses armoiries et les armoiries que l'on retrouve sur les insignes des armes des gentils doivent aussi d'une certaine façon être ornées d'or, parce que cela représente le flambant de la lumière et tout le reste. Nous avons essayé d'amener ça de manière subtile mais néanmoins visible.
Q : Et en ce qui concerne l'armure des enfants ?
Taylor : C'est tellement simple de dire « Ok, on doit créer un soldat médiéval ». Mais au moment où vous commencez à fixer la jambière, tout à coup vous la resituez dans une période bien définie de notre propre culture - une armure militaire du quatorzième, quinzième siècle. Nous avons réalisé, assez rapidement, bien que nous ayons parlé auparavant du besoin de faire ainsi, que nous étions en train de dessiner une cotte de mailles (12ème-13ème siècle) avec certains éléments d'une armure de plates. On aurait dit que l'armure avait été placée là, attendant l'arrivée des enfants, les Rois et Reines de Narnia, pour prendre leurs trônes. Ils sont partis dans cette expédition pour découvrir s'ils pouvaient prendre le trône de Narnia et quand ils y arrivent enfin, il y a l'armure les attendant là. Et donc, nous avons voulu que l'armure soit perçue comme si c'était une pièce d'antiquité, comme si elle constituait elle-même un trésor. Chacun de ses éléments est un symbole de pragmatisme. Ce garçon de 13 ans doit se battre avec talent et agilité sans difficulté manifeste.
Le heaume fut une chose complexe à concevoir. Ce que le public attend, c'est de s'évader émotionnellement à travers les émotions des acteurs, leur visage. Dès que vous masquez le visage et le profil, vous ne pouvez plus capter aucune des réactions de l'acteur. C'est là où tellement d'émotions s'expriment, de par la musculature, la façon dont les yeux bougent. Il est impératif, même si les heaumes militaires ont leur propre histoire, de dégager le heaume derrière les yeux. Il fallait que le garçon soit en mesure de faire passer des émotions à travers son heaume, même s'il le portait 90% du temps. Il matérialise sa décision de risquer sa vie pour sauver le monde de Narnia. Nous avons réalisé que rien n'est plus fort que de le voir finalement abaisser son heaume. Cela l'ancre dans un un aspect physique et visuel permanent. Il devient un homme. Le heaume a pour but de prendre son innocence et sa simplicité, pour qu'elles ne deviennent qu'un souvenir de sa jeunesse. Nous avons tenté de fabriquer une armure avec les motifs d'Aslan. En abaissant son heaume sur son visage il incarne en théorie tout ce qu'Aslan représente, il est un soldat dans l'armée d'Aslan. La pièce du heaume qui recouvre le visage est incroyable ; elle possède des ornements subtils mais visibles qui font penser à la gueule d'un lion. Cinq prototypes de ce heaume ont été forgés en acier artisanal, en variant subtilement la forme et la couleur. Nous les avons amenés à Auckland pour avoir l'avis de Andrew. C'était génial de travailler avec un réalisateur qui a tant l'oeil pour les subtilités esthétiques.
Q : Les enfants ont grandi depuis le commencement du tournage. Est-ce que cela a posé problème ?
Taylor : Bien sûr, l'acier n'est pas extensible, et ça nous en a posé... normalement il ne devait pas y avoir de solution, car c'est obligé que les enfants grandissent. On ne pouvait pas dire « on ne vous montrera le résultat que dans quatre mois, parce qu'à ce moment là les enfants auront grandi de dix centimètres ». On attendait de nous que les acteurs soient costumés, dans toutes les tailles, même avec les armures. Au moins ils n'ont pas perdu leurs dents de lait. J'ai discuté avec des gens qui avaient fait les films d'Harry Potter, et s'il y a bien une chose qu'ils n'avaient pas prévu, c'est que les dents des enfants aient pu commencer à tomber.
Q : La création des flèches de Susan a t-elle demandé beaucoup de travail ?
Taylor : Les flèches pour Susan ont demandé une attention toute particulière et un design des plus esthétiques. Le plus important fut d'utiliser un motif de feuille, et nous nous sommes inspirés pour cela de la feuille de pommier du Neveu du Magicien, que nous avons orné d'une tête sculptée d'Aslan, de façon à ce que la flèche soit porteuse des intentions d'Aslan jusqu'au coeur de l'ennemi. L'arc est quant à lui décoré de la tête d'Aslan, de sorte que lorsque Susan brandit son arc face à l'ennemi ce soit comme si Aslan se tenait devant eux et que Susan et lui combattaient ensemble. Tout ceci ne signifiera sans doute rien pour la plupart des spectateurs du film, mais il est clair que cela signifiera beaucoup pour les personnes qui ont grandi en vouant un culte aux textes de Narnia. Si nous n'avions rien fait d'autre que de rendre à l'écran une réplique visuelle parfaite du monde de Narnia, cela aurait été une déception pour eux. Même les enfants ont chacun une boucle de ceinture différente, avec un motif de Narnia particulier. Certains représentent de multiples motifs entrelancés, rappelant le graphisme de fleurs imaginaires que dessinait C.S. Lewis, quelques feuilles de vignes et formes de la nature ayant été rajoutées dans le tissage de ces motifs.
Q : Avez-vous conçu la table de pierre?
Taylor : Non. Nous avons eu droit à un aperçu de presque tout le design des éléments de Narnia, grâce aux illustrations de notre concepteur Gus Hunter. Mais il est parti pour travailler sur le design de King Kong, et Andrew a alors embauché un incroyable designer, Roger, qui a bien sûr apporté ses propres idées pour le projet. Je n'ai donc pas vu la table de pierre, mais je suis très impatient. C'était pour moi l'un des endroits les plus effrayants du monde de Narnia lorsque j'étais enfant.

Article originel, par Jeff Otto.


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