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Interview de Howard Shore

Par dwalan, le dimanche 27 avril 2008 à 08:51:30

Howard Shore Voici une interview de Howard Shore, le compositeur de la musique du Seigneur des Anneaux qui a été publié dans le journal allemand Süddeutsche Zeitung.

Pour la première fois, l'Orchestre Symphonique de Munich, sous la direction de Ludwig Wicki, donne un concert-film : pendant que la première partie du Seigneur des Anneaux, La Communauté de l'Anneau, est retransmise sur écran géant avec dialogues et effets sonores, l'orchestre joue la musique du film. Pendant les scènes de combat les compositions de Howard Shore passent au 1er plan. Aujourd'hui a lieu à la Philharmonie le 1er de 2 concerts.

Interview du Süddeutsche Zeitung

Süddeutsche Zeitung : D'où vient le projet de collaboration avec l'orchestre symphonique de Munich ?

Howard Shore : L'année dernière nous avons fait un travail de rétrospective de ma musique à Luzerne et Ludwig Wicki dirigeait 2 concerts avec la symphonie du Seigneur des Anneaux. C'est un musicien formidable et il a si bien réussi que nous avons pu prévoir de le refaire une autre fois ailleurs. Mais l'idée du projet de film-concert m'est venue, lorsque j'ai écouté les 3 CD du 1er volet "Die Gefährten" (NDT : la Communauté de l'Anneau), pour la première fois en entier en dehors du film. La je me suis dit : Pourquoi ne mettrais-tu pas en scène la musique en live ? Et ainsi de suite. C'est pour cela que nous sommes maintenant à Munich après la première à Luzerne.

SZ : Notre attention est toujours retenue dans ce film par les grandes scènes de bataille.

HS : (Rit) Exact. Le projet est aussi un expérience inhabituelle car ce n'est ni une séance de cinéma, ni un concert. C'est un mélange. On ressent plus les détails de la musique en vrai que autrement.

SZ : Avez-vous donné des conseils pendant les répétitions ?

HS : Wicki est un excellent chef d'orchestre, qui organise si bien les répétitions que je n'avais presque plus rien à dire, bien que je sois là-bas toute la semaine.

SZ : Pour composer le thème de la Communauté de l'Anneau, aviez-vous déjà vu des images à l'avance ? Ou vous êtes-vous débrouillé avec le livre ?

HS : J'ai lu le livre. Encore et encore. Il a été mon compagnon permanent. Et c'est bien de se laisser inspirer par l'original. Naturellement, pour la visualisation, j'avais à mes côtés un réalisateur fantastique avec un très bon flair. C'est un cadeau pour un compositeur : J'avais un bon livre et un bon film.

SZ : A quel point avez-vous considéré les idées musicales du réalisateur Peter Jackson ?

HS : Comment et où placer la musique dans un film est toujours une tâche intense qui demande toujours une très étroite collaboration entre compositeur et réalisateur. Nous avons eu beaucoup de rencontres pour projeter, discuter, décrire le film scène par scène et même parfois image par image. D'abord, il y a toujours la question : Avons-nous vraiment besoin de musique et comment peut-elle paraître pertinente ? Il y a beaucoup de possibilités, toutes sont envisageables. On doit juste avoir un point de départ. Jackson et moi avons vraiment bien travaillé ensemble. Avec le scénariste nous avons décrit en détail comment chaque instrument, chaque thème devrait être intégré et comment mettre en place des contrastes musicaux. Peter a été constamment un partenaire déterminant pendant tout le processus.

SZ : Parfois, c'est mieux lorsqu'il n'y a pas de musique.

HS : Absolument. J'avais déjà écrit de la musique pour David Cronenberg et je lui avais proposé de ne pas l'utiliser. Le silence est une langue puissante.

SZ : Les thèmes avaient-ils déjà été composés ou sont-ils tous en lien avec le film ?

HS : Quand je suis allé pour la première fois en Nouvelle-Zélande, à l'été 2000, pour voir la première partie des films, j'ai écrit après cela deux thèmes principaux : le thème de la Comté et celui de la Communauté. C'est de cela que tout s'est dégagé. La musique du film tout entière a environ 80 thèmes. Dans les chœurs, cinq langues tolkienniennes différentes sont utilisées. C'était une bonne occasion d'insérer dans les films les poèmes et les chansons de Tolkien. C'est une pièce très chorale, et l'orchestre se tient dans le style du milieu du XIXe siècle.

SZ : Comment composez-vous ?

HS : J'écris tout au crayon à papier, et ensuite j'écris l'orchestration à l'encre. Ensuite, tout est enregistré sur ordinateur. L'ensemble est un processus très linéaire, très long. C'est la production, le montage et le mixage. Mais au tout début, bien sûr, il y a l'inspiration.

SZ : Quels sont vos thèmes préférés ?

HS : Les scènes qui expriment l'amitié entre Frodo et Sam, et toutes les scènes avec les Hobbits.

SZ : Dans quelle mesure Carl Orff, aux côtés de Wagner, dont vous avez étudié et appliqué la technique de leitmotive pour le film, a-t-il aussi une influence sur votre musique ?

HS : Tout est en rapport avec l'utilisation des thèmes. Le Seigneur des Anneaux est une histoire si complexe, Tolkien a finalement écrit pendant 14 ans dessus. A mon avis, la technique des leitmotive était une bonne occasion de représenter la complexité de l'histoire, d'établir les personnages, les cultures, les objets et de raconter l'histoire à ces auditeurs qui ne connaissent pas le livre. J'ai composé onze heures de musique pour Le Seigneur des Anneaux, Wagner a composé quinze heures de musique pour L'Anneau des Nibelungen. Mon œuvre se fonde sur la langue symphonique du XIXe siècle. C'est pourquoi il y a certainement des similitudes. Orff est un compositeur que j'adore, mais je n'ai pas consciemment voulu éveiller quelque chose. J'ai grandi au XXe siècle, j'ai bien sûr été inspiré par lui aussi.

SZ : Après le film, vous avez composé d'après votre musique une symphonie en six mouvements...

HS : ... pour faire vivre la musique du film. Car jusqu'à cela elle était enregistrée en studio et n'existait que sur des CD.

SZ : Vous êtes en train de travailler sur l'opéra The Fly (La Mouche, NdT), basé sur le thriller horrifique de David Cronenberg sorti en 1986, pour lequel vous aviez aussi composé la musique.

HS : Oui, l'histoire est prête. Il est joué par l'Orchestre Philharmonique de Radio France à Paris sous la direction de Placido Domingo. Ils en sont aux derniers préparatifs pour la première en juillet. L'œuvre est traditionnelle à sa façon, avec un orchestre de 75 instruments, il y a trois rôles principaux et trois rôles secondaires et un chœur de 40 personnes. Tout est acoustique, il n'y a pas d'électronique, et pourtant c'est moderne. La Mouche est de la science-fiction et une histoire psychologique sur la transformation et la mort.

SZ : Vous avez composé beaucoup de musique de films, et pourtant votre nom est exclusivement associé à la musique du Seigneur des Anneaux. Cela ne vous déçoit-il pas ?

HS : Non. Le Seigneur des Anneaux est vraiment mon œuvre la plus célèbre, mais les personnes qui s'y intéressent accèdent aussi par celle-ci aux autres musiques que j'ai composées.

SZ : La composition de la musique du Seigneur des Anneaux était auparavant – comme vous le disiez vous-même – une gageure. Qu'en est-il pour vous aujourd'hui ?

HS : Cela continue. Nous avons juste commencé à travailler sur « Petit Hobbit ». Le travail sur Le Seigneur des Anneaux a duré à peine quatre ans, mais je n'avais jamais le sentiment que ça s'était arrêté. La musique est une partie de ma vie. Avoir l'occasion de retourner en Terres du Milieu est très excitant pour moi. Composer à nouveau de la musique pour cela – j'en ai rêvé.

Merci à Izareyael et Sylvain pour la traduction


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