Vous êtes ici : Page d'accueil > SdA Films & Bilbo > PJ et WETA

Peter Jackson parle de King Kong

Par Thys, le jeudi 8 décembre 2005 à 13:43:33

Le lauréat Néo-Zélandais d'un Oscar est tombé amoureux du film de 1933 King Kong lorsqu'il avait 9 ans. Aujourd'hui, quelques décennies plus tard et avec le succès phénoménal du Seigneur des Anneaux dernière lui, Jackson a assouvi son ambition de toujours en amenant le puissant Kong à l'écran comme seul lui pouvait le faire. Bien plus svelte que la dernière fois que Dark Horizons l'avait vu, nous l'avons rencontré à New York.

Interview de Peter Jackson

En tant qu’auteur, comment réussissez-vous à garder votre vision intacte ?
Jackson: C’est une question intéressante. Je ne sais pas vraiment ce qu’est un auteur. Je n’ai jamais très bien compris le terme parce que la réalisation de film est un énorme travail d’équipe. Je me vois comme le dernier filtre, tout ce qui finit dans le film y est parce que j’ai pensé que c’est quelque chose que j’aimerai voir si je regardais un film fait par quelqu’un d’autre. J’essaye vraiment de faire le film que je voudrais voir, mais je suis ouvert aux idées et j’ai besoin d’une énorme équipe pour m’aider. Tout le monde participe, et j’essaye de les y encourager un maximum, donc, je pense que le travail de réalisateur consiste à canaliser toute la créativité vers une seule personne. Et le marketing est vraiment l’affaire d’autres personnes, je ne suis pas du tout expert là-dedans, je pense que mon travail est de faire le meilleur film possible. C’est là que mon travail s’arrête, les gars du marketing prennent le relais après moi.
Nous savons tous que vous avez perdu du poids. Comment vous sentez-vous en tant que réalisateur et en tant que personne dans ce nouveau corps.
Jackson: Je suis épuisé. Je me suis senti bien pendant un temps, mais le film a été un tel marathon. Nous l’avons fini pratiquement 10 minutes avant de prendre l’avion qui nous a amené ici. Nous devions prendre l’avion de 9h30 et, à 9h, j’étais encore au département effets spéciaux pour approuver les deux ou trois dernières scènes du film. A 9h15, nous sommes passés au doublage pour valider quelques changements que nous avions apporté et puis nous sommes montés dans l’avion. Donc, je n’ai pas encore eu le temps d’apprécier ma nouvelle forme, je suis complètement fracassé et je n’ai pas vraiment pris le temps de vivre. J’ai fait des films non-stop depuis 10 ans avec le Seigneur des Anneaux, et en enchaînant sur King Kong. Je suis très content d’avoir fait ça, parce que nous avons pu mettre à profit la superbe équipe que nous avions rassemblée pour le Seigneur des Anneaux. L’une des raisons pour lesquelles je voulais faire King Kong très vite, dès que j’en ai eu l’opportunité, était que je voulais garder cette équipe unie et pouvoir simplement rediriger toute cette créativité sur un autre projet. Les gens ne le savaient pas, parce que ce ne sont évidemment pas des choses dont on parle, mais quand nous sommes venus à Los Angeles pour les Oscars du Retour du Roi, nous avions une réunion de production pour King Kong le lendemain. Nous avions une réunion Universal pour le script le jour suivant, et le surlendemain je suis allé à New York rencontrer Fay Wray. Nous sommes montés sur l’Empire State Building pour prendre des photos et faire des films pour construire nos plateaux. Nous étions déjà en plein milieu de King Kong, donc, ça a été un voyage ininterrompu pour moi ces dernières années.
Comment avez-vous décidé ce que vous gardiez et ce que vous coupiez de l’original ?
Jackson: C’est une bonne question, ça fait vraiment appel à l’instinct à un certain degré. Cela ne reflète pas une bonne et une mauvaise manière de faire parce que chaque réalisateur qui adapterait King Kong ferait un film très différent. Je voulais simplement faire ce film depuis très longtemps, j’avais des images et des idées dans ma tête depuis des années et des années. Pour moi, ça n’a pas été vraiment difficile de décider ce qui y serait et ce qui n’y serait pas. Je voulais simplement réaliser ce film que j’avais imaginé et qui est le film que j’aurai eu envie de voir. Et il y a des scènes que nous avons tournées et qui ne sont pas dans le montage final, comme par exemple cette version de la scène où ils traversent le marais et sont attaqués par une créature dans le film original. Même si le film fait trois heures, il y a quelques scènes que nous avons tournées et qui ne seront pas dans le film. Donc, certaines des choses qui vous manqueront par rapport à l’original, seront dans un DVD version longue si nous avons la chance d’en faire un.
Pourquoi cette passion pour King Kong en particulier et comment cela vous inspire-t-il en tant que réalisateur ?
Jackson: Cela m’a motivé à devenir réalisateur, vraiment, depuis que j’ai vu l’original à la télévision lorsque j’avais 9 ans, le vendredi soir en Nouvelle Zélande. Ce week-end là, j’ai construit un dinosaure en pâte à modeler, j’ai pris la caméra Super Huit de mes parents et j’ai commencé à l’animer. C’était vraiment une époque où je voulais faire des effets spéciaux, des monstres et des créatures, et puis, finalement, devenir réalisateur. Je ne savais pas vraiment ce que c’était que de faire des films à cet âge, j’en savais plus sur les monstres à cette époque. Le King Kong original est pour moi un grand moment d’évasion et de divertissement, il y a tout ce qui est vraiment cool dans les films, une île perdue, un singe géant, des dinosaures, et puis il y a aussi tout ce cœur et cette âme avec cette créature empathique qui m’a fait pleurer lorsque j’avais 9 ans, quand elle meurt à la fin sur l’Empire State Building. Ce moment où j’ai pleuré pour lui est toujours resté avec moi. Les gens vont au cinéma pour différentes raisons, mais moi c’est à cause de ce grand moment qu’est le King Kong original.
Qu’en est-il de la bande originale de James Newton Howard et qu’est-il advenu de la scène sur la plage du teaser ?
Jackson : Howard Shore était mon premier choix de compositeur, mais nous sommes de bons amis et nous nous sommes rendus compte, à un moment, que nos sensibilités divergeaient sur ce film. Donc, nous avons décidé, en tant qu’amis, de ne pas faire ce film ensemble. Nous admirions James Newton Howard depuis très longtemps, nous avions déjà utilisé des morceaux de ses précédents enregistrements pour sonoriser temporairement des images, sa sensibilité et son feeling paraissaient très bien s’accorder avec les images que nous avions tournées. Ce qui était marrant aussi, avec la musique, était de trouver une petite opportunité de rendre hommage à Max Steiner. Nous avons utilisé un peu de sa composition originale pour les scènes à New York où Kong est montré à la foule. C’était une bonne manière de garder un hommage de façon compartimentée. La scène sur la plage n’est plus dans le film. C’est l’une de ces scènes que nous avons tourné et qui ne convient pas au film, si nous mettions tout, le film durerait 4 heures. Nous avons mis cette scène dans le trailer, mais lorsque nous avons considéré le film dans sa globalité, elle n’allait plus. Il n’y a pas de règle pour ce genre de choix, on fait confiance à ses instincts pour ne pas se répéter et fournir le minimum nécessaire pour raconter l’histoire.
Dans quelle mesure avez-vous rendu Kong humain par rapport à un animal ?
Jackson: Evidemment, en tant que réalisateur, vous allez devoir manipuler le personnage pour faire en sorte que les scènes fonctionnent. Je ne le nie pas, mais nous l’avons basé autant que possible sur un véritable gorille. Nous nous sommes demandés au tout début ce qu’est Kong. Qui est-il ? Est-il un monstre ? Est-il le chaînon manquant ou une sorte d’aberration ? Nous avons pensé à le faire simplement gorille, un dos argenté aussi vrai que possible était une bonne manière de commencer. Tout le monde pense à lui comme à un gorille de toutes manières, bien que les versions successives aient été quelque peu différentes. Donc, nous avons étudié les Dos Argentés. Andy Serkis, qui a joué Kong pour nous, a étudié les gorilles de près, il a suivit un groupe de gorilles dans les montagnes du Rwanda pendant deux semaines, et a passé beaucoup de temps au zoo à observer leur comportement. Donc, tout est basé sur ce qu’un vrai gorille ferait, mais avec, évidemment, un peu de triche et de manipulation de la part des réalisateurs. Mais c’était intéressant parce que nous avons découvert que les Dos Argentés exprimaient beaucoup de personnalité avec simplicité. Et je pense qu’étudier tellement les gorilles a eu l’effet de nous faire simplifier sa personnification et de le rendre moins émotif. Les gorilles ne montrent pas grand chose, tout se passe dans le contact des yeux, s’ils vous regardent ou se détournent de vous, comment ils se servent du langage du corps. Il n’y a pas beaucoup d’expression dans leur visage, donc, nous nous sommes retenus là-dessus. L’une des choses que j’ai trouvé intéressante ces derniers mois en faisant l’animation de Kong c’est que je me suis rendu compte que je ne voulais pas tomber dans le piège de le rendre trop mignon ou de rendre son comportement trop gentil. Nous voulons que le public commence à sentir de la sympathie pour King Kong sans qu’il cesse d’être dangereux. Je ne veux pas qu’il cesse d’être une créature sauvage qui peut tuer des personnages que nous avons appris à connaître dans l’histoire. Garder cet équilibre entre la sympathie et le caractère imprévisible de ce qui reste un animal sauvage est intéressant.
Qu’est-ce qui était le plus important pour vous en adaptant ce film ?
Jackson: Le plus important était que les gens puissent croire en Kong, à la fois dans la manière dont il est dépeint, son personnage, mais aussi qu’il soit crédible techniquement. Je savais en m’engageant dans ce projet que la vie du film dépendait du fait que l’on croit en Kong ou que l’on reste dubitatif – parce que tous les films sont une suspension de l’incrédulité et vous espérez que les gens vont s’impliquer dans le film et se laisser emporter. C’est le plus gros souci que j’avais, la crédibilité de Kong, c’était bien plus difficile qu’avec Gollum qui parle tout le temps, et dont une grande partie du personnage et du rôle dans l’histoire reposait sur les dialogues. On apprenait à le connaître par rapport à ce qu’il disait alors que Kong est muet. Kong a aussi beaucoup temps de présence à l’écran et beaucoup de gros plan. Non seulement il est muet mais nous l’avons aussi volontairement réfréné pour qu’il n’exprime pas trop de choses la plupart du temps. C’était le plus gros challenge, ce qui nous faisait le plus peur.
Comment était-ce de travailler avec Naomi et d’essayer de la faire jouer devant un Kong qui n’était pas vraiment là ?
Jackson: Naomi était notre seul et unique choix pour le rôle d’Anne. Je pense qu’on réagit face à elle parce qu’elle est très honnête en tant qu’actrice. Elle ne fait pas semblant dans ses films, elle rend les choses aussi crédibles que possible. C’est l’un de ces actrices qui, lorsqu’elle pleure dans une scène, c’est parce qu’elle pense à quelque chose qui la fait pleurer ; elle est vraiment dans l’instant, je ne sais pas comme elle fait mais on croit en elle et pour ce film en particulier c’était essentiel. Naomi a aussi été beaucoup aidé par Andy Serkis. Les gens vont penser à lui comme le gars qui a fait la capture de mouvement pour Kong, celui qui est dans un costume, qui joue tout le rôle pendant que nous capturons ses mouvement avant de les mettre en animation. Mais pour moi, en tant que réalisateur, l’une des plus grandes contributions d’Andy a été d’être sur le plateau avec les acteurs quand ils ont tourné les scènes. Il ne tournait pas lui-même à ce moment, ses mouvements n’étaient pas capturé sur le plateau, ça a été fait en post-production, il était simplement là pour les autres acteurs, et sur absolument toutes les prises du film, sur chaque gros plan de Naomi quand elle regarde Kong, en réalité, elle regarde Andy. Il se mettait dans son champ de vision pour être toujours là où elle devait regarder Kong, que ce soit sur une échelle ou suspendu à quelque chose, il était toujours là et jouait Kong de tout son cœur. Je pense que ça a été très bénéfique pour Naomi et les autres acteurs. C’était aussi super pour moi parce que c’était le début de la création de Kong en tant que personnage. Je pouvais parler à Andy quand nous faisions ces scènes, ce n’était pas juste Naomi et moi, c’était Naomi, Andy et moi. Nous pouvions arrêter la scène et parler de la manière dont Kong se comporterait. C’était le début de la création de ce personnage que nous allions emmener en capture de mouvement, puis en animation, et finalement dans le film. La contribution d’Andy est donc bien supérieure à ce que les gens vont imaginer.
Est-ce que le réalisateur de Bad Taste est toujours en vous ?
Jackson: Oh, absolument. J’espère qu’un jour je referai un film d’horreur à petit budget. J’aimerai beaucoup. Maintenant, j’ai envie de me reposer et de me remettre de ces 10 dernières années de réalisation, être capable de faire d’autres choses intéressantes, d’autres idées à petit budget, des films d’horreur, ou d’autres genres. C’est bizarre, mais je viens juste de réaliser que je n’ai eu que 2 projets depuis 10 ans, Le Seigneur des Anneaux et King Kong, parce qu’au début nous voulions faire Kong juste après Fantôme contre fantôme. Ca nous ramène en 1995-1996, mais nous avons finalement fait Le Seigneur des Anneaux puis nous sommes revenus à King Kong. C’est donc excitant d’être capable de se reposer et de penser à d‘autres choses, au-delà de ces deux projets.
Doit-on prévoir une « Oscar Party » ?
Jackson: Je ne pense pas. Je ne crois pas que ce soit le genre de film qui attire l’attention des Oscars. Ce n’était d’ailleurs pas le but de Kong et je ne crois pas que ce sera le cas.
Y aura-t-il quelque chose de spécial sur le DVD ?
Jackson: Il y a au moins une version 2 DVD qui sortira, et après, si jamais il y a une version longue, il y aura sans doute 3 ou 4 disques.
Vous produisez toujours Halo ?
Jackson : Oui.
Qu’est-ce qui vous a attiré dans Halo ?
Jackson: Je suis fan du jeu.
Mais les films de jeux vidéos, ça craint.
Jackson: Oui, ça craint.
Qu’est-ce qui va être différent ici ?
Jackson: Heureusement, celui là ne va pas être craignos.
Mais pourquoi ne pas le diriger ?
Jackson: Je veux faire un break. Je veux avoir le bon côté des choses sans l’énorme boulot qui va avec. Je veux juste faire parti de l’équipe créative sans en avoir les inconvénients.
Y a-t-il un réalisateur ?
Jackson: Pas encore. Nous parlons avec certaines personnes, mais nous tournerons l’an prochain.
Etes-vous surpris par les réactions positives au script d’Halo ?
Jackson: J’en suis content, oui. Vous ne savez jamais à quoi vous attendre.
Allez-vous faire Lovely Bones?
Jackson: Oui, c’est prévu.
Avez-vous commencé à penser à un casting ?
Jackson: Non, non. Je vais d’abord prendre un break, et après nous ferons le script.
Comment avez-vous perdu tout ce poids, un régime spécial ?
Jackson: Non, j’ai juste arrêté de manger n’importe quoi.

Dernières critiques

Derniers articles

Plus

Dernières interviews

Plus

Soutenez l'association

Le héros de la semaine

Retrouvez-nous aussi sur :