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Rattraper Terry Gilliam

Par Guybrush, le jeudi 11 août 2005 à 16:23:47

Voici pour vous la retranscription traduite d'une longue interview de Terry Gilliam à l'approche de la sortie américaine de son prochain film, Les Frères Grimm, le 26 Août prochain. Rappelons qu'en France, celui-ci sera visible dans les salles à partir du 5 octobre prochain !

Interview de Terry Gilliam

Est-ce que le monde est prêt pour un autre film de Terry Gilliam ?
C'est la question que pourraient se poser les gens alors que le réalisateur sort deux films très différents le mois prochain. Après tout, cela fait six ans que son adaptation de Las Vegas Parano (de Hunter S. Thompson), avec Johnny Depp, n'a pas réussi à trouver les louanges critiques ou commerciales de ses précédents succès, L'Armée des 12 singes et Fisher King.

Un nouveau siècle est arrivé depuis que nous avons vu pour la dernière fois M. Gilliam, et pendant ce temps, des films comme Pirates des Caraïbes : La Malédiction du Black Pearl et H2G2 : Le guide du voyageur galactique et même les films Harry Potter ont connu le succès en utilisant le même mélange insolite de comédie et de fantasy qui ont été le facteur clé des films de Gilliam. La comédie musicale Spamalot, basée sur les films Monty Python que Gilliam a réalisés, a connu un énorme succès à Broadway, gagnant de nombreux Tony Awards, et vingt ans après Brazil, le monde ressemble de plus en plus à la vision contre-utopique du futur de Gilliam.

Même s'il est un véritable visionnaire, Terry Gilliam ne reçoit pas le respect qu'il mérite à Hollywood. 2005 pourrait être l'année des changements, alors que le monde se souviendra quel important réalisateur il est avec la sortie de pas un, mais deux nouveaux films. D'abord, Les Frères Grimm, basé sur un script de Ehren Kruger (Le Cercle), sort le 26 août aux USA. Cela pourrait être le film de Gilliam le plus viable commercialement à ce jour avec un prémisse qui séduira quiconque ayant adoré les contes de fées des Grimm, devenus des classiques, comme Le Petit Chaperon Rouge et Hansel et Gretel. Quelques semaines plus tard, le prochain film de Gilliam, Tideland, une adaptation à plus petite échelle du roman de Mitch Cullin, concernant une jeune fille à l'imagination débordante, fera ses débuts au Toronto International Film Festival.

Inutile de le dire, cela devrait être une année excitante pour le réalisateur, et par conséquent, pour toutes les stars ; ainsi, ComingSoon.net a pu avoir cette interview exclusive avec le réalisateur une semaine avant qu'il se prépare à partir à Los Angeles pour la campagne-éclair des médias pour Les Frères Grimm..

Article originel, par Edward Douglas

CS ! : Les Frères Grimm est un projet sur lequel vous avez travaillé depuis assez longtemps. Pourquoi cela a-t-il pris tant de temps pour qu'il voit la lumière du jour ?
Terry Gilliam : Cela a commencé en 2002, et j'ai terminé le tournage à fin novembre en 2003. J'avais deux films l'année suivante. J'ai terminé Grimm et j'ai continué en faisant Tideland et ensuite je suis revenu et j'ai peaufiné les deux films. J'ai littéralement dû m'arrêter la deuxième moitié de l'année passée et aller au Canada pour tourner un autre film, donc Grimm a été temporairement mis en attente, et ensuite je suis revenu pour terminer Grimm et Tideland.
CS ! : Comment avez-vous mis la main pour la première fois sur le script de Ehren Kruger pour Les Frères Grimm ? L'a-t-il écrit avant d'écrire Le Cercle ?
Gilliam : Eh bien, je ne sais pas exactement. Chuck Roven, qui a produit L'Armée des 12 Singes, il essayait de me refaire faire quelque chose. Il m'a donné ce script, et c'était intriguant, parce que j'ai grandi avec les contes de fées des Grimm et je pensais que c'était une façon intéressante de profiter de ces braves personnes allemandes, respectables et travailleuses qui nous ont apporté tous ces grands contes de fées. En fait, ils ont été piégés par un conte de fées créé par quelqu'un d'autre.
CS ! : Cela a-t-il été fait complètement hors du système de studio ou aviez-vous le soutien d'un studio ?
Gilliam : Non, cela a été fait avec Dimension. Nous avions commencé ce projet avec MGM, et nous étions en pré-production à Prague; tout le monde venait juste de se présenter lorsque nous avons reçu cet appel disant que MGM avait arrêté le financement, donc tout le monde devait prendre son avion et retourner d'où il venait. Dans les 24 heures, nous recevions un appel de Dimension déclarant qu'ils voulaient être de la partie, donc je suis allé à L.A., j'ai rencontré les Weinstein, nous en avons parlé, et voilà.
CS ! : Entre Les Aventures du baron de Munchausen, Don Quichotte et maintenant ça, vous avez construit votre réputation sur le détournement de folklore et de contes de fées. Qu'est-ce qui vous intrigue ou vous séduit en faisant cela ?
Gilliam : Dans ce cas précis, il s'agit en fait de deux frères, l'un est cynique et pragmatique, et l'autre est un rêveur romantique et à bien des égards de savoir qui va gagner ? Ce sont deux visions du monde, qui dans ce cas précis, est celui des contes de fées, magique et enchanté, mais montre un visage effrayant. Pour moi, la fantasy et la réalité, je ne dirais pas qu'il s'agit de deux côtés de la même pièce à moins qu'il s'agisse de ma vie, et ce sont deux côtés de la même pièce. (rires)
CS ! : Comment avez-vous fini par choisir Matt Damon et Heath Ledger pour jouer les deux frères et comment avez-vous décidé lequel jouerait tel frère ?
Gilliam : Eh bien, je pense qu'ils jouent tous deux des rôles différents, Matt faisait normalement le personnage le plus introverti, jusqu'à La Mémoire dans la Peau, mais même là, il est encore calme et introverti dans ses actions. Dans Les Frères Grimm, c'est l'extraverti, la grande gueule, le gars qui charme les femmes. Et Heath, qui joue souvent le premier rôle, incarne maintenant le frère amusant et crispé, qui est plutôt vulnérable. En fait, il s'agissait de choisir le contraire des critères, comme d'habitude. J'aime placer les gens devant des choses qu'ils n'ont pas faites auparavant et la même chose s'applique pour le public, en essayant de leur donner une piste différente où ils peuvent voir ces gens comme des acteurs, et pas simplement des extensions d'un aspect particulier de leur personnage.
CS ! : D'une certaine manière, les Frères ressemblent à la personnalité du Baron Munchausen coupée en deux, chacune avec sa propre prise sur la réalité et la fantasy. Avez-vous vu des corollaires entre les deux films ?
Gilliam : Ma femme n'arrête pas de m'accuser de faire le même film en changeant juste les costumes. (rires)
CS ! : Le film semble absolument formidable, et je pense que l'équipe que vous avez réunie était super. Pouvez-vous parler de la création de l'aspect du film ?
Gilliam : Ouais, Guy Dyas, c'était le deuxième film qu'il ait jamais conçu. Il était plutôt incroyable. Il avait fait X-Men 2 et c'est vraiment un artiste fantastique. Il dessine d'une façon magnifique et rapide, et c'était simplement un bonheur de travailler avec lui. J'ai récupéré Gabriella Pescucci, qui avait fait Le Baron Munchausen. Elle est spectaculaire. C'était vraiment une équipe fantastique. L'astuce était d'essayer de créer un monde qui était à la fois magique et totalement réaliste en même temps, plutôt que d'échapper à ce que je vois dans beaucoup de films de fantasy où les pieds ne touchent plus le sol. Je voulais garder les pieds fermement sur terre, afin qu'il soit clair que lorsque nous sommes dans une forêt enchantée, c'est une vraie forêt qui prend soudainement vie de différentes manières alors que vous la regardez normalement. Je pensais que c'était essentiel, donc toutes les personnes se sont impliquées, même dans les animateurs informaticiens, et je n'arrêtais pas d'essayer de détruire leur bon travail, parce qu'ils avaient tendance à rendre les choses magnifiques et flottantes, et je voulais juste les rendre plus réalistes. Avec un peu de chance, j'y suis arrivé.
CS ! : Vos films ont tendance à avoir un aspect et une vision que les gens lient automatiquement à vous. Si « Gilliamesque » était un mot existant, comment le définiriez-vous ?
Gilliam : Je ne sais pas. Je veux dire, c'est mon problème. Tout le monde n'arrête pas de parler d'une qualité « Gilliamesque » ou d'un aspect « Gilliamesque ». Ils commencent à voir un film ou une bande-annonce et ils comprennent immédiatement que c'est moi. Honnêtement je ne vois pas ce qu'ils veulent dire, parce que c'est simplement la façon dont je vois le monde. C'est très dur pour moi de sortir de ma vision du monde et de le regarder objectivement. Je fais ce que je fais, simplement. Presque tout ce que je fais est plutôt instinctif dans la façon de voir et de ressentir. Je pense que quoi qu'ils aient, quoi qu'il arrive dans mes films, il y a toujours beaucoup d'humour qui perce certaines des prétentions potentielles que j'ai.
CS ! : Dernièrement il semble y avoir beaucoup plus de films qui dégagent ce genre de sentiment, de Pirates des Caraïbes ou H2G2 : Le guide du voyageur galactique. Avez-vous aussi cette impression ?
Gilliam : Eh bien, je pense que les grosses productions pleines d'actions machos deviennent maintenant très répétitives. Nous en avons tellement vues depuis tant d'années que je suppose que les gens en sont gavés. Quand je vais au cinéma et que je regarde des bandes-annonces, je jure que j'ai vu cette bande-annonce vingt fois déjà. On dirait le même film et elles ont tendance à se prendre tellement au sérieux, et ça n'a pas de sens. Le monde réel n'est pas comme ça. Aussi, j'ai tendance à penser que si vous passer trop de temps à faire des films machos de gens se tirant les uns sur les autres, cela commence à affecter le monde réel.
CS ! : Avez-vous presque terminé Tideland ?
Gilliam : Ouais, je veux dire, Tideland est terminé maintenant. Nous l'avons terminé la semaine passée, et il sort le 9 septembre au Toronto Film Festival. C'est plutôt différent de Grimm. C'est sympa, parce qu'un est grand, magnifique et amusant. Je n'arrête pas de dire que « Grimm est prévu pour effrayer les enfants, et Tideland et prévu pour effrayer les adultes ».
CS ! : Qui va le distribuer ?
Gilliam : Nous ne savons pas encore, en fait. Nous l'avons fait hors de tout financement américain, et la présentation à Toronto sera le moment où Jeremy Thomas vendra le film, donc avec un peu de chance, d'ici la fin de la semaine, nous saurons qui va le distribuer. J'aime bien les deux films, parce qu'ils s'équilibrent l'un l'autre d'une façon intéressante.
CS ! : Juste pour montrer à quel point les temps ont changé, la comédie musicale Spamalot basée sur les films Python est maintenant le plus grand succès à Broadway. Seriez-vous intéressé par la réalisation d'une version cinématographique de cela comme ils font avec la comédie musicale The Producers ?
Gilliam : Non, pour moi Spamalot est super, et c'est fantastique qu'il s'agisse d'un succès. Je crois qu'il y a une discussion concernant le fait d'en faire un film, mais je ne sais pas où ça en est maintenant, mais je peux presque garantir que je ne le réaliserai pas.
CS ! : Plus de comédies musicales ?
Gilliam : Non, je n'aime vraiment pas revenir en arrière. Nous avons appris beaucoup sur la création de films quand Terry Jones et moi avons réalisé ça, et c'est un film magnifique, et c'est du passé en ce qui me concerne. Le fait qu'Eric (Idle) l'ait réinventé pour Broadway est clair parce qu'il y a un public. C'est fantastique, mais je ne sais pas, je veux simplement continuer d'avancer plutôt que de réinventer le passé.
CS ! : Au fil des années, il y a eu de nombreuses discussions concernant le fait que vous pourriez réaliser des films basés sur des livres bien connus comme Watchmen d'Alan Moore, De Bons Présages de Neil Gaiman et même le premier Harry Potter pendant un temps. Tom Stoppard, qui a écrit Brazil, a adapté le premier livre de fantasy A la Croisée des Mondes pour l'écran, et ils semblent avoir besoin d'un réalisateur. Est-ce quelque chose que vous pourriez envisager de faire ?
Gilliam : C'était en fait très amusant quand j'ai entendu parler d' A la Croisée des Mondes adapté en film. Je n'arrêtais pas de lever la main au fond de la classe en disant « Moi, monsieur ! Moi, monsieur ! » mais personne n'a vu ma main, je suppose. (rires) Je sais que mon agent suivait ça de très près. Cela semble être passé dans plusieurs mains différentes à un certain moment. C'est un énorme projet et je ne suis pas sûr que le studio comprenne vraiment de quoi il s'agit, ce qui explique peut-être pourquoi il semble être en stand-by pour le moment.
CS ! : De ce que j'ai vu dans Les Frères Grimm, il semble que vous pourriez sans aucun doute vous en occuper.
Gilliam : Le fait est que je sais comment faire ce genre de film. Je peux faire des grands films avec beaucoup d'effets, mais cela ne signifie pas que je les apprécie autant que ça. C'est une façon très différente de travailler. C'est du travail difficile. Vous dirigez une armée et d'un autre côté, lorsque j'ai fait quelque chose comme Tideland, c'est un casting de quatre personnes, c'est un petit budget, et c'était vraiment rafraîchissant de pouvoir travailler rapidement. La création de film Guerilla est quelques fois bien plus amusante que les grosses choses. Les gros projets, je dois vraiment y croire totalement et complètement avant de m'y immerger.
CS ! : Revenons un peu en arrière, cela fait vingt ans depuis Brazil, mais il a toujours beaucoup de résonance, en particulier avec ce qui se passe en Angleterre aujourd'hui. Etes-vous surpris par le fait que toutes les choses que vous avez décrites dans le film se sont produites ?
Gilliam : Non. Le problème, en particulier en Amérique, est que les gens ont perdu tout sens de l'histoire. Ils pensent que l'histoire commence le matin quand ils se réveillent. Quand j'ai fait ce film, beaucoup de bombardements avaient lieu. L'I.R.A était très active à Londres. Ils étaient à la fin de leur campagne. Il y avait des terroristes en Allemagne, la Brigade Rouge en Italie, donc le terrorisme était bel et bien vivant. Ce qui m'intéressait, c'était la réponse des grandes bureaucracie face au terrorisme, mais aussi comment en l'absence de terroristes, elles en inventaient pour survivre. Maintenant, peut-être que nous sommes dans cette situation. Tout ce que je sais, c'est que l'administration Bush est beaucoup plus proche du Ministère de l'Information dans Brazil que ce que j'ai pu voir auparavant.
CS ! : A ce niveau de votre carrière, pensez-vous que Hollywood commence finalement à vous comprendre et à comprendre ce que vous faites ?
Gilliam : Je ne sais vraiment pas. J'espère qu'il y a beaucoup de personnes qui étaient fans de mes premiers travaux qui dirigent maintenant des studios. Peut-être qu'ils se souviendront combien de plaisir je leur ai donné quand ils étaient jeunes. C'est le mieux que je puisse espérer ! (rires)
CS ! Au fait, la bande-annonce a été très bien reçu à la Comic-Con le mois passé et Les Frères Grimm a été désigné comme meilleur film pour Août dans le sondage mensuel des lecteurs de ComingSoon.net.
Gilliam : C'est plutôt intéressant, surtout que vous n'avez pas encore vu beaucoup en termes de publicité pour Grimm jusqu'à maintenant. Je veux dire, cela commencera cette semaine si tout va bien, et j'espère qu'ils feront une grosse annonce à la TV, afin que quelques autres personnes soient au courant avant qu'il sorte.
CS ! : Alors qu'en pensez-vous ? Est-ce que le monde est prêt pour un autre film de Terry Gilliam ou peut-être même deux ?
Gilliam : Eh bien, je pense que nous le découvrirons dans le mois à venir. (rires) Espérons !

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