Roman de Ronce et d'Épine

ISBN : 978-249050141-0
Catégorie : Aucune
Auteur/Autrice : Baratte, Lucie

Dans un château perdu à l’orée d’une forêt mystérieuse vivent Ronce et Épine.
Avec pour seule alliée leur nourrice, elles grandissent à l’ombre d’une jeune mère fantomatique au corps usé par les nombreux accouchements et d’un père adolescent éternel qui ne pense qu’à son propre plaisir. Pour fuir leur vie recluse rythmée par les saisons, les deux sœurs s’adonnent à des passions qui les dévorent : la chasse pour Épine, la broderie pour Ronce. Et dans cette forêt étrange et fascinante rôde un esprit vengeur.
Devront-elles faire front ou se séparer pour vaincre ce qui veut les briser ?

Critique

Par Goldberry, le 01/05/2025

Avec Roman de Ronce et d’Epine, Lucie Baratte propose une variation autour des codes du conte et ce qui les caractérise souvent, le récit initiatique. 
Oubliez le titre du livre, qui sonne un peu trop comme des dizaines d’autres ces dernières années, avec un relent de mauvais Young Adult. Rien de tout ça ici. Deux sœurs jumelles, Ronce et Épine (d’où le titre, voilà !), grandissent à l’ombre de parents distants et d’une nature toujours plus envahissante. C’est un récit d’apprentissage, mais aussi un texte où les mystères ne sont jamais livrés sur un plateau, et où chaque détour dans les bois compte autant que la destination, le tout en à peine 200 pages.
Tout se joue à échelle humaine. L’isolement du domaine familial ou la lenteur des saisons contribuent à instaurer une ambiance feutrée. Le fantastique se manifeste à la marge et laisse le doute persister. Ce parti pris fonctionne bien, et donne au roman une tonalité délicate, qui le distingue de récits disons plus grandiloquents.
Les oppositions entre Ronce et Épine se dessinent davantage dans les gestes et les non-dits que dans de longues confrontations. Cette retenue émotionnelle pourra en laisser certains sur leur faim, mais elle offre aussi une lecture plus nuancée des liens familiaux, où l’affection n’exclut pas les tensions. Côté style, l’autrice manie une langue travaillée. Cette application souvent bienvenue pour poser l’atmosphère donne parfois lieu à des effets un peu appuyés. Certaines images se répondent d’un chapitre à l’autre avec une insistance qui finit par affaiblir leur portée. On sent par moments que le texte veut trop en faire, au risque de ralentir le rythme ou de détourner notre attention. Ces “accrocs” de forme restent ponctuels, mais ils nuisent un peu à la fluidité d’ensemble.
Reste que Roman de Ronce et d’Epine possède une voix et une manière bien à lui de poser ses enjeux sans hausser le ton. Ce n’est pas un roman spectaculaire, ni un conte retors, mais une fable où les trajectoires se dessinent lentement si on accepte que toutes les questions ne reçoivent pas de réponse. Ce flou maîtrisé, loin d’être un défaut, fait aussi la force du texte.
En somme, une proposition un peu à part : sensible, bien construite et portée par une plume prometteuse.

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