La deuxième saison de Locke and Key, l’adaptation chez Netflix du comics de Joe Hill et Gabriel Rodriguez, aurait très bien pu être la dernière : Dodge était vaincue et les héros éprouvés mais saufs pour la plupart.
Comme une troisième saison était déjà annoncée pour boucler la série et que le dernier épisode s’intitulait Cliffhanger, on n’était cependant pas pris au dépourvu de voir dans les dernières minutes un nouvel antagoniste lâché sur Matheson qui promettait d’être fort peu intéressant.

Le Bilan

Cette promesse est hélas tenue. Le personnage de Frederick Gideon, horrible officier britannique ayant sévi durant la Guerre d’Indépendance et possédé par un horrible démon (la seule différence dans cette transformation est donc qu’il est devenu très fort et invulnérable, un méchant complexe, comme on le voit) est incarné par un Kevin Durand qui grimace en permanence et se révèle plus crispant et ridicule qu’inquiétant. Ses sous-fifres ne valent guère mieux donc la faute en revient peut-être surtout à une direction d’acteurs discutable mais un méchant lamentable n’augure pas d’une saison réussie ou qui au moins hausserait le niveau après les deux précédentes au bilan mitigé.

On repart ainsi pour un dernier tour de piste qui a le bon goût de ne durer que huit épisodes au lieu des dix habituels, d’une durée raisonnable qui plus est, celle-ci excédant rarement les quarante minutes. Le rythme est généralement soutenu malgré un épisode final où tout se règle dans le premier quart d’heure, auquel succèdent vingt bonnes minutes durant lesquelles les protagonistes se tombent dans les bras et se félicitent les uns les autres. Un défaut déjà présent la saison précédente. Pour ce qui est de l’intrigue générale, on reste désormais en terrain connu. Les personnages découvrent quelques nouvelles clés, les utilisent de manière déraisonnable et s’attirent des ennuis tandis que Gideon rôde autour de leur maison, nourrissant de sinistres desseins. Il va se dévoiler au grand jour, menacer pour qu’on lui donne des clés et tout le monde va courir partout dans tous les sens. Rien de bien original et l’inventivité qui provenait en grande partie de l’œuvre d’origine n’est plus du tout au rendez-vous. De cette dernière ne reste que des bribes, comme la possession de Bode par Dodge, qui est amenée de manière particulièrement stupide et n’est qu’une péripétie parmi d’autres alors qu’il s’agissait d’un passage important et inquiétant du comics. De plus, encore une fois les scénaristes édulcorent énormément le propos, Dodge/Bode commettant en définitive peu de dégâts.

Outre Kevin Durand qui cabotine dans le mauvais sens du terme, il n’y a pas grand-chose de notable à relever dans l’interprétation générale, au diapason des saisons précédentes. Darby Stanchfield continue de sourire béatement pour un oui ou pour un non, le Bode de Jackson Robert Scott donne encore trop souvent l’impression d’être un adulte miniature (il conduit même des engins de chantier, qu’est-ce que ce gamin ne peut pas faire…) pour que son personnage soit crédible et perde de son côté agaçant, Kinsey pousse la chansonnette histoire de mettre à profit les cours de chant qu’Emilia Jones a pris pour Coda et le reste du casting ne s’en tire pas mal tout en étant extrêmement lisse.

Les rares qualités restantes sont celles relevées dans les saisons précédentes et qui sont toujours présentes : le décor de la maison et de la baie de Matheson et la bande originale mais on s’y est habitué depuis belle lurette et cela reste trop peu pour s’enthousiasmer. Au mieux, si l’on aborde la série pour ce que Meredith Averill et son équipe en ont fait, un spectacle visant en priorité de jeunes adolescents qui évacue les points les plus sombres du comics, le résultat n’est pas entièrement déplaisant. Néanmoins, vu le matériau d’origine et les possibilités offertes, il est difficile de ne pas déplorer un résultat aussi répétitif et lénifiant.