Alors que 2022 se termine à peine, quel serait votre premier bilan, à chaud, concernant votre maison ou même la situation globale de l'édition en Imaginaire ?
Nouveaux Millénaires s’est installée dans un rythme plus lent, qui correspond davantage à la littérature qu’elle veut publier : des livres intemporels, qui entendent laisser la place à la réflexion, loin de la course à la nouveauté. Ce rythme plus mesuré – quatre à cinq titres par an – nous permet aussi de mieux nous concentrer sur chaque lancement. On constate d’ailleurs une baisse drastique des parutions et des investissements sur la science-fiction à l’étranger, dans les pays anglo-saxons notamment. Paradoxalement, les gens s’intéressent de plus en plus à la SF au cinéma et à la télévision, mais de moins en moins aux livres. Face à ce ralentissement du marché, J'ai lu prend le parti de faire moins, mais mieux.
Avez-vous retenu un événement ou une décision particulièrement marquants ? On songe à la flambée du prix du papier, mais il peut s'agir d'autre chose, évidemment.
Les problèmes de papier sont évidemment au cœur de toutes nos inquiétudes. Son prix, bien sûr, qui a entraîné une hausse conséquente du prix de vente des livres, mais aussi sa disponibilité. Alors que les grands groupes ont un temps été épargnés par ces problèmes d’approvisionnement (du fait de capacités de stockage plus importantes que les éditeurs indépendants), ils sont aujourd’hui impactés au même titre que les autres. Cela ne remet pas en cause le programme de parution des nouveautés, mais cela conduit parfois à des arbitrages sur les réimpressions, qui peuvent être différées ou tirées plus court. Jusqu’à maintenant, nous n’avons pas à déplorer de livres manquants, mais uniquement grâce au travail d’équilibriste des fabricants et des imprimeurs. La situation reste tendue.
Quelle place pour la fantasy dans votre programme 2023 ?
Nouveaux Millénaires publie quasi exclusivement de la science-fiction, mais il y aura bien deux titres de fantasy en 2023, et pas des moindres.
Simon Jimenez, l’auteur remarqué de ''Cantique pour les étoiles'', revient, cette fois avec un roman de fantasy d’une ambition folle – une véritable expérience de lecture, qui s’intitulera ''Le Pays sans lune''. L'intrigue est relativement classique : deux jeunes héros – ou antihéros, c’est selon – délivrent une divinité tutélaire, laquelle cherche à se venger de la famille impériale qui l’a enchaînée pour accaparer ses pouvoirs. Mais la façon de raconter cette intrigue et le décor dans lequel elle se déroule sont, à ma connaissance, complètement inédits. Il faudrait presque inventer une nouvelle étiquette : la hard fantasy, comme il existe de la hard SF. Ce récit risque de désarçonner plus d’un lecteur – comme je l’ai moi-même été à la première lecture – et d’en émerveiller beaucoup – comme je l’ai moi-même été à la deuxième lecture ! Bref, rendez-vous le 18 avril 2023 chez votre libraire.
Le second roman de fantasy, qui paraîtra lui en mai, est le deuxième et dernier volet de la série ''Mégapole'' de N.K. Jemisin, qui s’intitulera Némésis de la cité, et qui relève davantage de la fantasy urbaine. Dans sa postface, l’autrice des ''Chroniques de la Terre fracturée'' explique que l’écriture de ce roman a été fortement perturbée par l’actualité (le Covid, les derniers soubresauts de l’ère Trump…), qui l’a obligée à complètement réinventer son histoire – au passage, ce qui était prévu à l’origine pour être une trilogie est devenu un diptyque. Le résultat valait la peine d’attendre, car le roman est nettement un cran au-dessus du premier volume.
Enfin, quel sera votre plus grand défi pour cette nouvelle année ?
Proposer des titres inattendus, découvrir de nouvelles plumes éblouissantes et faire vivre cette formidable littérature qu’est l’imaginaire – bon, comme tous les ans, en fait ;-)
''Propos recueillis et mis en forme par Emmanuel Chastellière''.
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