Troisième livre critiqué d’Abraham Merritt, Les Habitants du mirage ne se démarque pas par sa singularité. L’auteur réutilise avec brio sa recette bien particulière. Leif est un héros bourru aux gros bras, mais prêt à tout pour sauver sa belle. A ce stéréotype de l’Heroic Fantasy, l’auteur a su ajouter une certaine dose de spiritualité, de magie. Cela reste certes minime, mais n’en constitue pas moins un plus.
La psychologie des personnages occupe donc une part plus importante. La double personnalité (on pourrait parler de possession) de Leif est particulièrement bien abordée. Le coté sombre de Dwayanu donne froid dans le dos et les sacrifices qu’il célèbre à l’attention d’une divinité dévorante nous entraîne dans les abîmes de la Dark Fantasy. Si les autres personnages sont plus classiques, ils restent cependant efficaces. Notamment Jim le cherokee qui accompagne Leif dans son exploration. Son coté indien, sa sagesse arrive à se faire sentir malgré son rôle de second plan.
Pour le reste, il y a que peu de changements notables. L’histoire débute toujours dans notre monde, à une époque située au début du XXème siècle. Le héros par suite d’une découverte quelconque se retrouve emporté en un lieu préservé du passage des années. Les habitants ont été préservés, et c’est à ce niveau là que l’on peut faire le lien avec la fantasy moderne et ses créatures mythiques. La prose de l’auteur nous rappelle bien vite pourtant que ce n’est point une œuvre actuelle. Subtil mélange de termes sur lesquels la poussière s’accumule depuis de longues années, utilisations de répliques que l’on croirait sorties de l’age d’or du cinéma en noir et blanc, le livre a une personnalité propre, loin des conventions actuelles.
En conclusion, Les Habitants du mirage est de loin le plus abouti des romans de Merritt. Plus complet, plus fignolé que les précédents, l’œuvre se révèle très plaisante à lire. Elle constituera un très bon choix pour quelqu’un qui recherche un livre classique sans l’être.
— Luigi