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Quand vient la sorcière

Pas de couverture

Résumé

JE NE SUIS PAS MA MÈRE.
JE NE SUIS PAS SA CRÉATURE.
JE NE LUI APPARTIENS PAS.

Dans la maison de Cordelia, aucun secret n’est permis et les portes doivent toujours rester ouvertes. À la moindre désobéissance, sa mère Evangeline, qui détient une magie que l’on croyait disparue depuis longtemps, l’oblige à demeurer immobile et muette des heures, parfois des jours entiers…
Quand des morts suspectes frappent leur village, cette dernière entraîne sa fille dans une fuite nocturne qui les mène jusqu’à un manoir isolé, demeure d’un riche propriétaire, le Squire, et de sa sœur Hester. Car Evangeline est bien décidée à piéger le Squire dans un mariage afin de se mettre à l’abri du besoin.
Mais Hester, pressentant le danger imminent, met au point son propre plan pour la contrecarrer, avec l’aide de ses amis de longue date et de Cordelia, qui va devoir trouver la force d’affronter sa mère et son terrible pouvoir. Ensemble, parviendront-ils à arrêter Evangeline avant qu’il ne soit trop tard ?

Caractéristiques

Auteur(s): T. Kingfisher
Traducteur(s): Camille Filhol
Type: Roman
ISBN: 9782386431951
Titre original: A Sorceress Comes to Call

Chronique

Sous le pseudonyme de T. Kingfisher, l’autrice américaine Ursula Vernon poursuit une œuvre singulière, à la frontière du conte et de l’horreur. Après le réjouissant Nettle & Bone : Comment tuer un prince, qui revisitait la fantasy avec un humour macabre, Kingfisher s’attaque ici à une autre forme de fable : celle du pouvoir et de l'emprise.
Dans Quand vient la sorcière, une femme et sa fille s’installent dans la demeure d’un notable campagnard. La mère, Evangeline, possède une beauté et un magnétisme qui séduisent aussitôt son entourage. Sa fille, Cordelia, peine à trouver sa place face à d’une mère qui ne se contente pas d’imposer sa volonté : elle peut littéralement la contraindre à agir contre son gré. À l’écart du tumulte, Hester, la sœur du maître des lieux, observe... Notons que le roman est une revisite d'un conte des frères Grimm, La Petite Gardeuse d'oies, et ne s'en cache pas.
Il use de cette tension lente propre à Kingfisher : une atmosphère feutrée, où l’horreur se trahit dans les gestes ordinaires, sans magie spectaculaire. L'autrice préfère la banalité du mal, ancrée dans le quotidien, qui se retrouve éclairée d’une lumière inquiétante.
Hester est un très beau personnage : femme d’âge mûr, prudente mais déterminée, elle incarne une résistance calme et lucide. Face à elle, Evangeline est d’une froideur glaçante, l'incarnation faite chair de la volonté de domination, méthodique, absolue. Entre ces deux pôles se tient Cordelia, jeune fille prisonnière de son propre corps, dont l’émancipation progressive donne au récit sa couleur.
T. Kingfisher alterne frisson et ironie avec aisance. Ses dialogues, souvent savoureux, désamorcent la peur au moment précis où elle devient insoutenable, sans jamais trahir le propos, souvent très dur. L’équilibre est d’autant plus remarquable que l’autrice aborde donc des thèmes difficiles et complexes, l’abus, la dépossession de soi, sans jamais verser dans le pathos. Elle propose un mélange de tendresse et de cruauté qui offre à l'illustration de ses douleurs intimes un contrepoint humain.
Quelques lecteurs pourront trouver la première moitié un peu lente, tant l’autrice prend le temps d’installer ses personnages et leur univers, qui tient à peu de choses. Mais cette patience paie : lorsque la confrontation éclate enfin, elle a de quoi marquer. Le dénouement, à la fois sobre et libérateur, sonne juste.
Avec Quand vient la sorcière, T. Kingfisher s'affirme comme l’une des voix les plus originales du moment. Derrière l'accroche éditoriale et l'étiquette cosy horror qui a de quoi faire lever les yeux au ciel, elle interroge la manière dont on reprend possession de soi, de son corps et de sa parole. 
Une histoire qui se veut à la fois sombre, drôle et profondément humaine. Bref, du Kingfisher.

Gillossen

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