Les Portes de Lumière de Vajra Chandrasekera est un roman se distinguant vite par la qualité de son écriture et la profondeur de son univers, mais qui s'avère parfois tout bonnement... pontifiant, aussi bardé de prix soit-il.
L'intrigue suit Entrave, un personnage complexe au destin marqué par de vifs conflits internes et sa lutte contre des forces qui le dépassent. Luriat, la ville où se déroule l'histoire, est un lieu étrange où cohabitent des factions religieuses, des prophéties obscures et une architecture fascinante, créant une toile de fond réussie. Le style de Chandrasekera mise sur une prose lyrique, imprégnée de poésie. Ses descriptions, souvent longues, plongeront les lecteurs réceptifs dans une atmosphère dense et envoûtante.
Cependant, cette richesse peut aussi devenir un obstacle : le rythme s'en ressent, et certains passages semblent s'étirer, ralentissant la progression du récit. Si cette approche immersive plaira aux amateurs de "belles lettres", elle pourra en revanche décontenancer ceux qui préfèrent une narration plus directe.
L'exploration des thèmes politiques et religieux est l'un des points forts du roman. L'auteur s'interroge sur le fanatisme, la manipulation et le pouvoir à travers une galerie de personnages intrigants, qui incarnent différentes facettes de ces problématiques. Pourtant, ces réflexions, bien qu'intéressantes, alourdissent parfois le récit au gré de ces digressions philosophiques, et ce pour ainsi dire de bout en bout. Le côté premier roman ? On se retrouve face à une œuvre qui préfère la contemplation, ce qui est un choix parfaitement valable mais risqué, car exigeant une exécution parfaite et pas juste assumé.
En somme, Les Portes de Lumière est un roman ambitieux, qui séduira les lecteurs appréciant les récits denses et poétiques, où l'ambiance et la réflexion priment sur le rythme et les rebondissement en pagaille. Les écarts introspectifs priment (malgré ce que pourrait laisser penser la quatrième de couverture !), demandant une certaine attention, mais qui récompenseront, sans doute, ceux qui accepteront de se laisser porter, plutôt qu'emporter.
— Gillossen