Il arrive quelques fois où le chroniqueur littéraire se retrouve impuissant, enchainant les brouillons sans pouvoir réussir à expliquer pourquoi il a aimé ou non telle ou telle lecture. Et si on arrive la plupart du temps à mettre nos idées et nos arguments en ordre, il reste quand même certaines exceptions où les mots ne suffisent pas à exprimer notre ressenti. Pour moi, ce Chant des Géants de David Bry est de ceux-là.
Je pourrais vous parler de l’univers intriguant d’Oestant, monde issu des rêves de trois géants. Des personnages qui peuplent cette île, avec qui nous évoluerons tout au long de l’histoire, et que nous apprendrons à aimer et à haïr. De cette mystérieuse brumenuit, à l’origine inconnue, qui menace de tout engloutir. Du rythme du roman, qui alterne entre batailles furieuses et dialogues ciselés. Des rebondissements qui prennent le lecteur à contre-pied. Que ce Chant des Géants est un roman qui montre que la fantasy classique en a encore sous le pied. La narration originale qui renforce le côté « légende au coin du feu ». Des immortels qui gardent les géants Baile, Leborcham et Fraech, et qui semblent tirer les ficelles du monde. De la place particulière laissée à la musique.
Mais tout ceci ne suffirait pas à rendre hommage au texte.
Je me contenterais donc de simplement écrire ceci : ce livre est beau.
Déjà l’objet en lui-même, grimoire gravé de runes dont on sent au premier toucher qu’il recèle une pépite comme on en lit rarement. La preuve que l’on peut juger un livre à sa couverture. Cet écrin, véritable invitation au rêve, titille notre imagination avant même d’avoir lu la première ligne du roman. Et une fois ceci fait, impossible de décrocher.
Car cette histoire vous prendra aux tripes, vous fera aimer et vous infligera des peines qui resteront gravées longtemps dans votre cœur. On pourrait objecter en disant ceci que ces mots sont forts, peut-être trop en fonction de la sensibilité de chacun. Mais si le texte captive autant, c’est parce que nous n’avons pas ici une « simple » histoire de héros.
Certes, les mythes et la magie sont au cœur d’Oestant. Cependant, les protagonistes du roman sont avant tout… des hommes. Qui vivent, se battent, aiment et meurent. Ce qui rend le roman d’autant plus beau. David Bry nous prend, littéralement, par les sentiments. Et les brisent, encore et encore. Car cette histoire pourrait être la nôtre, à nous tous. Rien ne se passe jamais comme prévu, et peu importe les prophéties d’un vieux sage qui semble aussi vieux que le monde.
En un peu plus de 300 pages, David Bry nous offre ce que la Fantasy a de meilleur. Et nous rappelle pourquoi nous en lisons : pour vivre des histoires comme ce Chant des Géants. Tout simplement.
— gilthanas