Une fillette pas encore dans l'adolescence réellement et terriblement loin des adultes, une maison mystérieuse avec un passé déchu et les livres comme seule compagnie amicale. Le point de départ de ce roman est classique, amer, avec cette jeune héroïne qui ne trouve pas sa place, et réconfortant également car il peut rappeler d'autres histoires lues et aimées.
Deux voyages dans le temps sont donc disponibles au prix d'un puisqu'il s'agit tout d'abord de plonger dans une certaine ambiance, celle des années soixante vues par les yeux d'une enfant. Le portrait de la Louisiane de cette époque n'est pas très développé mais pourtant suffisant avec l'importance encore des vieilles familles, les préjugés raciaux ancrés dans les façons de penser et qui se transmettent par l'éducation, la place des femmes... Tout pour nous faire comprendre le malaise de Sophie dans sa propre époque alors même que le divorce chamboule sa famille.
Elle imagine le passé lointain comme un endroit heureux puisque tous les anciens semblent le regretter et pense pouvoir y vivre les aventures qu'elle mérite sauf que...sauf que non.
Débrouillarde, attachante, Sophie est une héroïne que l'on prend plaisir à suivre, perdue dans des événements trop grands pour elle et que jamais elle ne maîtrisera totalement. Jeune encore, elle ne tombe pas dans le piège de ces personnages trop effrontés et n'a parfois d'autres choix que de se plier aux événements puisqu'elle ne peut tout en comprendre.
Lorsque la plantation nous arrive tout à sa gloire, alors que le spectre de la guerre de Sécession s'annonce pourtant, plusieurs formes de violences se mettent en place. Il y a le fouet bien sûr, les coups, bien que le maître de la plantation se considère comme moderne et bienveillant, mais il y a aussi la violence psychologique, être dénué d'une identité propre, d'une vie et des décisions la composant pour ne simplement être qu'une tête parmi d'autres, dépendant du maître et de sa famille. Les quelques remarques amicales, gentilles, que Sophie reçoit parfois en tant qu'esclave sont doucereuses, cyniques, faites également pour lui rappeler qu'elle vaut moins qu'une personne libre. Le livre n'hésite pas à se montrer dur sans pour autant se complaire dans les événements. Un parfum surnaturel flotte avec le vaudou et l'étrange créature responsable de toute cette situation...
On pourra déplorer une dernière partie peut-être un peu brusque, nous laissant aussi désorienté que l'héroïne mais au final, Le Labyrinthe vers la liberté nous raconte comme une fillette devient jeune femme et l'importance d'exister par soi-même, pour soi-même que cela soit à notre époque, dans les années soixante ou bien dans cette Amérique juste avant la Sécession.
— Nephtys