Lorsque l’on est une auteure réputée pour la noirceur de ses écrits, la violence de ses univers et le sort souvent impitoyable réservé à ses personnages, que faire quand on souhaite apporter un peu d’optimisme et de candeur à son œuvre ? La réponse pour Victoria Schwab ne réside pas dans le YA (ses romans destinés aux jeunes adultes sont à peine moins cruels et implacables que ceux qui s’adressent aux plus âgés), mais bien dans le roman jeunesse pur et dur.
Étant donné le public visé, ici, point d’univers fantasy creusé ou d’univers post-apocalyptique à la limite de la dystopie. Les prémisses de la série sont donc cette fois plutôt basiques (Cassidy a vu la mort en face ; Cassidy peut désormais passez « de l’autre côté » et parler aux fantômes ; Cassidy doit faire face à un fantôme pas sympa par tome), mais elles ont depuis longtemps fait la preuve de leur solidité et de leur efficacité. En revanche, pour un lecteur de plus de 12 ans, ni l’univers, ni le scénario lui-même ne recèle la moindre surprise.
La véritable originalité de cette saga jeunesse réside dans la série TV sur les fantômes que réalisent les parents de Cassidy, et qui offre à Schwab une excellente excuse pour présenter à son jeune lectorat des villes réputées pour leur densité de fantômes au mètre carré : Édimbourg (où l’auteur réside d’ailleurs) et ses cimetières, puis Paris et ses catacombes, avant d’explorer La Nouvelle-Orléans et ses légendes vaudoues dans le tome 3. Toutefois, vu l’épaisseur des romans (à peine 300 pages chacun en VO, et il faut bien caser un scénario là-dedans), les visites se font un peu au pas de charge et on passe d’un site touristique à l’autre sans vraiment creuser l’histoire et les légendes qui s’y rattachent. Pas vraiment un problème lorsqu’on connaît les villes en question, mais la lecture peut laisser un arrière-goût d’inachevé dans le cas contraire.
Même si le style de l’auteure n’est pas aussi travaillé que dans ses romans pour adultes, il reste impossible d’accuser Schwab de mal écrire. Les romans se lisent très vite et la série ne devrait pas tirer en longueur, dans la mesure où le périple de la famille Blake est limité aux vacances d’été de Cassidy. Cette dernière et son ami Jacob (qui prend de l’ampleur dans le tome 2) sont d’ailleurs terriblement attachants, même si on peut reprocher à l’auteur d’avoir sombré dans un travers propre à la littérature jeunesse : les enfants sont tous extraordinairement dégourdis, et les parents, un brin aveugles et pas très futés.
Vous l’aurez sans doute compris, à l’âge canonique de l’auteure de cette chronique (pourtant grande admiratrice de Schwab en temps normal), difficile de se laisser vraiment emporter par les aventures fantomatiques de la jeune Cassidy. Mais les plus jeunes, eux, devraient y trouver leur content d’aventures et de (gentils) frissons.
— Saffron