The Winter Road d'Adrian Selby n'est pas le premier roman de l'auteur (c'est le deuxième), mais, visiblement, une version "peaufinée" de celui-ci à bien des égards, même si l'histoire est différente. On retrouve en effet à peu près les mêmes ingrédients que dans Snakewood, paru deux ans plus tôt chez Orbit lui aussi. Mais ce que le roman gagne en cohérence, il le perd peut-être en "originalité". Si l'on peut parler d'originalité pour tout ce qui touche au fameux "Grimdark". C'est un courant dont les auteurs arpentent encore et toujours le même sillon, peut-être plus encore que dans les autres branches du genre, qui ont eu le temps de se diversifier un minimum avec le temps. Avec le Grimdark, c'est toujours la même histoire : de la violence, une atmosphère qui sent bon le désespoir, des personnages en bout de course, qui ne cherchent d'ailleurs pas forcément la rédemption... Oui, les ingrédients sont à peu près toujours les mêmes, quels que soient le roman ou l'auteur.
Dans le cadre de The Winter Road, on peut au moins affirmer que le résumé et l'illustration de couverture donnent clairement le ton et dévoile un aperçu du livre conforme à sa lecture, sans même mentionner l'accroche, qui évoque davantage une série B d'action qu'autre chose - dommage pour le roman. C'est en tout cas une lecture qui n'est pas désagréable en soi, mais jamais très prenante. Il faut dire qu'une partie de l'intrigue se déroule au gré d'analepses et que ces passages ne sont pas les plus prenants de l'ensemble, nous coupant régulièrement dans notre élan, chaque fois que ce qui se passe dans le temps présent du récit paraît sur le point de pouvoir s'emballer dans les pas de Teyr, un personnage féminin fort au passé marqué, mais ce qui ne l'empêche de vivre intensément son présent.
Les autres protagonistes, sans doute pour certains trop vite esquissés, sont plutôt bien campés eux aussi et leurs destins croisés se suit d'une traite, pour peu que le sang et la violence ne vous rebutent pas. Après tout, oui, c'est du Grimdark, on l'a déjà dit et on le répète avec à peu près la même insistance que le contenu du roman lui-même.
Mais, une fois parvenu au bout de The Winter Road, le sentiment dominant n'est autre que celui, non pas d'une certaine fadeur, mais d'une absence d'implication. Comme si l'on avait traversé cette histoire de bout en bout, en se laissant porter, et ce malgré un style et une narration volontairement décousus peut-être mais décousus malgré tout, le tout sans jamais s'impliquer.
Ce qui est tout de même dommage, surtout pour un récit qui "mise" autant sur le contraire, c'est à dire une implication presque viscérale.
Bref, un roman qui ne démérite pas, mais qui ne se distingue pas vraiment de la masse des sorties en langue anglaise. Même si l'on perçoit tout de même une voix, qui demande encore à s'affirmer, dans le vent qui souffle entre les arbres...
— Gillossen