Vous avez probablement déjà croisé la route de L'Âge d'or si vous avez fait un tour en librairie depuis la rentrée.
Cette bande dessinée signée Roxanne Moreil et Cyril Pedrosa (sans oublier la contribution de Claire Courrier à la couleur, pour aider à une partie de l'album) n'a pas manqué en effet de faire parler d'elle, essentiellement en bien, pour ne pas dire plus.
Qu'ajouter à tout ce qui a donc pu déjà être dit un peu partout depuis la sortie de l'album ? Sur plus de 200 pages, c'est surtout le graphisme et la mise en couleur justement qui attirent immédiatement l’œil du lecteur et ne nous lâchent pas, nous fascinant de bout en bout. Il est rare de trouver une approche aussi singulière et une patine comme celle-ci, qui s'adapte à tous les tons. On se surprend à chasser le détail, à observer la moindre nuance. Les auteurs expliquent s'être inspirés des enluminures et des tapisseries médiévales et on peut dire que c'est un choix payant.
Mais L'Âge d'or a aussi été loué pour son scénario et surtout le choix de ses thématiques : le poids des conventions sociales, la place des femmes ou bien encore l'aspiration au changement, qu'il soit intime ou d'une portée plus sociétale. D'aucuns ont qualifié ce royaume en proie aux troubles d'univers s'apparentant à un "Moyen-Âge laïc et pourtant enchanté", et difficile de ne pas souscrire à cette vision, qui fait de cet album une chanson de geste féministe. La dimension politique, utopique de l'histoire se mêle avec une réussie certaine à ce qui se rapproche finalement d'une quête assez traditionnelle là aussi (au premier abord du moins). Cela étant, ce sont bien justement les intentions des auteurs et les thèmes mis en avant qui nous frappent par leur ambition, plus que la narration proprement dite, finalement assez classique. Il faut dire aussi que c'est une première partie ! Et la fin de l'album se conclue par un vrai cliffhanger, pas une simple pause. Eh oui. Dès lors, impossible de porter un jugement définitif sur l'ensemble, même si on imagine mal une conclusion expédiée ou bâclée.
Pour le moment, il faut donc se laisser porter par les aventures des différents personnages, pour la plupart là aussi des figures classiques et évoluant tous en orbite autour de la princesse Tilda (à l'évolution marquée), mais dépeints avec justesse et sans fard. Souvent touchants, parfois cruels ou au contraire amusants, mais avant tout terriblement humains, ils constituent toutes et tous un autre point fort de cet imposant album, qui s'impose au bout du compte avant tout par sa richesse débordante.
Les auteurs ont pensé leur diptyque d'un seul tenant, avec quatre parties structurées comme quatre saisons. A ce premier tome - globalement - lumineux, les auteurs ont d'ores et déjà annoncé un second tome plus "crépusculaire".
On l'attend.
— Gillossen