« Le Nightside regorge de malédictions, de prophéties, d’intrusions et d’interventions divines ou diaboliques. »
John Taylor est détective privé, né dans le Nightside d’une mère non humaine et d’un père « normal », quoique alcoolique. Cela lui vaut des pouvoirs dont on ne sait pas grand-chose, sinon qu’il peut retrouver tout et n’importe quoi. Comme beaucoup de privés de littérature, il est endetté, célibataire et crèche dans son bureau faute de mieux. Bref, jusque-là, on est dans les canons habituels pour ce genre de personnage, y compris dans le ton mi-gouailleur mi-désabusé (et mi-ours derrière).
Taylor n’a pas foutu les pieds dans le Nightside depuis cinq ans et n’a pas l’air franchement pressé d’y retourner. On ne peut pas dire que ses affaires marchent très fort, quoi qu’il en soit : difficile donc de faire la fine bouche quand se présente une cliente à la plastique avantageuse et au portefeuille bien garni dont la fille a mis les voiles. Madame est prête à tout pour retrouver sa progéniture, et elle a les moyens qui vont avec ses exigences. Taylor accepte donc la mission. Après tout, si la demoiselle est introuvable, c’est parce qu’elle a trouvé refuge dans ce fichu Nightside, et qui mieux que notre privé pourrait remettre la main sur elle ?
Cette première enquête sert donc plus ou moins de prétexte pour aller explorer cette facette obscure de Londres. On y découvre le lieu et ses particularités (du moins, une partie, puisqu’il est vite évident que tout ou presque peut y advenir), quelques adresses bien spécifiques et une poignée de personnages qu’on s’attend à retrouver par la suite. Le ton est posé : l’univers du Nightside s’annonce sombre et peuplé de créatures aussi diverses que potentiellement dangereuses. Il semblerait qu’on s’y trucide aussi avec une certaine allégresse.
Si l’on ne tient clairement pas un chef-d’œuvre dans les mains, Vieux démons se laisse lire avec plaisir entre deux lectures plus exigeantes, pour peu que l’on aime se détendre les neurones en suivant des enquêteurs un brin désabusés qui trimbalent leur mal-être comme s’il s’agissait de leur t-shirt préféré. John Taylor n’est sans doute pas le spécimen le plus marquant des privés de fantasy, mais ça ne le rend pas moins sympathique pour autant et l’univers dans lequel il évolue se révèle suffisamment intéressant pour qu’on ait envie d’en explorer les possibilités.
L’ensemble remplit très correctement ses objectifs, et on en ressort en se disant qu’on reprendrait bien une petite part de ce Nightside, à l’occasion – mais seuls trois tomes sur douze sont disponibles en français.
— Erkekjetter