Qu'on se le dise tout de suite : Arcadia est le genre de roman qui n'hésite pas à mettre les deux pieds dans le plat pour se dévoiler à nous. Le sens du drame est ainsi fortement présent dans cette histoire double et il faut accepter de jouer le jeu de l'excès pour pouvoir pleinement continuer sa lecture.
Parce que oui, les personnages en font beaucoup, beaucoup trop même selon les avis, mais le drame est bien ce qui reste à chacun d'eux pour exister, puisqu'ils ne peuvent plus rêver. Lettre d'amour à l'Angleterre victorienne et ses artistes, lettre d'amour à l'art en général quel qu'il soit et surtout, lettre d'amour aux contes et légendes et au mythe arthurien, Arcadia se veut poétique, y réussit. L'univers victorien fantasmé est ainsi rempli de petits détails épars qui appellent à la rêverie, alors qu'une menace étrange s'immisce, mais que les personnages appréhendent avec un flegme tout britannique.
La partie moderne avec ce Paris proche de l'extinction est peut-être la plus exagérée au final, avec des personnages plus têtes à claques que ceux que l'on suit dans la partie victorienne. Pourtant, on tourne les pages quand même, on veut savoir parce qu'il y a quelque chose d'enchanteur à tout cela, d'hypnotique.
Généreux, excessif quitte à trébucher sur ses propres pages, le livre sait nous présenter une folie douce qui intrigue, interpelle et semble toucher du bout des doigts quelque chose de propre aux rêves.
Arcadia illustre finalement une imagination débridée qui n'a pas peur de trop en faire, non pas par des batailles immenses mais par des sentiments, des destinées et des fatalités tout aussi épiques et surtout mélodramatiques.
Roman étrange qui se veut également une ode mi-pudique, mi-canaille à la fraternité, même ses scènes intimistes ont un parfum de « presque trop » (ou de « beaucoup trop » pour ceux qui n'arrivent pas à accrocher).
Capable de réjouir par son lyrisme et d'enthousiasmer tout autant malgré des défauts plus ou moins gros, pour qui veut se prendre au jeu la lecture est fluide et dure un peu plus longtemps qu'un rêve.
— Nephtys