Après un premier tome nerveux et intelligent et un deuxième livre plus épique et philosophique, Matthew Stover démontre encore une fois avec Caine Black Knife qu'il n'a pas envie de se reposer sur ses lauriers avec les Acts of Caine. Dans ce troisième tome, l'auteur laisse de côté la multitude de points de vue et l'intrigue très dense de Blade of Tyshalle pour proposer quelque chose de plus court et dont la nervosité se rapproche plus de celle de Les Héros meurent aussi.
La structure même du roman est différente du reste de la série puisque la narration alterne entre passé et présent, entre une « rediffusion » de Retreat from the Boedecken, l'aventure qui a rendu Caine célèbre dans sa jeunesse, et un Caine plus âgé qui revient sur les lieux de son premier succès. Naturellement, les deux époques se répondent et le passé éclaire petit à petite les événements du présent. Caine Black Knife prend pour l'occasion les allures d'un roman noir hardboiled dans lequel le héros mène une courte enquête pour retrouver son « frère » ogrillo, se promenant dans une ville au bord de la révolte et rencontrant des personnages dont le destin a été brisé par Caine de nombreuses années auparavant.
Grâce à cette structure en miroir et à son faible nombre de pages, et bien sûr grâce à la plume toujours aussi bien aiguisée de Matthew Stover, Caine Black Knife apparaît comme un roman très rythmé, tendu et sans temps mort. Le tout est servi avec une narration intégrale de Caine à la première personne et, comme il s'agit d'un des personnages les plus charismatiques de la fantasy (oui, oui), le récit est ultra fun et jouissif. Le ton très mordant, bien présent dans Les Héros meurent aussi et plus effacé dans Blade of Tyshalle, fait donc son grand retour et l'aspect très resserré du roman n'en est que plus efficace.
L'intérêt de Caine Black Knife est aussi de quitter l'empire d'Ankhana pour découvrir une nouvelle région d'Overworld. Outre le fait que cela permet d'agrandir l'univers fantasy de Stover, ce décor inédit relance aussi tout un jeu d'intrigues, appuyé par une galerie de nouveaux personnages, là où Blade of Tyshalle se rattachait beaucoup aux événements et aux dynamiques des Héroes meurent aussi. Bien entendu, quelques têtes connues font leur apparition mais le tout reste néanmoins assez peu lié aux deux premiers tomes.
On regrettera cependant une fin un peu abrupte, même si elle a l'excuse de ne pas réellement en être une. En effet, une fois la dernière page de Caine Black Knife tournée, il faudra rapidement enchaîner avec Caine's Law qui est sa suite directe... ou presque.
— Merwin