Voilà plus de trois ans que le deuxième tome des Extraordinaires et fantastiques enquêtes de Sylvo Sylvain, détective privé, est sorti. Dire donc que l'attente pour la sortie de cette suite a été longue est un euphémisme, mais elle semble en avoir valu la peine car ce livre se renouvelle et rompt avec le style des deux premiers.
En effet, Confessions d'un elfe fumeur de lotus porte bien son nom car c'est à travers les réminiscences hallucinogènes générées dans une fumerie d'opium (pardon, de lotus) que Sylvo Sylvain nous entraine au temps de sa jeunesse dans les profondeurs de la forêt géante et vivante Toujours-verte. A travers de très courts aperçus du présent le lecteur est transporté dans un monde d'elfes et de forêts majestueuses certes plus classique mais qui s'avère des plus intéressant à découvrir. Ce n'est donc pas une enquête policière que nous suivons mais il s'agit plutôt d'un approfondissement du caractère névrosé et enclin au spleen de Sylvo Sylvain en découvrant au fur et à mesure les sombres raisons qui ont conduit le héros elfe à s'exiler dans ce Panam féerique du 19ème siècle. Cette plongée dans son passé éclaire les quelques bribes que nous avions eu dans les deux premiers volumes et enrichissent le monde inventif créé par Raphaël Albert.
Les amateurs de romans policiers fantastiques à la Garrett détective privé de Glen Cook seront déçus, et certains lecteurs risquent d'être déstabilisés par ce changement de style. Néanmoins, il s'agit à mon sens d'un tome nécessaire qui donne plus d'épaisseur au héros, d'un pari risqué de l'auteur qui vise à nous le rendre plus "humain".
Pour ce faire, Raphaël Albert prouve qu'il n'a rien perdu de son talent de conteur et c'est avec brio qu'il adapte son récit pour nous faire dériver dans le passé de son héros. Les premières et dernières pages du livre sont notamment d'une grande qualité et immergent le lecteur dans une atmosphère envoûtante.
Confessions d'un elfe fumeur de lotus souffre souffre cependant des défauts inhérents à ce type de récit, avec un rythme moins intense, plus lent, et une originalité moindre. De plus, il est dommage que l'intrigue nous offre au final peu de réelles surprises avec des rebondissements peut-être un tantinet trop conventionnels.
Nonobstant ces quelques défauts, Confessions d'un elfe fumeur de lotus se révèle un livre plaisant et bien construit qui ravira les amateurs de notre elfe détective - passé un temps d'adaptation - et qui ouvre de nouvelles perspectives pour la suite des aventures de Sylvo Sylvain.
— Belgarion