Lorsqu'une veille voisine oubliée de son enfance lui apprend l'existence d'un frère mystérieux dont il ne se souvent absolument pas, Charles Nancy ne s'attend sûrement pas à voir sa petite vie tranquille complètement bouleversée, et en à peine deux semaines qui plus est !
Et tout cela, il le doit donc à Neil Gaiman, qui signe là son retour au roman après les intermèdes comics 1602 ou Nuits Eternelles. Plus d'humour, mais surtout plus de légèreté... Ce roman est-il constamment empreint de gaieté pour autant ? Non. Un frère demi-dieu, c'est bien utile lorsqu'il s'agit de le faire passer pour vous au bureau, mais dès lors qu'il entreprend de vous remplacer également auprès de votre fiancée... De même que les rapports conflictuels entre un père et son fils, la critique cocasse de certains travers de notre société... Gaiman sait toujours conter des instants doux-amers, voire beaucoup plus amers que doux.
A vrai dire, l'auteur pratique encore et toujours le Gaiman. Avec un héros plus proche d'un Richard Mayhew que d'un Shadow, on retrouve notre monde, avant tout urbain, mais où la magie est encore présente, et plus qu'on ne le croit (de même que le poids de la mythologie). On retrouve aussi une plume caustique et volontiers un peu lointaine, et bien sûr, toute une brochette de personnages, à la Gaiman précisément : Gros Charlie le héros dépassé par les évènements, Daisy, l'inspectrice de police pince-sans-rire, Mr Coates, l'inénarrable employeur de Gros Charlie, maniaque dans tous les sens du terme, etc, etc...
Autant le roman s'apprécie, voire provoque de véritables éclats de rires (ah, méfiez-vous des pigeons, je l'ai toujours dit !), ou au contraire émeut, autant le lecteur aficionado de l'auteur ne risque pas d'être dépaysé ! De jolies scènes succèdent à des moments plus éprouvants, et l'on vient vite à bout des 14 chapitres du livre, fausse suite d'American Gods. Gaiman préfère d'ailleurs que l'on dise que ce dernier empruntait un personnage à un roman qui n'était pas encore écrit à l'époque !
Et en effet, Anansi Boys est donc très loin d'un American Gods 2, ce qui ne nous empêchera pas de souhaiter que l'auteur choisisse peut-être par la suite un projet un peu moins dans la continuité de sa bibliographie, mais version light...
— Gillossen