Il y a parfois des romans difficiles à critiquer. Ailleurs est de ceux là. En effet, si Salicande avait fait l’unanimité, le second tome divise les lecteurs.
Comment expliquer une telle divergence ? Et si tout était une question de ressenti ? Pauline Alphen a tenté d’écrire un roman ambitieux, définitivement tourné vers l’humain. Elle a calqué son écriture sur le rythme des émotions. Ainsi, alors que le premier tiers du roman se focalise sur les notions de perte et d’absence, l’écriture vole et s’affole au fil des pensées de Maya et Blaise. Puis le récit s’échappe vers cet Ailleurs, vers les Limbes, et le rythme ralentit. La plume se veut hésitante, dans l’expectative de ce qui attend Jad et Ugh. Enfin, alors que Claris se trouve dans les îles, l’écriture se fait indolente, chaloupée, suivant le rythme qui régit la vie des habitants.
Cette construction choisie peut autant toucher le lecteur que le déstabiliser. En effet, lorsque Jad et Ugh sont dans les Limbes, le lecteur peut se demander s’il n’est pas tout autant perdu que les personnages dans une intrigue qui ne se déroule pas. Et c’est bien là le nœud du problème.
Salicande se terminait sur une scène d’action haletante qui laissait le lecteur impatient de connaître la suite et le laissait espérer une explication – même partielle – du déroulement des événements. Or, il n’en est rien. Le récit semble quelque peu figé tant il se focalise sur les errances psychologiques et émotionnelles des personnages et non sur l’action.
Quant aux nouveaux personnages, Gabriel notamment, ils peuvent tout autant charmer le lecteur que l’agacer. Il y a sûrement quelque chose de plus grand, qui, une fois le cycle terminé, révèlera les liens de ce tome avec le reste de la saga. Mais pour le moment, d’aucuns pourraient se demander où souhaite les emmener Pauline Alphen.
En conclusion, Ailleurs est un tome différent, étonnant, parfois déstabilisant voire décevant pour le lecteur qui avait aimé Salicande. Est-ce un tome de transition ? En tout cas, il laisse en suspens bien des interrogations, tant sur l’histoire que sur la narration.
— Alethia