Le gros problème de certains ouvrages de Fantasy, c’est que, de temps en temps, leur couverture nous fait furieusement penser à d’autres oeuvres du genre. C’est précisément le cas de celle de Thongor, qui évoque inévitablement les "Conaneries", qui se sont succédées pendant des dizaines d'années dans l'unique but de surfer sur le succès du héros de Robert E. Howard, et ce malgré le talent d'Alain Brion qui signe dans le cas présent cette illustration.
Mais, naïvement, nous avons continué, car ce n’était peut-être qu’une coïncidence, un clin d'oeil assumé. Et après tout, d’autres auteurs ont mis en scène moult barbares et autres farouches guerriers avec beaucoup de réussite et de succès.
Bien que la quatrième de couverture nous dévoile de son côté un résumé de roman d'heroïc fantasy passe-partout, on se dit que cette lecture sera au pire sympathique, avec un parfum de pulp nostalgique, qui sied bien à la réédition de ce petit "classique" des années 60. Certes, il y a bien « l’avertissement » de l’éditeur qui nous indique que Lin Carter a travaillé avec Sprague De Camp sur Conan mais on se dit que le résultat ne peut pas être si terrible.
Malheureusement, c'est pourtant le cas. Le héros fait partie de ces caricatures tristement premier degré qui ont contribué à donner à la fantasy une image négative et fait naître tant de raccourcis à base de peaux de bêtes et de grosses épées. Bien que l'ouvrage ne descende tout de même pas non plus au niveau d’un Kothar le Barbare de Gardner Fox ou d’un Cycle de Gor de John Norman, Thongor est une déception sur plusieurs points.
Le premier, et non des moindres c’est que Thongor ne pense visiblement qu’avec son estomac et hausse constamment les épaules. Sans doute un tic. C’est peut être un détail mais la chose devient vite redondante, au point de véritablement agacer le lecteur. Les trois histoires réunies dans ce premier tome sont assez répétitives et l’on en vient vite à anticiper le déroulement de l’action car le scénario n'a rien d'original. N’essayez pas de trouver un rebondissement de dernière minute, il n’y en aura pas.
Mais ne soyons pas trop prompts à critiquer car il existe quelques points positifs. Outre une traduction révisée plutôt réussie, il y a toujours une bonne dose d’action dans le plus pur style "burné". Avis aux amateurs. On trouve aussi des personnages secondaires intéressants qui auraient pu se révéler vraiment accrocheurs si Lin Carter avait pris le temps de les développer un peu plus. Car même s’ils ont un potentiel, ce sera toujours Thongor qui fera le plus gros du boulot et sauvera le monde de ses gros bras musclés. Un schéma qui s’avère plutôt regrettable, car on aurait adoré voir ce dont étaient capables les compagnons de Thongor, qui semblent condamnés à rester dans un coin à ronger leur frein pendant les combats. Autre point, mais qui n’engage que moi, cette fois : certains héros grognent, d’autre poussent des cris de guerre ou des injures, Thongor, lui, chante. Certes, il est question d'un chant guerrier, mais il pousse la chansonnette tout au long du combat. Et je ne sais pas si vous avez déjà essayé de faire de l’exercice en chantant à tue-tête distinctement, mais on arrive vite à bout de souffle... Bref, une accumulation de travers parfois anecdotiques mais qui finissent de plomber l'ensemble.
Je conclurais donc en disant que n’est pas Howard qui veut et que ce Thongor évoque bien davantage un plagiat du Conan version Sprague de Camp… ce qui en dit long sur notre "héros".
— Asavar