Ce roman n'est pas édité chez L'Atalante, Mnémos, ou le Fleuve Noir. Pourtant, on peut juger qu'il a sa place ici, d'autant que son éditeur, Robert Laffont, ne cache pas jouer la carte du "merveilleux" pour ce qui est de la promotion de cet ouvrage. Cette dimension n'est d'ailleurs pas niée, même s'il faut bien reconnaître qu'elle demeure tenue, et bien peu au centre des préoccupations des personnages, comme de l'auteur. Mais on retrouve cela dit des épées magiques, une tête tranchée qui parle, ou bien un maître des djinns. Ces éléments/ingrédients de l'histoire ne sont jamais mis en doute ou tournés en ridicule, et l'auteur se dit lui-même grand fan de SF.
Ceci dit, au-delà de ce vernis fantasy, qu'en est-il du roman lui-même, bénéficiant d'une campagne de promotion autrement mieux rôdée que celle de la plupart des titres appartenant pleinement au genre, en dehors de quelques phénomènes ?
Il y a en réalité de quoi demeurer mitigé une fois le roman - un peu moins de 500 pages avec une police de belle taille... - refermé. David Camus s'est largement documenté et maîtrise son sujet, notamment d'habiles coups de coude à l'adresse de Chrétien de Troyes, difficile de le nier. Mais Les Chevaliers du royaume ne nous permet pourtant jamais de réellement entrer dans cette époque aux côtés des personnages, ne nous prend pas réellement aux tripes. Le résumé reste toujours plus excitant que le roman lui-même, ce qui est bien dommage.
Ce manque de souffle se traduit aussi par le biais d'un style clair, pratique, mais quelque peu plat et passe-partout. Il faut dire que toute l'affaire paraît déjà bien préparée, - jusqu'au découpage des prochains tomes, 5 au total... - et que l'on a parfois l'impression de se trouver devant le script prêt à tourner d'un énième blockbuster hollywoodien, où tout est calibré, sentiments, moments de bravoure, rebondissements calculé à la seconde près... Tout cela manque de saveur et de flamboyance, sans compter un manichéisme par moments un peu trop prononcé, là où les thématiques et les sujets de religion demeurent sensibles.
Attention, il n'empêche que le roman se lit plutôt bien, et que son dernier tiers s'emballe quelque peu, enfin. On sait déjà que le tome 2 se posera plutôt en préquelle, revenant sur la jeunesse de Morgennes... En somme, un livre programmé pour bien se vendre, qui ne volera pas son succès, mais qui ne tient pas toutes ses promesses.
— Gillossen