La première chose qui frappe lorsque l'on découvre Les Chaînes du dragon, c'est sa couverture. Sobre dans son manteau d'un blanc de neige, le squelette d'un dragon enchaîné s'y détache très distinctement. Et l'imagination du lecteur commence à s'emballer, exacerbée par un résumé alléchant au milieu de la profusion des sorties.
L'histoire débute au château de Hurog, un fief du royaume de Shavig, qui a connu des jours meilleurs. Il fut un temps où les dragons sanctifiaient le sol par leur présence. Mais cette époque est révolue depuis belle lurette ; le château n'est plus que l'ombre de lui-même et Fenwig le seigneur en titre se meurt suite à une chute de cheval. L'avenir s'annonce bien sombre pour son fils Stolon, grand dadais au cerveau fonctionnant au ralenti.
Ce décor n'est pas sans rappeler un certain Gormenghast dans ses aspects de décrépitude et de focalisation sur une vie de cour dont on sent obscurément qu'elle se pérennise plus par habitude que par un quelconque sens pratique. Mais le parallèle s'arrête bien vite, Patricia Briggs nous invitant à explorer plus avant son monde. Néanmoins, elle saura se débrouiller pour que l'ombre du château continue à planer tout du long sur l'histoire.
Cela nous amène tout naturellement aux personnages. La galerie de protagonistes est bien gérée, évitant la caricature et les stéréotypes même si certains clichés de la fantasy sont conservés. Sans entrer trop en détail dans l'évolution des différents rôles, on peut néanmoins souligner les rebondissements que provoqueront certaines révélations. Le tout est bien amené et saura surprendre les lecteurs un peu trop sûrs d'eux-mêmes et pensant être capables de discerner les bons des méchants d'un simple coup d'œil. Ces derniers sont d'ailleurs plus intéressants et crédibles que la moyenne. En se laissant aller, on pourrait dire que ce premier tome a un bouquet évoquant Le Trône de fer dans son entrelacs d'alliances, à une échelle cependant un peu plus réduite.
Le scénario quant à lui est assez linéaire, ce qui permet à Patricia Briggs d'offrir une histoire complète en un tome unique. Elle laisse cependant quelques fils pendre, et surtout des bases très saines pour poursuivre les découvertes de son monde lors d'un prochain tome. En attendant, elle offre ici un scénario bien rodé qui saura fidéliser le lecteur pour de nouvelles aventures.
Finalement, ce premier tome est à la hauteur de sa couverture, sobre mais minutieux. Cette série n'arrivera sans doute pas à s'imposer comme une œuvre phare mais elle possède bon nombre de qualités qui font défaut à d'autres. Si vous cherchez un bon roman de high fantasy, vous auriez tort de faire l'impasse. Pareillement, si vous souhaitez faire découvrir le genre, n'hésitez pas à l'offrir (et en plus il y a des dragons !).
— Luigi