Voilà donc traduit chez nous la tétralogie des Royaumes d'épines et d'os, dont le Roi de bruyère constitue le premier tome.
Le Roi de bruyère est le premier roman de fantasy qui éveille à ce point mon intérêt depuis fort longtemps. Je l'avais choisi car parmi les compliments dithyrambiques célébrant l'auteur et son histoire, j'avais relevé celui de Robin Hobb : "un excellent choix pour la personne qui apprécie une histoire centrée sur les personnages où la nature humaine et l'intrigue sont aussi captivants que les éléments de fantasy". Là, je me suis laissé nettement influencer. Et je dois dire qu'elle n'a pas tort.
Dès le prologue, je n'ai pas pu lâcher ce livre. Voilà un roman qui démarre très fort et donne une idée de ce qui va se passer deux milles ans plus tard.
L'histoire se concentre sur plusieurs personnages ; Aspar White, Neil MeqVren, Stephen Darige, et d'autres, réservant à chacun un ou plusieurs chapitres avant de passer au protagoniste suivant.
Le monde créé par Greg Keyes fourmille d'intrigues, de prophéties, de magies, mais le talent de l'auteur est de parvenir à assembler tous ces éléments familiers pour en tirer quelque chose de différent et prenant.
Certains trouveront ça convenu, mais je suis d'un avis contraire, on rentre dans l'ambiance tout de suite. C'est bien construit, captivant et on ne peut le lâcher que la dernière page lue.
Les grandes lignes de l'histoire de ce monde et de ses royaumes nous sont présentées par petites touches anodines au fur et à mesure qui le rendent vivant et crédible (même si le niveau technologique n'a pas évolué en 2000 ans)
L'aspect religieux de l'histoire est un point fondamental de l'histoire, avec la présence d'une église puissante et ambiguë qui semble garder le contrôle de la magie via les sedos et ayant assimilés certains mythes à son compte. Sauf celui du roi de bruyère, auquel personne ne croit mais que tous connaissent sous un aspect ou un autre. Sa présence a imprégné la mémoire collective et transparaît dans les comptines, festivals, jeux d'enfants, légendes, histoires de fantômes et autres mythes.
Ainsi les recherches de Stephen, dans les archives de son abbaye lors de son travail l'emmènent sur un chemin qu'il voudrait éviter, et le force à des recoupements soulevant légèrement le voile sur cet être mystérieux qui serait plus ancien que les Skasloi.
L'intrigue peut sembler s'effilocher (les lecteurs de George R.R. Martin ne seront pas dépaysés) mais c'est pour mieux rassembler (presque, il faut bien garder un peu de mystère pour la suite) tous les fils sur la fin en un final qui annonce un second tome très sombre. Le roi de bruyère reste malgré tout assez énigmatique à la fin de l'histoire et sa venue n'augure rien de bon.
L'évolution des personnages est aussi intéressante, chacun d'eux suit un parcours qui le change radicalement. Cela est plus flagrant pour Stephen et Aspar qui sont obligés de revoir leur conception du monde et de s'y adapter très vite.
Ne vous attendez pas à des héros surpuissants, ici ce sont des personnages normaux qui sont confrontés à des créatures de cauchemars qui surgissent des chansons et des légendes. Chacun devra assumer ses choix et faire face à la situation.
Bien sûr ce livre souffre des défauts de tout début de série, on peut avoir du mal à comprendre où va aller l'histoire. Il sert essentiellement à introduire les personnages et à poser les questions auxquelles devra répondre la série.
Mais le mystère du roi de bruyère est en partie éclaircie et le premier acte se termine efficacement. A la fin du tome, la situation est radicalement bouleversée, les nuages se sont accumulés au-dessus des personnages et la tempête ne saurait tarder à éclater ; et le lecteur n'en attend que davantage cette suite : Que va faire le roi de bruyère ? Que va-t-il se passer avec Hansa et Liery ? Quel secret a révélé l'être emprisonné au fin fond du château ?
Il faudra que le lecteur ronge son frein car le tome 2 ne sera disponible que cet été en anglais. Espérons que la traduction de la suite soit aussi rapide que celle de ce tome !
— Zebulon