Les Amants
« Permettez que je caresse vos âmes avec mon histoire, tissée des fils de cent autres histoires… ». C’est ainsi que commence, pour notre plus grand pl...
« Permettez que je caresse vos âmes avec mon histoire, tissée des fils de cent autres histoires… ». C’est ainsi que commence, pour notre plus grand pl...
Irvi et son ami le nain Maluuk ont un plan pour abattre la dictature du Cobra et délivrer enfin la population de son joug cruel. Dissimulés au sein d’...
Comme son titre l’indique, ce diptyque aux couvertures chatoyantes prend la forme d’un conte, dans lequel se mêlent plusieurs inspirations : Mille et Une nuits, légendes indiennes et récit burlesque. Le premier volume s’ouvre sur une scène de théâtre où un conteur s’apprête à commencer son récit. Il s’agit, à première vue, d’une histoire d’amour contrarié somme toute banale, celle de Sian, superbe fille de modestes négociants, et d’Irvi, un jeune homme aux talents d’acrobate, capable, dit-on, de traverser la ville entière sans poser le pied au sol. Tout pourrait aller pour le mieux, sauf que Sian va être vendue à la maison des princesses, pour devenir l’épouse d’un prince ou d’un roi. Et lorsque le jour fatidique arrive et que Sian rejoint cet affreux palais, les plans d’Irvi pour la sortir de là ne se déroulent pas tout à fait sans accroc. De ce point de départ, source de moult déceptions, vont découler divers évènements qui vont directement influer sur le destin de nos deux amoureux.
Nous avons d’un côté Sian, le cœur brisé, condamnée à épouser un homme qu’elle n’aime pas, et de l’autre, Irvi, le palpitant en miettes, rongé par l’amertume, qui porte le trop lourd fardeau de son échec. Chacun prend alors un chemin différent de celui qu’il aurait voulu emprunter : Sian rejoint la cage dorée à laquelle ses parents la destinaient, tandis qu’Irvi se lie à de singuliers compagnons. Car leur histoire, finalement, n’implique pas uniquement nos deux protagonistes, elle va avoir des conséquences, des ramifications, et pourrait bien orienter bien plus de destins qu’escompté, au point peut-être d’engager l’avenir du royaume.
Comme dans L’Ile sans sourire, le récit s’accompagne d’une réflexion, déployée avec subtilité, qui porte ici sur l’amour, le poids de l’échec et la possibilité de le sublimer. C’est une histoire de rédemption, de pardon, mais aussi une histoire qui parle d’art et de regard porté sur la beauté du monde. Chaque personnage, principal ou secondaire, porte quelque chose de tragique, quelque chose à désamorcer pour pouvoir enfin s’en libérer, et chacun est à sa façon porteur d’une petite leçon de vie.
Enrique Fernández est un conteur de talent. On retrouve ici ses jeux d’ombre et de lumière qui donnent une force toute particulière à certaines cases. Le trait est plein de vie et mis en valeur par une mise en couleurs soignée qui sert très élégamment le propos. Tout figé que soit le dessin sur papier, il y a quelque chose qui évoque ici le cinéma d’animation – spécialité initiale de l’auteur –, dans la façon dont le conte est narré par l’image mais aussi dans l’impression de mouvement et la dynamique qui se dégagent des illustrations de Fernández. C’est un régal pour les yeux, mais pas seulement. Car c’est là aussi que se déploie tout le savoir-faire de l’auteur : il allie avec une sensibilité désarmante la force d’un récit et celle de son coup de crayon, l’un et l’autre construisant un dialogue de mots, d’images et d’émotions touchant au sublime. Enrique Fernández est en réalité bien plus qu’un « simple » conteur de talent : c’est un artiste-conteur aux doigts de fée et à la voix enchanteresse, dont les superbes histoires sont tissées avec un talent rare qui force l’admiration. De ses contes, on ressort ivre de couleurs et de vie, le sourire aux lèvres et le cœur dans les nuages. Merci, Monsieur Fernández.