La Cité Maudite porte bien son nom : les conditions de vie y sont terriblement dures, ses habitants vivotent comme ils le peuvent, entre de maigres cultures au milieu des ruines et une pêche quasi interdite. Tout culte leur est également proscrit. Le Temple, lui, se tient à l’écart et son clergé, entretenu et bien nourri, patrouille dans la ville pour s’assurer que rien ne change. Entre les habitants de la Cité en ruines, la concurrence est rude. Lorsque Jan est poursuivi par une bande d’adolescents plutôt bêtes et méchants, il fuit à perdre haleine. Jusqu’à sa chute dans un trou qui le mène à une curieuse statuette, celle d’un dieu, sans le moindre doute, mais lequel ? Coincé dans les décombres et sans moyen de s’en sortir, Jan tente une offrande au dieu en espérant qu’il pourra l’aider.
Ce sont ces deux personnages, un adolescent et un dieu amnésique, que nous suivrons au long des deux volumes dans un univers inspiré de l’Antiquité. Les dieux et leurs personnalités… difficiles à gérer évoquent le panthéon grec et ses incessantes querelles, jusqu’aux petites mesquineries divines et autres manipulations. Cela les rend assez réjouissants, et leur côté parfois caricatural se justifie par les domaines restreints auxquels ils correspondent : on n’attend pas forcément une grande finesse ou un sens de la diplomatie à toute épreuve chez une divinité de la guerre, par exemple. L’idée même de ce dieu amnésique, incapable de se souvenir de son champ de compétences et de ses attributs, donne lieu à quelques moments cocasses, y compris du côté de l’Alphée où son réveil suscite de nombreuses interrogations.
Les personnages secondaires humains s’avèrent particulièrement intéressants, notamment du côté du chariot-théâtre : ils offrent une diversité bienvenue, finement amenée et traitée avec bienveillance, tout en suscitant la réflexion du lecteur. Le récit dans son ensemble progresse régulièrement, mais il ne faut toutefois pas s’attendre à des scènes d’action épique, les combats qui se mènent ici ne se font pas les armes à la main. Il n’empêche que Petit Dieu offre un très bon moment de lecture, avec une histoire intéressante et des protagonistes attachants : il s’agit d’un diptyque qui mériterait d’être plus connu.
— Erkekjetter
