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Et que désirez-vous ce soir

Pas de couverture

Résumé

Jour de deuil : Joyau et les autres courtisanes de la Maison Bicchieri pleurent la perte de leur collègue et amie Winfield, tuée de sang-froid par un client haut placé.Mais lors de ses obsèques, elle revient à la vie. La morte qui ne l’est plus.
Joyau n’arrive pas à s’en réjouir. Au contraire, elle est terrifiée. La douce, charmante, docile Winfield est désormais animée d’une implacable volonté de se venger des puissants qui abusent de leurs privilèges. Et malgré la haine que Joyau nourrit envers les oppresseurs, malgré son désir de rébellion, malgré l’affection qu’elle porte à Winfield, elle a tout à perdre si son amie renverse la Maison Bicchieri. Car cela signifierait : être de nouveau livrée à la rue, à la merci de ses criminels et des purges gouvernementales.

Chronique

Avec Et que désirez-vous ce soir, Premee Mohamed livre une novella qui papillonne entre les genres. 
Ni tout à fait science-fiction, ni pure fantasy (la novella a remporté un prix dans les deux genres, qui plus est, dont un World Fantasy Award), le texte relève plutôt de la fable dystopique, où l’impossible survient sans jamais se révéler tout à fait expliqué. Même s'il faut le reconnaître, le cadre apparent sonne plus "SF" dans son vocabulaire et son environnement, soyons objectifs.
Ce choix assumé peut en tout cas avoir une dimension déroutante, mais il permet de maintenir une atmosphère de mystère et de malaise qui apporte toute sa saveur au récit.
L’écriture est riche, volontiers lyrique, imprimant au texte, court, on parle d'une centaine de pages seulement ici, une intensité qui illustre la détresse des personnages, une détresse qui ne joue pas tant que la mélancolie que sur une ironique mordante, ou désespérée, selon le point de vue de chacun.
L'autrice privilégie l’évocation et la sensation à l’intrigue structurée de A à Z : le décor de canaux, de maisons de courtisanes et de rituels clandestins sert avant tout de toile symbolique pour parler d’exploitation, de domination et de survie. C’est là que la novella convainc pleinement, par sa capacité à transformer un cadre étouffant en parabole sociale et politique qui ne souligne pas trop le trait.
Cette approche elliptique ne plaira sans doute pas à tout le monde, comme toujours par ailleurs ; c'est toutefois le propre des nouvelles et novellas, savoir proposer un texte ramassé, qui va à l'essentiel. Les amateurs de récits immersifs et d’ambiances fortes trouveront donc dans ces pages un texte marquant, là où d’autres risquent de rester sur le seuil, frustrés par l’opacité du style et le peu de place accordée aux développements scénaristiques.
C’est précisément dans cette tension que se joue l’intérêt de la novella : une lecture courte, mais dense, qui ne laisse pas indifférent. Notons par ailleurs la sublime illustration de Thomas Dambreville - et si, je suis objectif ! - qui parvient à capturer toute l'essence du texte et ses ambivalences de genre. 

Gillossen

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