Après le très convaincant A Little Hatred, Joe Abercrombie revient à sa trilogie The Age of Madness avec un deuxième tome intitulé The Trouble with Peace. Le roman reprend l’ensemble de la nouvelle génération de personnages où on l’avait laissée, c’est-à-dire au cœur d’évènements sociaux et politiques qui pourraient bien les dépasser.
Et ces évènements ne se font pas attendre puisque l’auteur, bien loin de céder aux sirènes des tomes de transition, livre ici un récit aussi rythmé – voire encore plus – et sans temps mort que le premier opus. Du haut de ses 500 pages, The Trouble with Peace avance vite, avec assurance, et donne un roman condensé, sans fioritures où chaque scène à sa place, que ce soit pour poser les personnages ou faire avancer l’intrigue. Comme pour le premier tome, on sent vraiment qu’avoir réfléchi la trilogie d’un seul tenant a permis à Abercrombie de maintenir le cap et de tenir les rênes de son histoire d’une main ferme.
Bien loin de la structure habituelle des deuxièmes tomes de trilogie, le roman propose un récit complet où la plupart des enjeux mis en place y trouvent une conclusion. Evidemment, l’auteur n’hésite pas à faire du teasing pour le troisième tome, mais il s’agit plus souvent d’une réplique ou d’une petite mise en place ; The Trouble with Peace est bien plus qu’une rampe de lancement pour The Wisdom of Crowds.
L’intrigue est notamment structurée autour de la rivalité grandissante et quasi-manufacturée entre le roi Orso et Leo dan Brock. Dans toute la première moitié du roman, le lecteur trouve un vrai plaisir à voir les différentes pièces de l’échiquier se mettre en position, entre jeux de pouvoir, magouilles politiques et coups bas. Joe Abercrombie nous offre à ce moment-là un certain sens du tragique, avec une bonne utilisation des non-dits et des quiproquos, notamment entre les 4 personnages principaux. Ils sont loin d’être si différents les uns des autres mais les situations, les rancœurs et incertitudes personnelles ou d’autres personnages moins bien intentionnés les poussent dans une situation explosive. Car la lente montée en tension amène inévitablement à l’explosion, littéralement, et la deuxième moitié du roman n’est pas avare en combats, en drames et en ironie tragique.
On pourra cependant reprocher une résolution un peu en deçà de cette grande mise en pression où les pièces de l’échiquier, après avoir volé en tous sens, retrouvent peut-être un peu trop rapidement leur emplacement, sans trop de dégâts.
Mais le destin de ces personnages n’est pas terminé et le lecteur pourra se précipiter sur le troisième et dernier tome, The Wisdom of Crowds, avec une confiance encore renouvelée en l’auteur, au plus haut de sa forme.
— Merwin