On connaît Leigh Bardugo pour Grisha et ses autres romans à succès situés dans le même univers, d'abord publié chez Bragelonne avant d'être repris aux éditions Milan. Etonnamment, voilà que l'autrice change encore d'éditeur, puisque ce nouveau roman vient de paraître chez De Saxus.
Leigh Bardugo change totalement de cadre avec une fantasy contemporaine et résolument adulte dans le ton et dans les thèmes abordés. Si vous n'êtes pas amateurs de descriptions parfois très graphiques de scènes tout aussi dures, passez votre chemin. Un véritable parfum d'horreur plane sur ces pages. Pour le reste, la structure même du roman (avec ses alternances temporelles, qui n'apportent pas de réelle plus-values à l'intrigue) et ce contexte de sociétés secrètes aura sans doute de quoi séduire de nombreux lecteurs, même si Bardugo ne révolutionne pas le genre pour l'occasion (ce qu'on ne lui demande certes pas).
Les monologues intérieurs s'avèrent au passage un peu trop nombreux, à l'image d'un roman qui brille plus par son ambiance poisseuse que par le charisme de ses protagonistes, pour ne pas dire que son héroïne, "Alex" affiche un comportement parfois destabilisant, tant ses justements se font à l'emporte-pièce. Les autres, à part le dénommé Darlington, manque souvent d'aspérités, quand ce n'est pas tout bonnement de subtilité. Bardugo prend le risque justement de laisser cette atmosphère très marquée infuser lentement, sans doute un peu trop au gré de certains, mais les choses s'accèlèrent nettement dans le dernier tiers du roman, avec d'ailleurs quelques retournements de situations bienvenus.
Au bout du compte, si La Neuvième Maison ne constitue pas une claque ou la découverte indispensable de cette rentrée, c'est un roman qui devrait sans difficulté trouver son public. A noter toutefois une version française largement perfectible, y compris dans sa mise en page (ce qui était d'ailleurs déjà le cas avec le fameux Le Prieuré de l'Oranger sur ce point). Si la traduction est de qualité, il reste en revanche un certain nombre de coquilles et autres si l'on se fie à des échos croissants. C'est bien dommage. Pour ne pas dire étonnant, quand on voit le budget que cet éditeur peut consacrer à son département promotion.
Au bout du compte, La Neuvième Maison n'est pas un mauvais roman, mais l'autrice nous a déjà habitués à nous emporter dans le tourbillon de ses histoires avec bien plus d'allant de son côté et d'enthousiasme du nôtre. Nul doute toutefois que son cadre et son récit bien calibré lui permettront d'accumuler quoi qu'il arrive les ventes ou de viser une adaptation, qui est déjà d'ailleurs prévue au format série TV.
— Gillossen