Gideon the Ninth a tout de suite fait son petit effet sur moi via son illustration de couverture, il faut bien l'avouer. Son illustration, et sa quatrième, comme quoi, on dira ce que l'on voudra, voilà qui compte encore énormément à l'heure de faire son choix en rayons. C'est aussi une parution Tor Books, qui reste le géant du secteur et avait mis en avant le titre. Pas forcément de façon vraiment "agressive", mais il ne s'agissait visiblement pas d'une sortie parmi d'autres non plus.
Le roman se distingue avant tout par son contexte - une sorte de fantasy à portée "cosmique", pour ainsi dire - et son ton, ouvertement déjanté (jetez donc un oeil à la citation de Charles Stross en couverture, si ce n'est déjà fait !). Gideon n'est pas un personnage comme les autres, c'est certain, et si l'autrice néo-zélandaise pousse les curseurs assez loin, on évite tout de même l'écart du "trop" et/ou du "fait pour choquer". Mais c'est un roman cru, qui ne conviendra certainement pas à tous les publics, à l'image aussi de la relation très particulière entre Gideon et Harrow (et non, on ne fait pas allusion à l'orientation sexuelle des personnages, plutôt à leur lien psychologique).
S'il démarre au quart de tour, il se perd ensuite en cours de route, notre intérêt se maintenant grâce à l'atmosphère goth(ique) de l'ensemble, avec un sens certain du bizarre en tête. On songe même à Gormenghast de temps à autre, ce qui n'est pas rien ! Côté registre, le côté irrévérencieux du personnage principal, à la langue - évidemment - bien pendue, fait que l'on ne bascule jamais vraiment sur un versant plus horrifique.
Il s'agit en tout cas d'un roman mine de rien plutôt dense pour moins de 450 pages, sombre, et voire peut-être un peu trop obscur par moments. Etant question ici d'un premier tome (et oui, c'est une trilogie en devenir), on imagine bien que c'est là un flou volontairement entretenu de la part de Tamsyn Muir, flou qui n'en demeure pas moins frustrant, pour Gideon aussi d'ailleurs. Dans ses pas, cela se révèle finalement plus amusant qu'autre chose à vivre.
Premier roman - et premier tome donc - sans doute trop ambitieux pour son propre bien, Gideon the Ninth constitue néanmoins une lecture récréative particulièrement fun, le plus souvent.
Il ne reste plus qu'à attendre Harrow the Ninth et Alecto the Ninth, les tomes 2 et 3 de la trilogie.
Mise à jour du 13 avril 2022 :
Arrivée de la traduction française du roman chez Actes Sud. Depuis la parution initiale de cette chronique, un quatrième tome a été annoncé.
— Gillossen