Un nouveau roman de Neil Gaiman est fatalement attendu. L'auteur est tout de même l'une des rares "célébrités" - au sens propre du terme et pas seulement quelqu'un connu de ses voisins... - du genre à avoir réussi à repousser les barrières.
Présenté comme son retour au roman pour "adultes", L'océan au bout du chemin se révèle tout d'abord très court et sans doute tout à fait lisible par des lecteurs adolescents, notamment ceux qui auraient découvert un Nobody Owens par exemple. L'auteur explique avoir puisé largement dans sa propre enfance, déclinée dans une version romancée bien sûr, pour donner vie à cette nouvelle histoire et cela se sent aisément, à travers une nostalgie palpable et un ancrage dans le réel bourré de références.
Pour le reste, sur le fond comme sur la forme, on navigue dans du Neil Gaiman pur jus. On retrouve ainsi son sens de l'étrange, sa facilité à donner vie à tout un univers au détour d'une rue, sa gestion du suspense, ses personnages fascinants et sachant toujours conserver une part de mystère, mais aussi cette plume en apparence souvent sobre mais capable sans crier gare de vous asséner une vérité aussi limpide qu'évidente, dont on se demande pourquoi personne ne l'avait énoncée plus tôt.
Souvent touchant (certaines scènes ne dépassant parfois pas quelques lignes sont d'une cruauté à la banalité confondante et la relation entre les deux protagonistes principaux est à la fois subtile et douce-amère), le roman ne réussit malheureusement jamais tout à fait à nous entraîner dans les pas de son jeune héros débrouillard et décidé.
Dans la postface, Neil Gaiman précise que L'océan au bout du chemin était d'abord prévu comme une novella, autrement dit une longue nouvelle. Et cela se sent à plusieurs reprises au fil de l'intrigue. Très vite, celle-ci paraît en effet bien mince tant que l'on en reste à sa trame principale.
Les personnages s'imposent donc comme la réussite majeure de ce roman, dont l'intrigue proprement dite passe régulièrement au second plan, et pas seulement parce qu'il est ici question de souvenirs ou de se retourner sur son passé. Reste bien sûr le talent de conteur Neil Gaiman, déjà évoqué plus haut.
Mais 15 jours après l'avoir terminé, je n'ai déjà que bien peu de souvenirs justement de ce roman, ce qui n'est guère courant avec un tel auteur. Un auteur dont on attend toujours un peu plus que la moyenne ou qu'un "simple" bon roman.
3 octobre 2014 : mise à jour de la chronique en vue de la parution de la version française au Diable Vauvert pour le 23 octobre.
— Gillossen