Quand on connaît le système de magie développé dans la trilogie Fils-des-Brumes, rien que l’idée de le voir déployé dans un univers proche du western nous mettait l’eau à la bouche. Encore fallait-il que l’essai se concrétise, même si on faisait plutôt confiance à Sanderson pour le coup. Surtout que l’épaisseur du roman – loin des pavés auxquels nous avait habitués l’auteur – nous rassure quant à son péché mignon : les longueurs…
Comme on pouvait s’y attendre, l’association fait des merveilles ! À tel point que l’allomancie semble avoir été imaginée tout spécialement pour ce Far West version Sanderson. C’est faux, bien sûr, mais quel plaisir que d’assister aux duels ou règlements de compte entre allomanciens. Alors que les bottes de paille roulent sur le sable, que les brumes engloutissent les vieilles bicoques de bois et la gare de chemin de fer, les balles fusent de partout, les chapeaux se trouent, les méchants tombent comme des mouches et les fioles de whisky… et de métaux se vident. Plus court, plus percutant, plus spectaculaire que les précédentes productions adultes de l’auteur, L’Alliage de la Justice se révèle aussi le plus drôle. Une caractéristique à laquelle le duo au cœur du roman n’est pas étranger… Au point de nous faire oublier Kelsier, Vin, Elend et les autres ?
Sans aucun doute. Si Wax tout seul tient la dragée haute aux héros mentionnés plus haut, sa complicité avec Wayne, les tirades savoureuses qui bigarrent chacun de leurs échanges, le plaisir que l’auteur a pris à les écrire, traversent le papier pour sauter aux yeux d’un lecteur rapidement conquis. Malheureusement, ce duo explosif pousse les autres protagonistes au second plan, et même Marasi – pourtant attachante – a du mal à être plus que la cinquième roue du carrosse. La chaleur des deux « W » contamine également l’écriture de l’écrivain américain, et parvient à colorer sa plume un tantinet mécanique... Jusqu’à en faire son meilleur roman.
Non, nous n’irons pas jusque-là. Vous l’aurez compris, si le présent roman s’avère plus léger que L’Empire Ultime par exemple, il n’en a pas l’ambition. Néanmoins, au regard des autres qualités qui caractérisent L’Alliage de la Justice, on a envie de dire « Ce n'est pas grave, au contraire ! ». Non si l’on devait lui trouver un défaut, on montrerait du doigt la fin. Quelque peu abrupte, un tantinet décevante, celle-ci pourrait même apparaître prévisible, pour les lecteurs qui commencent à saisir le fonctionnement de Sanderson – ce qui a été mon cas concernant l’identité du grand méchant.
Enfin, il y a la nouvelle intitulée Le onzième Métal, mais nous ne reviendrons pas dessus, puisque vous l’avez forcément lu, vous qui suivez quotidiennement le site elbakin.net et ne vivez que pour lui.
Moins ambitieux d’un côté, plus court, plus drôle, plus léger, plus spectaculaire, plus percutant de l’autre. Le compte est vite fait. Même une fin en dessous du reste n’arrive pas à nous faire oublier que Sanderson demeure plus que jamais l’un des grands noms de la fantasy actuelle.
— Zedd